Le chef de l’US Marine Corps critique le projet visant à construire un mur à la frontière mexicaine
Comme il l’avait promis durant la course à la Maison Blanche, le président Trump fait feu de tout bois pour construire un mur à la frontière mexicaine afin de mettre un coup d’arrêt à l’immigration clandestine. Seulement, pour cela, il faut trouver des financements, ce qui donne lieu à des échanges tendus avec le Congrès, où même des élus de son propre camp contestent ce projet.
Aussi, M. Trump a décrété, le 15 février, « l’urgence nationale » pour débloquer des fonds fédéraux pour la construction de ce mur, en évoquant une « invasion » de migrants en situation illégale. Cette procédure doit ainsi permettre à l’exécutif américain de trouver 8 milliards de dollars, pris principalement sur les crédits du Pentagone.
Le 15 mars, et comme la Chambre des représentants l’avait fait avant lui, le Sénat, avec l’appui d’une douzaine de sénateurs républicains, a voté une résolution proclamant que « l’urgence nationale déclarée par le président […] était par la présente annulée. » Immédiatement, M. Trump a usé de son droit de veto, estimant qu’il s’agissait là d’un texte « dangereux ».
Désormais, pour passer outre ce veto, le Congrès doit obtenir une majorité des deux tiers tant au Sénat qu’à la Chambre des représentants. Même si ce scénario paraît improbable, la « bataille » continue. Ainsi, quatre jours plus tard, le Pentagone a fait parvenir au Congrès une liste de 20 pages contenant le détail des d’infrastructures susceptibles d’être menacés pour financer, à hauteur de 6,7 milliards de dollars, le mur voulu par M. Trump.
« Maintenant que les membres du Congrès peuvent constater l’impact potentiel que cette proposition pourrait avoir sur des projets dans leurs États, j’espère qu’ils en tiendront compte avant le vote visant à contrecarrer le veto présidentiel », a commenté le sénateur [démocrate] Jack Reed, membre du comité des Forces armées.
Mais, a priori, cela ne devrait pas permettre aux démocrates de remporter la partie. À moins que les critiques du général Robert Neller, quio n’est autre que le commandant de l’US Marine Corps [USMC] fasse pencher la balance in-extremis.
Ainsi, dans deux mémos publiés par le Los Angeles Times et dont l’authenticité a été confirmée par l’USMC, le général Neller estime que le déploiement de troupes à la frontière mexicaine [4.500 militaires, dont 500 Marines] et le financement du mur représentent un « risque inacceptable » pour ses Marines.
S’agissant des envois de troupes à la frontière sud des États-Unis, « imprévus et non budgétisés », le général Neller a expliqué qu’il avait été contraint d’annuler des exercices militaires dans cinq pays.
« Les Marines ne participeront pas à des exercices prévus en Indonésie, en Écosse et en Mongolie, et leur participation à des manœuvres conjointes en Australie et en Corée du Sud sera réduite », a en effet indiqué le chef de l’USMC. Et cela, « à un moment où nous essayons de doubler le renforcement des alliances et d’attirer de nouveaux partenaires », a-t-il ajouté.
Mais là n’est sans doute pas le plus grave. En effet, certains projets d’infrastructure – et non des moindres – impactés par « l’urgence nationale » décrétée par M. Trump concerneront les Marines.
« Le corps des Marines ne pourra pas financer la reconstruction de ses bases ravagées par des ouragans en Caroline du Nord et en Géorgie. La saison des ouragans démarre dans trois mois, et nous avons des Marines, des marins et des civils qui travaillent dans des structures qui ne sont pas sûres », a fait valoir le général Neller.
Et ce dernier d’insister : « Le budget 2019 était censé être un ‘bon’ budget, dans les délais et d’un montant supérieur. Ces attributs positifs sont désormais dépassés par les facteurs négatifs […], imposant des risques inacceptables à la préparation au combat du corps des Marines et à sa solvabilité. »
Plus tard, le capitaine Joseph Butterfield, un porte-parole de l’USMC a enfoncé le clou. « Financièrement, la reconstruction des zones affectées par les ouragans est, de loin, la plus conséquente des pressions énumérées dans les mémos », a-t-il expliqué.
Plus généralement, pour certains responsables militaires américains, la menace ne vient pas du sud des États-Unis mais du nord… « L’Arctique est une région sur laquelle nous devons vraiment nous concentrer et investir avant tout. Ce n’est plus une zone tampon », a en effet expliqué l’un d’eux, à savoir le général Terrence O’Shaughnessy, de l’US Northern Command et du NORAD [North American Aerospace Defense Command / Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord].
Et d’expliquer, lors d’une audition au Sénat américain, fin février : La Chine et la Russie « ont établi une assise sensiblement plus solide dans l’Arctique, le long des approches nord des États-Unis et du Canada » et il est donc nécessaire de « prendre des mesures actives pour assurer notre capacité à détecter, contrecarrer et contrecarrer les menaces potentielles dans cette région. »