Otan : La Défense belge restreint l’usage du téléphone portable pour ses soldats déployés en Estonie

L’affaire avait été soulevée récemment par le syndicat militaire belge ACMP-CGPM. Et elle vient d’être en partie confirmée : par souci de « sécurité opérationnelle » [SECOPS], les 250 soldats d’outre-Quiévrain bientôt déployés en Estonie dans le cadre de l’opération « enhanced Forward Presence » [eFP] de l’Otan devront laisser leur smartphone à la caserne.

« Nous savons que la Russie s’intéresse à ce genre de données mobiles » de géolocalisation, a fait valoir le colonel Carl Gillis, auprès de la VRT. « Nous investissons depuis quelques années dans la prévention et la sensibilisation, mais cela ne semble plus suffire », a-t-il ajouté.

Dans un premier temps, explique l’agence Belga, « les militaires en opération dans les Etats baltes, limitrophes de la Russie, ne devraient plus pouvoir utiliser leurs appareils personnels lorsqu’ils quittent leur base, voire même en toutes circonstances. »

Et une analyse pour savoir si de telles restrictions doivent être étendues à d’autres théâtres d’opérations est en cours au sein de la Défense belge. Mais il faut « un gigantesque exercice d’équilibre » entre usage intelligent du smartphone et impératifs militaires », a estimé le colonel Gillis. « Tous les Belges sont vulnérables à des personnes mal intentionnées via leur smartphone », a-t-il souligné.

Cette année a notamment été marquée par l’affaire « Strava », du nom de cette application qui, utilisant la fonctionnalité GPS des téléphones mobiles [et des montres connectées], permet de suivre les activités sportives de ses utilisateurs. C’est ainsi que la position de bases mais aussi des parcours empruntés par les militaires ont pu être dévoilés. L’application Polar Flow, a également posé des problèmes de cet ordre.

En août, le Pentagone a annoncé des mesures visant à restreindre les fonctions de géolocalisation des accessoires connectés. « L’évolution rapide du marché des appareils, des applications et des services dotés de capacités de géolocalisation représente un risque important pour […] nos opérations militaires à l’échelle mondiale », fit valoir Patrick Patrick Shanahan, alors secrétaire américain adjoint à la Défense.

Et ce dernier d’insister : « Ces capacités de géolocalisation peuvent dévoiler des informations personnelles, des lieux, des routines et les numéros de téléphone d’employés du département [de la Défense], ce qui pourrait avoir des conséquences imprévues et augmenter le risque du groupe ou de la mission. »

Quoi qu’il en soit, et même si la Défense belge a assuré que des « moyens sécurisés nécessaires pour permettre la ‘communication sociale’ avec les familles » alllaient être déployés et que l’utilisation d’Internet serait toujours autorisée, le syndicat militaire ACMP-CGPM a déjà émis des réserves sur ces restrictions annoncées.

« Compte tenu des moyens de renseignement dont dispose la Russie, l’utilité d’interdire les cartes SIM belges dans le contexte de SECOPS est extrêmement douteuse, voire inexistante », a estimé le syndicat. En outre, a-t-il ajouté, « le déploiement de l’armée belge dans les États baltes a[yant] déjà fait l’objet de nombreuses publications dans les médias en termes de durée, de lieu et de force numérique », il n’y a donc pas de « secret » à garder, d’autant plus que « l’objectif du détachement est précisément de dissuader une attaque grâce à la présence et à la visibilité des troupes. »

Reste à voir si, par souci d’efficacité, ces mesures s’appliqueront aux autres soldats déployés au côté du détechement belge, ce dernier devant faire partie d’un bataillon multinational dont le Royaume-Uni est la nation-cadre. « Nous ne pouvons hélas pas aller aussi loin que les Britanniques, qui utilisent des téléphones et des laptops jetables. La Défense n’a pas les budgets suffisants », a toutefois précisé le colonel Gillis.

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