Le président Macron propose un traité de défense et de sécurité pour l’Union européenne

Dans une tribune diffusée en 28 langues, ce 5 mars, le président Macron a précisé le projet qu’il entend porter à l’occasion des prochaines élections européennes, qui se tiendront le 29 mai. Dans ce texte, intitulé « Pour une renaissance européenne« , il définit ainsi trois priorités : « retrouver l’esprit de progrès », « défendre notre liberté » et « protéger notre continent ».

S’agissant du progrès, Emmanuel Macron propose de doter le « nouveau Conseil européen de l’innovation d’un budget comparable à celui des États-Unis, pour prendre la tête des nouvelles ruptures technologiques, comme l’intelligence artificielle », ce qui ne peut qu’intéresser le monde de la Défense.

Toujours dans le même chapitre, le président français estime qu’une « Europe qui se projette dans le monde doit être tournée vers l’Afrique, avec laquelle nous devons nouer un pacte d’avenir ». Il s’agirait ainsi de soutenir le développement de ce continent, via des investissements, des partenariats universitaires ou encore « l’éducation des jeunes filles ». Là encore, de telles mesures pourraient faire reculer l’influence jihadiste. Dans ce domaine, l’Union européenne soutient par exemple un Programme d’Investissements Prioritaires [PIP], au profit des pays du G5 Sahel.

Le second sujet évoqué par M. Macron concerne essentiellement les influences extérieures qui, via les cyberattaques et autres « infox », visent à manipuler les élections. « Nous ne pouvons pas nous permettre d’être naïfs. […] Il y a des gens qui veulent perturber les élections européennes, et qui disposent d’outils très sophistiqués », avait ainsi prévenu Frans Timmermans, le vice-président de la Commission, en décembre dernier. La campagne sur le Brexit, au Royaume-Uni, aurait donné lieu à de telles ingérences, des chercheurs de l’Université d’Édimbourg ayant identifié pas moins de 400 faux comptes créés sur les réseaux sociaux pour diffuser des messages hostiles à l’Union européenne.

« Notre liberté première est la liberté démocratique, celle de choisir nos gouvernants là où, à chaque scrutin, des puissances étrangères cherchent à peser sur nos votes », a résumé M. Macron, avant de proposer la création d’une « Agence européenne de protection des démocraties qui fournira des experts européens à chaque État membre pour protéger son processus électoral contre les cyberattaques et les manipulations. » Et, pour faire bonne mesure, il estime également qu’il faudrait « interdire le financement des partis politiques européens par des puissances étrangères » et « bannir d’Internet, par des règles européennes, tous les discours de haine et de violence, car le respect de l’individu est le fondement de notre civilisation de dignité. »

Enfin, au chapitre « protéger notre continent », Emmanuel Macron estime que l’UE a « oublié de regarder les réalités du monde ». Et, selon lui, « aucune communauté ne crée de sentiment d’appartenance si elle n’a pas des limites qu’elle protège ». D’où la nécessité de veiller sur les frontières européennes. « La frontière, c’est la liberté en sécurité », insiste-t-il.

Aussi, le président français propose de « remettre à plat l’espace Schengen » et de mettre en place une « police des frontières commune et un office européen de l’asile », avec des obligations strictes de contrôle et une solidarité européenne à laquelle chaque pays contribue. Et le tout sous l’autorité d’une « Conseil européen de sécurité intérieure. »

Cela étant, M. Macron n’a pas oublié la défense européenne. Et si d’importants progrès ont été accompli ces dernières années avec le Fonds européen de défense et la coopération structurée permanente, il s’agit d’aller encore plus loin puisqu’il propose un « traité de défense et de sécurité » pour l’UE.

Ce texte « devra définir nos obligations indispensables, en lien avec l’Otan et nos alliés européens : augmentation des dépenses militaires et clause de défense mutuelle rendue opérationnelle », explique-t-il.

En clair, et comme il l’avait déjà annoncé en août 2018 lors de la Conférence des ambassadeurs, l’idée est de renforcer la portée de l’article 42-7 du Traité sur l’Union européenne, lequel prévoit que les États membres doivent « aide et porte assistance par tous les moyens en leur pouvoir  » à l’un d’entre-eux s’il fait l’objet d’une « agression armée sur son territoire. » Mais il s’agit aussi de renforcer le pilier européen de l’Otan en doter l’UE d’une autonomie stratégique par rapport aux États-Unis.

En outre, ce nouveau traité instituerait un « Conseil de sécurité européen », comme l’avait déjà proposé Angela Merkel, la chancelière allemande, en novembre dernier. Et, à l’époque, elle avait estimé qu’il ne fallait « plus appliquer la règle de l’unanimité » dans ce domaine afin de permettre à l’UE d’agir plus facilement sur la scène internationale ».

Dans sa tribune, M. Macron reprend donc à son compte l’idée de ce Conseil de sécurité européen en voulant y associer le Royaume-Uni « pour préparer nos décisions collectives. » Pour rappel, Londres a rejoint l’Initiative européenne d’intervention [IEI] lancée par Paris en dehors du cadre de l’UE afin de développer une culture stratégique européenne et à renforcer la capacité des pays européens à agir ensemble.

Photo : Ministère des Armées

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