Décès de Bernard Dargols, le « GI » français d’Omaha Beach

Les 177 membres du commando Kieffer ne furent pas les seuls Français à débarquer sur une plage normande… Bernard Dargols également, mais à Omaha Beach, avec la 2e Division d’Infanterie de l’US Army. Et ce soldat au parcours atypique, vient de nous quitter à quelques jours de son 99e anniversaire. L’annonce de son décès a été faite par le Mémorial de Caen.

Né à Paris en 1920 d’un père russe, patron d’une entreprise spécialisée dans l’importation de machine à coudre, et d’une mère anglaise, Bernard Dargols suit un stage aux États-Unis quand débute la « drôle de guerre ». Puis, le 22 juin, il apprend la signature de l’armistice franco-allemand. Mais la poignée main entre le maréchal Pétain et Adolf Hitler [le 24 octobre 1940, à Montoire] est un choc. « Je me suis alors dit que jamais je ne combattrai avec l’armée de Pétain », dira-t-il plus tard.

Déterminé à prendre sa part pour la libération de la France, il songe à rejoindre les Forces Françaises Libres [FFL] du général de Gaulle. Mais il rejoindra finalement les rangs de l’US Army, après l’attaque de Pearl Harbor, soit un an après avoir sa demande d’engagement. C’est ainsi que Bernard Dargols est incorporé à Fort Dix, dans le New Jersey avant d’être affecté à Croft, en Caroline du Sud.

Après sa formation militaire, le jeune homme rejoint une unité du Military Intelligence Service, en raison notamment de sa maîtrise de la langue française. À la fin de l’année 1943, la 2e DI de l’US Army rallie le Pays de Galles, en vue de la future opération Overlord. Et c’est depuis Cardiff qu’il embarquera à bord d’un Liberty Ship pour traverser la Manche et atteindre les côtes normandes.

Comme il expliquera à l’occasion du 70e anniversaire du D-Day, Bernard Dargols arrive à Omaha Beach « au milieu des bombardements incroyables, non pas des Allemands, mais des Américains », qui « tiraient pour nous permettre de prendre pied avec un peu plus de sécurité ».

Il est alors confié au jeune GI français la mission de reconnaître les environs du vllage de Formigny, où les troupes allemandes sont encore présentes.

« J’avais deux heures pour prendre des renseignements. […] Alors, je suis parti avec ma jeep [appelée « Bastille », ndlr] et j’ai interrogé des paysans français avec mon accent parisien. Les renseignements que je devais obtenir, je les obtenais chez les plus grands fermiers qui avaient logé les soldats allemands. Ils étaient forcés de les héberger. Par eux, j’ai su quelles unités étaient là, quel était leur moral, à quelle heure ils prenaient leur déjeuner, ce qu’ils faisaient dans la journée. Et surtout les trois points importants : où se trouvaient les dépôts de carburants, où se trouvaient les dépôts de munitions et quelles étaient les routes minées », avait-il raconté à l’Express. Et il en fera de même pour chaque localité traversée par les troupes américaines.

En septembre 1944, Bernard Dargols peut embrasser sa mère, restée à Paris. Malheureusement, et parce qu’ils étaient Juifs, plusieurs membres de sa famille ont été déportés en Allemagne. « Ils ont arrêté mes grands-parents, mes oncles… J’ai le numéro de leurs convois, mais ce n’est pas ça qui va les ramener », confiera-t-il à France24.

La guerre terminée, Bernard Dargols poursuit reste mobilisé au Conter Intelligence Cirps jusqu’en janvier 1946. De retour à New York, et rendu à la vie civile, il épouse une jeune française rencontrée au sein de « l’Association Jeunesse Française Libre », avant de revenir à Paris et de reprendre l’affaire familiale.

Pendant très longtemps, M. Dargols est resté très discret sur son engagement au sein de l’US Army. Puis, le temps passant, il lui est apparu nécessaire de raconter ce qu’il a vécu aux jeunes générations. Récemment, lors d’un entretien donné au Parisien, il s’était alarmé de la situation en Europe et dans le monde. « Je pensais qu’on n’entendrait plus jamais parler de dictature, de nazis […] Mais l’homme est fait ainsi. Un bon orateur peut rassembler pas mal de gens, surtout s’il promet la lune à des ignorants. Je crois que c’esr un éternel recommencement. Plus on s’éloigne de la guerre, plus on a tendance à l’oublier », avait-il dit.

À lire : Bernard Dargols, un GI français à Omaha Beach– Caroline Jolivet – Éditions Ouest France / Collection : Témoignages Histoire

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