L’US PACOM devient le commandement américain pour la région Indo-Pacifique

Pendant longtemps, il a été question de la zone « Asie-Pacifique » pour désigner une région allant de l’Australie au Japon, en passant par la Chine et le Vietnam. Or, depuis maintenant quelques années, l’expression « Indo-Pacifique » revient dans les discours et les rapports officiels.

Un rapport du Sénat, relatif à l’Australie et publié en décembre 2016, avait ainsi évoqué un « arc indo-pacifique ». Cette expression a ensuite été reprise par la Revue stratégique d’octobre 2017. Même chose de l’autre côté de l’Atlantique, où la stratégie nationale américaine, récemment dévoilée en janvier dernier, parle également de région « indo-pacifique ».

Plusieurs raisons peuvent être avancées pour expliquer cette évolution. La première est que l’Asie du Sud-Est est dépendante du Moyen-Orient pour ce qui concerne ses approvisionnements énergétiques, lesquels transitent par l’océan Indien. La seconde est liée : cette zone est essentielle pour permettre aux pays asiatiques d’exporter leurs produits manufacturés vers l’Europe, voire l’Amérique du Nord. D’où le déploiement de la marine chinoise pour des missions anti-piraterie dans le golfe d’Aden et l’installation d’une base militaire à Djibouti.

Un troisième raison est le projet de « nouvelles routes de la soie » [Belt & Road Initiative], qui vise à permettre à la Chine d’accroître son influence en Asie Centrale tout en favorisant ses échanges commerciaux avec l’Europe et l’Afrique. Pour cela, Pékin investit des sommes considérables [1.000 milliards de dollars] pour financer des infrastructures, comme celles du port pakistanais de Gwadar.

En outre, la Chine applique une stratégie dite du « collier de perles », qui consiste à développer pour sa marine des points d’appui dans les pays riverains de l’océan Indien, avec l’idée « d’endiguer » l’Inde, qui se pose en rivale.

Dans le même temps, New Delhi cherche également à connecter son économie aux pays d’Asie du Sud-Est, dans le cadre de la politique « Look East policy », devenue « Act East » au début des années 2010.

Aussi, pour prendre en compte ses évolutions, le commandement militaire américain pour le Pacifique [US PACOM] va changer d’appellation pour devenir l’US Indo-Pacific Command.

L’annonce en a été faite le 30 mai par James Mattis, le chef du Pentagone, lors d’une cérémonie organisée à Pearl Harbour [Hawaï], à l’occasion d’une passation de commandement à la tête, justement, de l’US PACOM.

« En reconnaissance de la connexion croissante entre les océans Pacifique et Indien, nous changeons aujourd’hui le nom du commandement américain pour le Pacifique en commandement américain pour l’Indo-Pacifique », a expliqué M. Mattis. « Depuis des décennies, ce commandement s’est adapté à de nombreuses reprises aux circonstances et aujourd’hui, nous poursuivons sur cette lancée », a-t-il ajouté.

Pour autant, la zone de responsabilité de l’ex-PACOM, qui va de l’Inde à Hawaï, ne devrait pas être étendue, ce qui fait ce que changement d’appellation est plus symbolique qu’autre chose.

En attendant, l’une des priorités des États-Unis reste la mer de Chine méridionale, revendiquée dans sa quasi-totalité par Pékin alors que d’autres pays riverains y ont également des prétentions territoriales.

Cette région est stratégique non seulement en raison des ressources en hydrocarbures qu’elle recèle mais aussi et surtout parce qu’elle est le carrefour incontournable de plusieurs voies maritimes commerciales. La contrôler permettrait, par exemple, de perturber l’approvisionnement énergétique du Japon, pays avec lequel la Chine a aussi des différends territoriaux. Or, Pékin y installe des capacités militaires, quitte parfois à s’approprier des îlots qui ne lui appartiennent pas, comme le récif de Scarborough, qui était sous la souveraineté des Philippines jusqu’en 2012.

« Les États-Unis continueront à s’opposer aux revendications territoriales de Pékin en mer de Chine méridionale », avait affirmé M. Mattis, dans l’avion qui l’emmenait à Hawaï, alors qu’il était interrogé sur des protestions chinoises relatives à la présence du destroyer USS Higgins et du croiseur USS Antietam dans les environs de l’archipel des Paracels.

« Mais ce sont des eaux internationales et de nombreux pays veulent pouvoir bénéficier de la liberté de navigation, donc nous continuerons » à manifester notre présence », avait ensuite continué M. Mattis. « Nous nous donnons beaucoup de mal pour coopérer avec tous les pays du Pacifique, ce que nous faisons partout dans le monde. Mais nous nous opposerons à ce que nous considérons comme contraire aux lois internationales », avait-il poursuivi.

Et le chef du Pentagone d’insister : « Mais il faut que les inquiétudes soient exprimées non seulement par le gouvernement américain mais aussi par les autres pays concernés, qui s’inquiètent beaucoup de la militarisation des îles en mer de Chine méridionale. »

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