Édouard Philippe : « Si l’Europe ne s’intéresse pas à la guerre, la guerre ne manquera pas de s’intéresser à l’Europe »
Invité à s’exprimer, lors de la Conférence sur la sécurité de Munich, ce 17 février, le Premier ministre français, Édouard Philippe a appelé les pays membres de l’Union européenne à s’engager davantage dans les opérations militaires.
« L’Europe se retrouve face à elle-même. Et, au pied du mur », a ainsi estimé le Premier ministre. « Disons les choses franchement: si l’Europe de la Défense ne s’accompagne pas d’un engagement opérationnel plus important des Etats membres, elle demeurera longtemps un sujet de colloque », a-t-il continué, avant de rappeler qie les forces françaises sont « engagées sur un très grand nombre de fronts où elles paient le prix du sang », comme au Sahel et au Levant.
« Si l’Europe ne s’intéresse pas à la guerre, la guerre, elle, ne manquera pas de s’intéresser à l’Europe », a ensuite lancé M. Philippe, en paraphrasant Trotski, dont il n’est pas « adepte fervent » de ses théories.
Aussi, et comme l’avait fait, la veille, Florence Parly, la ministre des Armées, M. Philippe a plaidé en faveur de l’Initiative européenne d’intervention, qui, proposée par le président Macron, vise à « rapprocher les travaux des armées des Etats les plus engagés. »
« Les rapprocher pour qu’au début de la prochaine décennie, l’Europe dispose d’une force d’intervention commune, d’un budget de défense commun et d’une doctrine commune », a explique le Premier ministre. « On ne construira pas la défense européenne par de nouvelles structures » mais « en agissant ensemble (…) aussi et avant tout sur les théâtres d’opération », a-t-il poursuivi.
Et cela s’adresse aussi au Royaume-Uni, qui va quitter l’Union européenne. « Malgré le Brexit, nous comptons sur la communauté d’intérêts qui nous unit pour que le lien étroit noué entre nos deux pays soit maintenu et même renforcé », a avancé M. Philippe.
Concernant cette Initiative européenne d’intervention, Mme Parly a expliqué qu’il « s’agit de faire émerger une culture stratégique commune parmi les Européens », afin que « les plus désireux et les plus capables d’intervenir en opération soient prêts, le jour où ils devront le faire. »
« Partager notre appréciation des situations. Développer une même compréhension des crises. Une même analyse des menaces. Un même sentiment d’urgence. Un même plan d’action. Des réflexes communs. Des outils partagés. C’est un gros travail à mener », a estimé la ministre française.
« Cette capacité à intervenir en commun, elle est parfaitement cohérente avec la Coopération Structurée Permanente européenne, puisqu’elle en épouse d’une certaine manière la philosophie. Elle est aussi parfaitement cohérente avec l’Otan – où la réalité a toujours été que certains pays étaient, par choix, plus intégrés et plus agissants que d’autres », a encore fait valoir Mme Parly.
Cette Initiative européenne d’intervention doit aussi permettre aux Européens de faire face aux menaces dans leur voisinage immédiat « y compris lorsque les États-Unis ou l’Alliance souhaiteront être moins impliqués », a continé Florence Parly. Ce qui suppose une « autonomie stratégique », c’est à dire « une capacité à intervenir sans obliger les États-Unis à venir à notre chevet, sans qu’ils détournent leurs moyens ISR ou leurs ravitailleurs d’autres missions, ailleurs. »
Enfin, la ministre des Armées a précisé que cette Initiative ne dépendrait « ni de l’UE, ni de l’Otan », même si les « capacités et les habitudes développées dans ce cadre profiteront bien aux deux organisations. »