Pour la ministre néerlandaise de la Défense, les Pays-Bas sont en « guerre informatique » avec la Russie

Lors d’une émission diffusée par la chaîne de télévision publique NPO1, le 14 octobre, la ministre néerlandaise de la Défense, Ank Bijleveld, n’y est pas allée par quatre chemins en évoquant l’affaire des quatre agents du renseignement militaire russe [GRU], expulsés des Pays-Bas en avril dernier après avoir tenté une attaque informatique visant les systèmes du siège de l’Organisation pour l’Interdiction des Armes chimiques [OIAC], basée à La Haye.

Interrogée pour savoir si la situation entre les Pays-Bas et la Russie pouvait être qualifiée de « cyberguerre », Mme Bijleveld a répondu : « Oui, c’est le cas ». Et d’ajouter : « Des gens essaient d’interférer de diverses manières dans notre vie de tous les jours, d’influencer notre démocratie. » Aussi, a-t-elle expliqué, « nous devons nous débarrasser de la naïveté dans ce domaine et prendre des mesures » et « c’est pourquoi il était important de rendre publique la tentative de piratage des agents russes. »

Le 4 octobre, les autorités néerlandaises confirmèrent des informations publiées deux semaines plus tôt par la presse, selon lesquelles des agents russes avaient été repérés par le Militaire Inlichtingen- en Veiligheidsdienst [MIVD – renseignement militaire, ndlr] pendant qu’ils « essayaient d’effectuer une opération de piratage à distance rapprochée » de l’OIAC, qui travaillait alors sur l’affaire Skripal, du nom de cet ancien officier du GRU victime, avec sa fille, d’une tentative d’assassinat avec une substance chimique.

« Ce qui est arrivé est vraiment dangereux », a répété Mme Bijleveld, qui avait expliqué, il y a deux semaines, que le « gouvernement néerlandais jugeait extrêmement inquiétante l’implication de ces agents de renseignement. » D’où, d’ailleurs, la communication au sujet de cette affaire.

À Moscou, le chef de la diplomatie russe, Sergeï Lavrov, a parlé d’un « malentendu », affirmant que les agents du GRU expulsés étaient « voyage de routine » aux Pays-Bas, sans donner plus de précisions sur ce qu’il entendait par là.

« Ils ne se sont pas cachés lorsqu’ils se sont installés à l’hôtel, ni lorsqu’ils étaient à l’aéroport, ni lorsqu’ils se sont rendus à l’ambassade. Ils se sont fait arrêter sans explications. Cela avait l’air d’être un malentendu », a en effet affirmé M. Lavrov, le 8 octobre. Cette affaire montre un « mépris envers les mécanismes […] existants pour traiter de telles questions », a-t-il ajouté.

Quoi qu’il en soit, et outre l’expulsion de ces quatre membres du GRU, les services néerlandais seraient très impliqués contre les groupes russes de pirates informatiques.

Ainsi, en janvier, le quotidien De Volkskrant a révélé que le Service Général de Renseignement et de Sécurité néerlandais [Algemene Inlichtingen- en Veiligheidsdienst, AIVD] s’était intéressé dès 2014 au groupe Cozy Bear, soupçonné d’être de mèche avec le GRU. Et il aurait réussi à s’infiltrer dans les serveurs de ce dernier et à pirater les caméras de surveillance de ses locaux à Moscou. Ce qui lui aurait permis d’avertir Washington du piratage des systèmes informatiques du Parti démocrate lors de la campagne présidentielle de 2016.

Par ailleurs, Mme Bijleveld a affirmé que l’enveloppe budgétaire allouée par son ministère à la cyberdéfense et au renseignement allait être revue à la hausse. « Nous investissons davantage dans les services de renseignement afin de pouvoir voir ce qui se passe et prendre des mesures si nécessaire », a-t-elle dit.

Enfin, elle a confirmé avoir proposé de mettre des « cybersoldats » à la disposition de l’Otan. Cette proposition est « activement » examinée, a-t-elle assuré. Il s’agit « aussi de voir comment nous pouvons faire nous-mêmes les choses de manière offensive si nécessaire », a conclu Mme Bijleveld.

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