Les opérations aériennes aussi concernées par la décision de mettre un terme à l’engagement américain en Syrie?
A priori, la France et le Royaume-Uni n’ont pas été préalablement avertis de la décision de Donald Trump de mettre un terme à la présence des 2.000 militaires américains en Syrie, où ils appuient les Forces démocratiques syriennes [FDS] dans leurs opérations contre l’État islamique [EI ou Daesh]. Et les responsables qui assuraient encore récemment qu’il ne fallait pas baisser la garde face à l’organisation jihadiste tout en contrant l’influence iranienne dans la région ont donc mangé leur chapeau.
En tout cas, la décision du chef de la Maison Blanche conforte le président turc, Recep Tayyip Erdogan, dans sa volonté de lancer une opération militaires contre les milices kurdes syriennes [membres des FDS, ndlr] jusqu’alors soutenues par la coalition dirigée par les États-Unis. A-t-il été averti des intentions de M. Trump lors de l’échange téléphonique qu’il a eu avec lui le 14 décembre?
Quoi qu’il en soit, M. Erdogan a encore assuré, ce 20 décembre, que les milices kurdes seraient « anéanties » le moment venu. Et tout porte à croire que ce « moment » est proche… alors que les FDS s’emploient actuellement à repousser des contre-attaques de Daesh dans le secteur de Hajine, localité d’où les jihadistes avaient été pourtant chassés il y a quelques jours.
Mais d’après Reuters, qui cite des responsables militaires américains ayant requis l’anonymat, l’ordre de retrait signé par M. Trump concernerait aussi les opérations aériennes en Syrie.
« L’ordre du président Trump de retirer les troupes américaines de Syrie signifie également la fin de la campagne aérienne américaine contre l’État islamique dans ce pays », avance en effet l’agence de presse britannique.
La fin de ces opérations américaines, ont précisé ces responsables, sera liée au retrait des forces américaines présentes sur le terrain. Toutefois, ils n’ont pas précisé la date à laquelle cela se produira.
L’appui aérien donné aux FDS est crucial. En effet, Daesh a systématiquement lancé des contre-attaques quand les conditions météorologiques rendaient plus compliquées les opérations aériennes de la coalition. Cela a été le cas à la fin du mois d’octobre, comme ça l’est aussi pour la contre-offensive qu’il vient de lancer à Hajine.
La fin des opérations aériennes américaines en Syrie permettra aux jihadistes de se regrouper plus facilement [à moins que l’aviation russe les prenne pour cible ou que les autres partenaires de la coalition s’en charge]. Et elle aura aussi des conséquences sur la quantité de renseignements collectés.
De septembre à octobre, l’aviation américaine a largué 1.635 munitions sur des positions jihadistes, surtout en Syrie.
Par ailleurs, on ignore pour le moment si l’ordre de M. Trump concernera également les unités américaines d’artillerie déployées à la frontière irako-syrienne pour appuyer les FDS à Hajine.
Si elle ravit Vladimir Poutine, le président russe , la décision du chef de la Maison Blanche met Paris et Londres dans l’embarras, les responsables français et britanniques étant d’accord pour dire que le combat contre Daesh est loin d’être encore terminé. D’après le Quai d’Orsay, la France est en contact avec Washington sur le calendrier de retrait des forces américaines en Syrie.
« Les États partenaires de la coalition internationale et nous-mêmes sommes en conversation avec Washington sur le calendrier et les conditions de mise en œuvre de la décision de retrait des forces américaines engagées face à Daesh en Syrie, annoncée par le président des Etats-Unis », a affirmé le ministère français des Affaires étrangères dans un communiqué. « Dans les semaines qui viennent, la France sera attentive à ce que la sécurité de tous les partenaires des États-Unis soit assurée, y compris les Forces démocratiques syriennes », a-t-il ajouté.
« La protection des populations du nord-est de la Syrie et la stabilité de cette zone doivent être prises en compte par les Etats-Unis pour éviter tout nouveau drame humanitaire et tout retour des terroristes », a insisté le Quai d’Orsay. « La lutte contre la menace globale de Daesh se poursuit et s’inscrit dans la durée », a-t-il conclu.
En attenant, a indiqué le colonel Patrik Steiger, le porte-parole de l’État-major des armées [EMA], « la campagne militaire contre Daech continue » et « l’annonce du président américain n’a à ce stade aucune incidence sur la continuation de la participation française [Chammal, ndlr] à la campagne militaire contre Daesh au sein de la coalition. »