La Cour des comptes invite la Gendarmerie à rationaliser son dispositif en milieu rural
À partir de 2008, la Gendarmerie nationale a revu son dispositif, ce qui s’est traduit par la création de « communautés de brigade » [COB] et, dans le même temps, de la fermeture de 500 casernes. Et cela a eu au moins deux conséquences : le délai d’intervention des gendarmes s’est accru [il était de 12 minutes, en moyenne, en 2016] et des populations ont eu le sentiment d’être « abandonnées » [les « gens ne voient plus le gendarme », avait confié son directeur, le général Richard Lizurey, ndlr], ce qui tend à amoindrir la capacité à recueillir les « signaux faibles » dans le domaine du renseignement.
D’où une évolution du dispositif mis en place par la Gendarmerie sur le territoire national, avec notamment la création de brigades territoriales dites de « contact ».
Cela étant, entre 2012 et 2018, selon une étude de la Cour des comptes [.pdf] sur l’accès aux services publics dans les territoires ruraux, la Gendarmerie a procédé à la « suppression de 271 brigades [soit une diminution de l’ordre de 7,7 %] à laquelle s’est ajoutée la création de 27 brigades autonomes, soit une diminution nette de 244 unités. »
Ces dissolutions, indique l’étude, ont « principalement concerné des unités à très faible activité ou à faible effectif » mais aussi d’autres qui étaient implantées en zone police. Et, de nouvelles brigades ont vu le jour » à la suite de la reprise par la gendarmerie d’anciennes circonscriptions de police. »
Or, souligne la Cour des comptes, si le nombre de brigades de gendarmerie a diminué, cela ne n’est pas traduit par une baisse des effectifs dans les territoires ruraux.
« La part des effectifs de la gendarmerie affectée dans les territoires ruraux, qui représentent 36,1 % des effectifs des brigades territoriales, n’a quasiment pas varié depuis 2012, témoignant
de la volonté de maintenir une présence dans ces territoires », avance en effet cette étude.
Pour la Direction générale de la Gendarmerie [DGGN], cela s’explique par l’étendue des tâches demandées aux gendarmes [police, sécurité routière, lutte contre la délinquance, renseignement, etc].
Seulement, selon la Cour des comptes, certains départements sont mieux lotis que d’autres. Ainsi, avance-t-elle, au moins 8 d’entre-eux [Ardèche, Ariège, Cher, Corrèze, Côte-d’Or, Haute-Saône, Lot et Vosges] présentent un « ratio de couverture de la population bien plus favorable que le ratio moyen de 1 gendarme pour 1.000 habitants affiché par la DGGN » [cette variable est de 1 militaire pour 800 habitants en zone péri-urbaine, ndlr].
En outre, poursuivent les magistrats de la rue Cambon, « le niveau de délinquance dans ces territoires demeure faible et le calibrage des effectifs est assez peu corrélé à cet indicateur, alors que le maillage des brigades ne peut être totalement déconnecté de l’activité de police judiciaire de ces unités. » Tel est le cas de la Corrèze, où, en moyenne, moins de 18 faits sont constatés par an et par gendarme.
Par ailleurs, la création des brigades territoriales de contact [BTC], dans le cadre de la politique de « police de sécurité du quotidien », lancée en juillet 2018, rend la Cour des compte sceptique. « L’efficience d’un tel dispositif, qui a vocation à mobiliser à terme des effectifs nombreux, et à justifier le maintien d’un maillage dense dans des territoires où l’activité opérationnelle est réduite, doit néanmoins pouvoir être évaluée à partir d’indicateurs à définir », estime-t-elle en effet.
Et d’ajouter : « La rationalisation entreprise par la DGGN doit se poursuivre, d’autant plus que la subsistance, dans les territoires ruraux, d’unités ne disposant pas de la taille critique n’est pas sans conséquence […] sur l’attractivité des postes à pourvoir au sein de ces brigades. » Et, selon cette étude, 250 brigades territoriales de gendarmerie, situées en zone rurale, sont considérées comme « peu attractives. »