L’Otan appuie « pleinement » la décision de Washington de se retirer du traité sur les Forces nucléaires intermédiaires

Depuis plus de 30 ans, le traité sur les Forces nucléaires intermédiaires [FNI] aura été une élément fondamental pour la sécurité de l’Europe. S’appliquant uniquement aux États-Unis et à la Russie, ce texte, qui mit fin à la crise des Euromissiles, interdit la mise au point et le déploiement de missiles d’une portée comprise entre 500 et 5.000 km. Mais il faudra désormais en parler au passé.

En 2014, Washington accusa Moscou d’avoir développé en secret un nouveau missile – le 9M729 « Novator » [ou SSC-8] – dont les performances n’étaient pas conformes au traité FNI. À plusieurs reprises, les États-Unis et l’Otan demandèrent des informations à la Russie au sujet de cet engin. Sans succès. En revanche, les autorités russes démentirent tout manquement à leurs obligations.

Puis, en octobre 2018, le président Trump fit part de son intention de se retirer du traité FNI. Et, en décembre, l’Otan donna 60 jours à la Russie pour répondre à ses préoccupations au sujet du 9M729 « Novator ». Depuis, des rencontres entre diplomates américains et russes ont eu lieu pour évoquer cette question. Mais chaque partie a campé sur ses positions… Même chose lors de la dernière réunion du Conseil Otan-Russie, le 25 janvier dernier…

Toutefois, l’état-major russe avait organisé, deux jours plus tôt, une présentation officielle du missile en question. Le « 9M729 fait partie du ‘complexe Iskander-M »‘ et il est une « évolution du 9M728 », avait alors expliqué le général Mikhaïl Matveïevski, le chef des troupes balistiques et de l’artillerie des forces russes.

Et si cet engin est plus long [de 53 cm] que son prédécesseur, « c’est parce qu’il est doté « d’équipements supplémentaires » et qu’il « peut porter plus d’ogives », avait continué le général russe, précisant que la portée du 9M729 était de 480 km, soit une distance conforme au traité FNI. Le souci est qu’il n’est pas pssoble de s’assurer de l’exactitude de telles déclarations…

Finalement, ce qui était à craindre a fini par arriver. Ce 2 février, les États-Unis ont officiellement annoncé leur décision de « suspendre leurs obligations dans le cadre du traité FNI » et de « lancer le processus de retrait », qui « sera achevé dans six mois, à moins que la Russie respecte ses obligations en détruisant tous ses missiles, lanceurs et équipements qui violent le texte. »

« La Russie a mis en danger la sécurité des États-Unis et nous ne pouvons plus être entravés par un traité pendant que la Russie le viole éhontément », a fait valoir Mike Pompeo, le chef de la diplomatie américaine, estimant que ces « violations » constituent une menace pour « des millions d’Européens et d’Américains ».

Cela étant, ce retrait du traité FNI arrange aussi les États-Unis, dans la mesure où ce texte leur liait les mains face à la Chine, qui a toute latitude pour développer et déployer des missiles à capacité nucléaire d’une portée comprise entre 500 et 5.000 km. Et la Russie peut également y trouver son compte, si son objectif est de « menacer l’Europe », comme le suggérait une récente évaluation du renseignement américain.

« Nous pensons que la Russie souhaite probablement ne pas être contrainte par le traité FNI, dans la mesure où elle modernise son armée avec des missiles […] qui, selon nous, sont conçus pour cibler les infrastructures militaires et économiques européennes critiques et être ainsi en mesure de contraindre les alliés de l’Otan », avait en effet estimé Dan Coats, le directeur national du renseignement américain, en novembre 2018.

La crainte de la plupart des pays européens est de voir le Vieux Continent d’être le théâtre d’une nouvelle course aux armements, la fin du traité FNI supposant une adaptation de la stratégie et de la posture de dissuasion de l’Alliance atlantique.

Cela étant, l’Otan a dit « appuyer pleinement » la décision de Washington. « Les Alliés constatent avec regret que la Russie, suivant le comportement plus général qui est le sien, continue de nier cette violation du traité FNI, refuse d’apporter une réponse crédible, et n’a pris aucune mesure concrète dans le sens d’un retour à un respect total et vérifiable », souligne l’organisation, dans un communiqué.

La décision américaine a été prise « face aux risques importants que la Russie fait peser sur la sécurité euro-atlantique en ayant procédé en secret aux essais, à la production et à la mise en service de systèmes de missile de croisière à lanceur terrestre 9M729 », affirme l’Otan. Aussi, « les Alliés appuient pleinement cette démarche », assure-t-elle.

Et d’ajouter : « L’Otan continue à suivre de près les implications des missiles à portée intermédiaire russes sur le plan de la sécurité et continuera à prendre les mesures nécessaires pour assurer la crédibilité et l’efficacité de la posture globale de dissuasion et de défense de l’Alliance. » Toutefois, « nous continuons d’aspirer à une relation constructive avec la Russie, lorsque les actions de cette dernière le permettront », est-il écrit dans le communiqué.

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