La mise au point du futur avion-ravitailleur de l’US Air Force finit par coûter cher à Boeing

En février 2011, après 10 ans d’un feuilleton à rebondissements, avec des appels d’offres contestés, annulés et relancés, le Pentagone annonçait finalement avoir choisi le KC-46 « Pegasus » de Boeing pour remplacer les avions ravitailleurs KC-135 de l’US Air Force, aux dépens du KC-45A, c’est à dire l’A-330 MRTT, proposé par Airbus [EADS à l’époque], en association avec Northrop-Grumman.

Sur le papier, le KC-45A d’Airbus et de Northrop Grumman avait pourtant toutes les chances de remporter la mise dans la mesure où il avait déjà été choisi lors d’un appel d’offres précédent (finalement annulé) et que le KC-46 « Pegasus », basé sur le B-767, était encore à mettre au point. Mais Boeing raffla la mise en cassant les prix, en proposant un rabais fort généreux auquel le Pentagone ne pouvait pas y être insensible.

Au total, le marché prévoyait la livraison de 179 avions ravitailleurs. Mais le contrat initial attribué à Boeing portait sur 18 KC-67, livrables d’ici la fin de l’année 2017. Seulement, l’US Air Force attend toujours son premier exemplaire… lequel devrait toutefois être livré à l’automne prochain,

En effet, le programme KC-67 rencontra très vite des problèmes. Et comme le Pentagone avait exclu de dépenser un dollar de plus par rapport à ce que prévoyait le contrat initial, signé à prix fixe (4,8 milliards,), Boeing dut se résoudre à mettre la main à la poche.

Quelques semaines à peine après l’annonce du choix en faveur du KC-46, le constructeur américain fut obligé de consentir une rallonge de 300 millions de dollars. Puis, un an plus tard, le Government Accountability Office (GAO), l’équivalent américain de la Cour des comptes, estima à 900 millions de dollars les surcoûts induits par les soucis de développement. Et il souligna un « risque non négligeable de non respect des délais. »

En 2014, Boeing fut une nouvelle fois contraint d’allouer 425 autres millions de dollars à ce programme, afin de revoir le câblage électrique du KC-46, qui ne répondait pas aux normes fixées par l’US Air Force. Résultat : le premier vol de ce nouvel avion ravitailleur fut retardé.

Puis, l’année suivante, le constructeur américain dut inscrire dans ses comptes une charge de 835 millions de dollars afin de remédier à un problème relatif au système de distribution du carburant du KC-46. Puis en avril 2016, et alors que les premiers essais de l’appareil s’étaient avérés concluants, Boeing remit la main à la poche pour sortir 243 millions de plus (avant impôts) pour lui permettre de respecter la dernière phase des tests de développement et financer la mise en production de son appareil.

Quant au délai de livraison, il ne put évidemment pas être tenu… D’où un nouvel accord avec l’US Air Force fixant à octobre 2018 l’arrivée du premier KC-46. Fin de l’histoire? Eh bien pas vraiment.

Le 25 juillet, Boeing a certes annoncé une hausse de 25,5% de son bénéfice net au second trimestre de cette année (soit 2,2 milliards de dollars). Mais cette « performance » aurait été encore meilleure s’il n’avait pas été obligé d’incrire deux charges d’un montant total de 426 millions de dollars pour couvrir une nouvelle hausse des coûts de son avion ravitailleur.

D’après les explications données par Boeing, ces coûts supplémentaires sont dus « à des changements effectués » sur le KC-46 lors des six derniers vols d’essais, ainsi qu’à des soucis « inattendus » rencontrés lors de la certificiation de l’appareil.

D’après certains analystes, Boeing aurait sciemment minoré les coûts de développements du KC-46 afin de proposer une offre plus compétitive que celle soumise par le couple EADS/Northrop Grumman.

Photo : Boeing

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