Le quartier général de la Force conjointe du G5 Sahel quitte Sévaré pour Bamako
En juillet, l’Union européenne, par la voix de Federica Mogherini, la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a pris l’engagement de « soutenir » la reconstruction, à Sévaré [centre du Mali] du quatier général de la Force conjointe du G5 Sahel, attaqué quelques semaines plus tôt par des jihadistes du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans [GSIM].
Il est à espérer que le chantier n’ait pas encore commencé… En effet, le nouveau chef de cette force conjointe, le général mauritanien Hanena Ould Sidi, nommé justement après l’attaque de Sévaré, a décidé de transférer son quartier général à Bamako.
Cette information a subrepticement été glissée dans le dernier compte-rendu des opérations publié par l’État-major des armées [EMA], à Paris. Le général Ould Sidi « a décidé d’installer son PC à Bamako et a l’intention de reprendre les opérations dans les meilleurs délais. La force Barkhane continuera d’appuyer la force conjointe », y lit-on.
Selon une source citée par l’AFP, le général mauritanien s’est déjà installé dans la capitale malienne avec ses équipes. « En tant qu’organe de coordination, le siège de cette force doit se trouver là où les communications et les liaisons sont les meilleures », a-t-elle expliqué.
Cela étant, devant compter 7 bataillons (5.000 hommes) répartis selon trois fuseaux (Est, Centre, Ouest), la Force conjointe du G5 Sahel aurait dû être déclarée opérationnelle en mars dernier. Or, elle ne l’est toujours pas. Pour le moment, elle n’a réuni que 80% de ses effectifs et les financements qui lui ont été promis (420 millions d’euros) tardent à lui être versés.
À la tribune des Nations unies, le 27 septembre, le président malien, Ibrahim Boubacar Keita, qui entame son second mandat, a réitéré son « appel en faveur de la mobilisation effective et rapide des ressources promises par nos partenaires en vue de nous aider à réaliser, dans les delais convenus, tous les engagements contenus dans la feuille de route. »
De son côté, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a de nouveau réclamé un « mandat fort et un financement pérenne » pour la Force coinjointe du G5 Sahel et lancé, encore une fois, un appel à la communauté internationale pour soutenir le développement Sahel.
Les difficultés à obtenir les fonds promis ainsi que la réticence des États-Unis à mécanisme de financement qui passerait par les Nations unies trahit une certaine défiance à l’égard de la Force conjointe du G5 Sahel, qui souffrant de nombreuses lacunes capacitaires, peut sembler sous-dimensionnée pour intervenir dans un territoire aussi vaste que l’Europe.
« Le financement du G5 pose en outre la question de l’aptitude des pays membres à absorber des masses de liquidités, considérables à leur échelle, sans en subir les conséquences. Le budget initial du G5, s’il reste fixé à 423 millions d’euros pour la première année, correspond à environ une année du budget total des cinq armées réunies. Rien ne dit que cet afflux d’argent ne sera pas un accélérateur de la corruption qui a miné les armées des pays du G5 au cours des années passées, exacerbé les divisions au sein de celles-ci et entre les pays de la région, et attisé les manipulations parmi des élites politiques intéressées par la captation d’une partie de cette manne soudaine », avait ainsi souligné, en décembre 2017n un rapport de l’International Crisis Group.
En attendant, l’un des pays du G5 Sahel, le Burkina Faso en l’occurrence, voit l’activité jihadiste s’accentuer dans le nord de son territoire. Ce qui laisse craindre que d’autres pays puissent être à leur tour déstabilisés.
Photo : ECPAD