Mer de Chine : Le Vietnam demande à Pékin de retirer ses missiles d’îlots contestés

La semaine passée, l’on apprenait que Pékin venait d’installer des missiles anti-navires YJ-12 et des systèmes de défense aérienne HQ-9 sur trois îlots de l’archipel des Spratleys, situé en mer de Chine méridionale.

Ainsi, malgré un jugement rendu par la Cour pénale d’arbitrage de La Laye, selon lequel les prétentions chinoises dans cette partie du monde ne reposent sur « aucun fondement juridique », Pékin continue sa politique du fait accompli en installant des capacités d’interdiction et de déni d’accès sur plusieurs récifs et îlots de mer de la Chine méridionale, qui, en plus de receler des réserves importantes d’hydrocarbures et d’autres ressources naturelles, est un carrefour essentiel pour le commerce maritime mondial.

Seulement, les pays riverains ont également des prétentions dans cette région, revendiquée dans sa quasi-totalité par la Chine. Les Philippines en font partie. D’ailleurs, elles ont été à l’origine de la saisie de la CPA de La Haye, après avoir perdu le contrôle, au profit de Pékin, du récif de Scaroborough.

Cela étant, les relations entre Pékin et Manille connurent un nette amélioration à la faveur de l’élection de Rodrigo Duterte, le président philippin, en juin 2016.

Ce dernier entama en effet une politique de rapprochement avec la Chine, aux dépens des États-Unis, notamment à cause de ses rapports désastreux avec Barack Obama, qui était alors à la Maison Blanche. Et cela se traduisit par une remise en cause des liens militaires entre Manille et Washington, avec la disparition annoncée des exercices conjoints entre les forces armées des deux pays.

« L’on comprend que le président Duterte, dont le pays se préparait à assurer la présidence de l’ASEAN pour 2017, ait souhaité projeter une stature d’interlocuteur indépendant tout en mettant son pays à l’abri d’éventuelles mesures de rétorsions économiques chinoises », explique une note de recherche l’IRSEM [.pdf], publiée en juillet dernier.

Cependant, l’attitude du président Philippin a depuis évolué. En avril 2017, M. Duterte a en effet ordonné à ses forces armées de bâtir des infrastructures et d’occuper certains îlot jusqu’alors inhabités de l’archipel Spratleys que Manille revendique comme étant des parties de son territoire. Et d’expliquer, à l’époque : « Il semble que tout le monde aille se servir sur les îles là-bas, alors nous ferions mieux d’aller habiter sur celles qui restent vacantes. […] Au moins, allons récupérer maintenant ce qui nous appartient, et faisons savoir clairement que c’est à nous. »

Autre signe de ce revirement : l’ampleur des exercices militaires annuels « Balikatan », menés conjointement avec les forces américaines. En 2017, ces manoeuvres avaient mobilisé 5.400 militaires, soit 2 fois mois qu’à l’accoutumée. Cette année, sans retrouver leur niveau d’antant, elles ont concerné plus de 8.000 personnels. Leur objet a été de simuler une opération de débarquement sur une île de mer de Chine méridionale.

« Nous sommes une Nation insulaire, ce qui explique qu’il nous faut améliorer nos capacités amphibies », a expliqué le général philippin Emmanuel Salamat.

Dans le même temps, le Vietnam, qui affirme aussi avoir des droits en mer de Chine méridionale, a élevé le ton contre l’installation de missiles chinois sur trois îlots de l’archipel Spratleys, en demandant à Pékin de les retirer.

« Le Vietnam est profondément préoccupé […] par toutes les activités de militarisation, y compris l’installation de missiles sur l’archipel de Truong Sa [Spratleys, ndlr] », a affirmé, le 9 mai, Lê Thi Thu Hang, la porte-parole du ministère vietnamien des Affaires étrangères.

Cela « porte atteinte à la souveraineté [du Vietnam] sur les îles », va « à l’encontre de l’Accord sur les principes fondamentaux guidant le règlement des problèmes maritimes entre le Vietnam et la Chine », « viole la Déclaration sur la conduite des parties en Mer Orientale (DOC) entre l’ASEAN et la Chine », « exacerbe les tensions », « provoque l’instabilité dans la région » et « nuit « aux efforts des pays dans les négociations d’un Code de conduite en Mer Orientale », a fait valoir la porte-parole de la diplomatie vietnamienne.

« Le Vietnam réaffirme disposer preuves historiques et fondements juridiques suffisants pour affirmer sa souveraineté territoriale sur les deux archipels de Hoàng Sa (Paracel) et Truong Sa conformément au droit international », a-t-elle encore fait valoir.

Selon la note de recherche de l’IRSEM, déjà citée, le « Vietnam reste l’acteur le plus résolu, mais aussi le plus isolé pour faire valoir ses revendications face à Pékin. » D’où, d’ailleurs, son rapprochement avec les États-Unis, symbolisé par la visite récente du porte-avions USS Carl Vinson au port de Da Nang. Une première depuis la fin de la Guerre du Vietnam, il y a 43 ans.

Cependant, poursuit la note, « le pragmatisme domine au sein de la relation sino-vietnamienne » étant donné qu’Hanoï a besoin d’investissements étrangers pour soutenir sa croissance économique. « L’alternance entre cycle de tensions, négociations et avancées diplomatiques caractérise l’histoire des deux pays, y compris dans le domaine maritime. Si on peut citer l’Accord sur le golfe du Tonkin signé en 2000, on notera également la multiplication d’incidents violents à la mer depuis 2012 au détriment des pêcheurs vietnamiens », est-il encore expliqué dans ce document.

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