Verney-Carron est en lice pour le remplacement des fusils de précision FR-F2 de l’armée de Terre
« Quand l’État [sous-entendu, le ministère des Armées] désarme les PME françaises »… Tel est l’angle d’attaque choisi par France 2 pour lancer un reportage sur la politique d’approvisionnement des forces armées. Et de poser la question : « Le made in France ne fait-il plus recette pour l’armement militaire? », oubliant au passage que, si les grands programmes (avions de combat, navires de surface, sous-marin, blindés, etc…) sont conduits par de grands groupes industriels, ils font appel à des sous-traitants, dont de nombreuses PME hexagonales (400 pour Dassault Aviation, au titre du Rafale)…
En outre, le ministère des Armées travaille avec pas moins de 26.000 PME et ETI (Entreprises de taille intermédiaire), pour lesquels il ne cesse de faciliter l’accès à ses marchés. Tel est, en effet, l’objet du plan « Action PME », présenté par Florence Parly, la ministre des Armées, en mai dernier.
Pour autant, le sujet de France 2 faisait référence à un contrat relatif à des gilets pare-balles qui venait d’échapper à une PME parisienne au profit d’une entreprise irlandaise et à l’appel d’offres lancé pendant l’été par la Direction générale de l’armement [DGA] afin de remplacer les fusils de précision FR-F2 de l’armée de Terre.
Pour cette procédure, et afin de s’épargner de possibles déconvenues, la DGA a fixé des conditions visant à s’assurer que les soumissionnaires aient l’assise industrielle et financière pour livrer dans les délais 2.600 Fusils de précision semi-automatique [FPSA] de 7,62 mm, 1.800 lunettes à intensification de lumière, 1.000 dispositifs d’imagerie thermique et 6,3 millions de munitions 7,62 x 51 mm perforantes et de précision.
Ainsi, la DGA a précisé que, pour participer à cet appel d’offres, « le chiffre d’affaires annuel du dernier exercice connu ou en moyenne sur les trois derniers exercices connus devra être égal ou supérieur à 50 millions d’euros ».
Ce qui, au premier abord, exclut l’armurier français Verney-Carron, qui, ayant lancé une division « défense et sécurité« , a affiché un chiffre d’affaires de 13,6 millions d’euros lors du dernier exercice. Aussi, ses responsables n’ont pas manqué de critiquer cette disposition. « On déplore le fait qu’on nous mette des bâtons dans les roues », a affirmé Jean Verney-Carron, le président du directoire de cette entreprise, dans le reportage de France 2.
« Moi, je pense que de gros fabricants européens font probablement appel à des lobbyistes. Mais on peut tout trouver. De vraies sociétés de lobbying. Mais on pourrait aussi faire appel, comme ça se fait souvent dans le secteur de la sécurité, à d’anciens généraux à la retraite qui ont gardé un réseau et qui peuvent faire passer des informations », avait auparant estimé Guillaume Verney-Carron, le directeur général de l’armurier, sur les ondes de France Bleu Saint-Étienne Loire.
Dans le même temps, l’armurier, connu pour ses armes de chasse, a insisté sur le fait qu’il est aussi un « fournisseur historique de l’armée française ». Ainsi, a-t-il rappelé, « en 1882, Verney-Carron fournissait une mitrailleuse à barillet à l’armée française. Depuis cette date Verney-Carron à travaillé en tant que sous-traitant pour les arsenaux Français de Saint-Etienne, Tulle et Châtellerault, fournissant pièces détachées et composants jusqu’aux années 90 avec les tubes enveloppe du FAMAS. »
Cependant, la DGA n’a pas totalement fermé la porte à un industriel français pour cet appel d’offres, dans la mesure où la procédure autorise un éventuel soumissionnaire à s’associer avec d’autres « opérateurs économiques » pour atteindre le seuil des 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. Une possibilité exploitée par Verney-Carron, qui, selon Les Échos, a donc trouvé deux autres partenaires, dont Nammo [Nordic Ammunition Company] pour les munitions et l’allemand Hensoldt pour la partie optique, qui représenterait 40% de la valeur du contrat.
Ainsi, et alors que la date-limite de dépôts des offres est passée, Verney-Carron pourra présenter son fusil VCD-10, développé à partir de l’ArmaLite AR10 américain. Sont également en lice Humbert CTTS, filiale de l’italien Beretta, FN Herstal (Belgique) et l’allemand Heckler & Koch, qui fournit déjà les fusils HK-416F et HK-417, qui a déjà remplacé le FR-F2 dans certains régiments de l’armée de Terre.