M. Trump annonce qu’il n’y aura plus d’exercices conjoints entre les forces américaines et sud-coréennes

Son grand-père et son père en avait rêvé, Kim Jong-Un l’a fait. Le 12 juin, à Singapour, le dirigeant nord-coréen a en effet rencontré un président américain, en l’occurrence Donald Trump, avec lequel il a pourtant échangé quelques noms d’oiseaux au cours de ces derniers mois. La tenue de ce sommet « historique » n’était pas acquise, le chef de la Maison Blanche ayant fait part de son intention de l’annuler, le 24 mai, avant de se raviser à nouveau par la suite.

Si Kim Jong-Un a pu rencontrer le président américain, c’est parce que son pays s’est doté de l’arme nucléaire et d’une partie de la panoplie nécessaire pour la mettre en oeuvre. Ce qui lui a valu une série de sanctions décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies. Sanctions cependant régulièrement contournées grâce à des transferts de marchandises et de pétrole en mer. « Il semble que des tankers nord-coréens aient régulièrement des rendez-vous avec d’autres tankers d’origine inconnue, puis reviennent en Corée du Nord après avoir été chargés » a ainsi relevé Florence Parly, la ministre française des Armées, lors du dernier Shangri-La Dialogue.

Quoi qu’il en soit, la rencontre entre Kim Jong-Un et Donald Trump aura duré cinq heures (dont 40 minutes en tête-à-tête). Un moment qualifié de « fantastique » par le président américain, jamais avare de superlatifs. Le chef nord-coréen, estimant avoir « tourné la page du passé » après avoir surmonté de « nombreux obstacles », y a vu un « bon prélude à la paix. »

À l’issue de ces discussions, les deux dirigeants ont signé une déclaration commune, dans laquelle M. Kim « a réaffirmé son engagement ferme et inébranlable en faveur d’une dénucléarisation complète de la péninsule coréenne. »

Seulement, aucun calendrier n’a été fixé pour arriver à cet objectif. Et le texte ne précise pas si ce processus doit être « vérifiable et irréversible », comme l’exigeaient pourtant les États-Unis avant ce sommet organisé à Singapour. Sur ce point, l’expérience du passé invite à la prudence.

Ainsi, en octobre 1994, Washington et Pyongyang signèrent un accord à Genève visant à empêcher la Corée du Nord de continuer à développer une arme nucléaire en échange d’une assistance économique et d’une reconnaissance politique. Quelques mois plus tôt, l’administration Clinton avait dit ne pas exclure une intervention militaire si les Nord-Coréens fabriquaient des armes nucléaires.

Puis, en 2005, à Pékin, Pyongyang prit une nouvelle fois l’engagement de renoncer à l’arme nucléaire en échange de la possibilité de continuer son programme nucléaire civil et de garanties sur sa sécurité. À la différence de celui de 1994, cet accord avait été trouvé dans le cadre de négociations à six (États-Unis, Chine, Russie, Japon et les deux Corées). Mais, un an plus tard, la Corée du Nord procéda à son premier essai d’une bombe nucléaire…

En échange de la dénucléarisation de la péninsule coréenne – qui prendra inévitablement du temps – le président Trump s’est formellement engagé dans la déclaration commune à donner des « garanties de sécurité » à la partie nord-coréenne.

Peu avant la tenue de ce sommet, Mike Pompeo, le chef de la diplomatie américaine, avait évoqué des « garanties de sécurité uniques, différentes » de celles jusqu’alors proposées. Il aura fallu attendre une conférence de presse donnée par M. Trump pour en savoir davantage.

Ainsi, l’une de ces garanties est la fin des manoeuvres militaires menées conjointement par les forces américaines et sud-coréennes. Le président Trump est allé jusqu’à qualifier ces exercices (ou « jeux de guerre ») « très provocateurs » à l’égard de la Corée du Nord. Leur fin permettrait aux États-Unis « d’économise énormément d’argent », a-t-il dit.

Pour rappel, chaque année, les forces américaines et sud-coréennes organisent plusieurs exercices majeurs, comme Foal Eagle, au niveau des états-majors, Key Resolve, qui mobilise plusieurs dizaines de milliers de soldats ou encore Vigilant Ace, qui a impliqué 230 avions en décembre dernier.

Pour autant, si M. Trump a répété son souhait de « ramener » les soldats américains « à la maison », il n’est pas question, pour le moment, d’un retrait militaire des États-Unis de Corée du Sud. « Cela ne fait pas partie de l’équation pour le moment. J’espère ça le sera finalement », a-t-il dit.

Par ailleurs, les sanctions internationales visant la Corée du Nord seront, pour le moment, maintenues. « Ça prend un temps très long pour obtenir la dénucléarisation. Mais quand vous commencez le processus, déjà, vous ne pouvez plus utiliser [les armes]. Les sanctions seront levées quand on aura la certitude que les armes nucléaires ne seront plus effectives », a expliqué M. Trump.

En signe de bonne volonté, Kim Jong-Un s’est engagé à détruire un important site d’essais pour les moteurs de missiles. D’après M. Trump, le démantèlement aurait même déjà commencé.

A priori, les deux hommes devraient à nouveau se rencontrer prochainement, Kim Jong-Un ayant été invité par Donald Trump à la Maison Blanche. Quant au président américain, il n’a pas exclu de se rendre à Pyongyang « au moment approprié ».

Maintenant, reste à savoir si M. Trump risque de retirer sa signature de cette déclaration conjointe, comme il l’a fait après le dernier sommet du G7, après un froncement de sourcils de Justin Trudeau, le Premier ministre canadien.

Photo : Capture d’écran

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