La commande de 2.500 fusils d’assaut pour la police de la République serbe de Bosnie préoccupe Sarajevo

Depuis les accords de Dayton (1995), la Bosnie-Herzégovine comprend deux entités autonomes : la fédération croato-bosniaque et la Republika Srpska (ou République serbe de Bosnie). En 2005, un premier pas a été fait vers l’unification avec le regroupement de leurs forces armées respectives au sein d’une même structure. Il s’agissait d’une étape importante en vue d’une éventuelle adhésion à l’Otan.

Seulement, les institutions communes à ces deux entités, déjà faibles, sont de moins en moins bien respectées. Et la République serbe de Bosnie, présidée par Milorad Dodik, par ailleurs désormais proche de Vladimir Poutine, le président russe, souffle le chaud et le froid sur ses velléités d’indépendance. Cela a encore été le cas en janvier.

« Notre but est le plus haut degré d’indépendance possible pour la Republika Srpska. Nous nous dirigeons dans cette direction, c’est un objectif politique légitime », a en effet déclaré Milorad Dodik, lors d’un entretien donné à la chaîne de télévision d’État serbe RTS. « Nous avons besoin de lutter pour préserver les droits que nous avons acquis », a-t-il ajouté, alors qu’il avait estimé, par le passé, que la Bosnie était un « concept ratée » et un « lieu que personne ne désire. »

Puis, lors des commémorations de la « fête nationale », M. Dodik a affirmé que « le peupe serbe avait deux États : la République de Serbie et la Republika Srpska. » Toutefois, a-t-il nuancé, « on ne traite pas la question d’indépendance comme si on avait l’intention de prendre cette décision aujourd’hui. »

Qui plus est, la Russie, qui cherche à empêcher l’adhésion de Sarajevo à l’Otan et à l’Union européenne (la Bosnie-Herzégovine a officiellement déposé sa candidature en février 2016), a accru son influence auprès de la Republika Srpska.

Récemment, M. Dodik a été photographié avec des membres des « Loups de la nuit », un groupe russe de motards étroitement lié au Kremlin et objet de sanctions américaines pour son rôle paramilitaire dans le sud-est de l’Ukraine et en Crimée. Dans le même temps, une autre milice, appelée « Honneur serbe » et entraînée par des « mercenaires » russes, a fait son apparition dans les rues de Banja Luka.

C’est dans ce contexte que M. Dodik a confirmé, le 12 février, une commande de 2.500 fusils auprès de l’armurier serbe Zastava. Selon lui, cet achat vise à « moderniser la police » de la Republika Srpska et de « renforcer son rôle ». « Pendant 20 ans, nous n’avions pas le droit d’équiper la police, maintenant nous avons décidé de le faire », a-t-il dit.

En outre, M. Dodik a démenti l’existence d’une unité paramilitaire qui lui serait inféodée. Selon lui, cette « histoire » n’aurait pour but que de « détourner l’attention des problèmes sécuritaires fondamentaux », dont « présence de combattants jihadistes en Bosnie. »

Quoi qu’il en soit, ce réarmement (présumé) des policiers serbes de Bosnie ne manque pas d’inquiéter. « Est-ce que c’est pour la police spéciale? Si c’est le cas, c’est beaucoup trop, c’est énorme », a estimé Aljosa Campara, ministre de l’Intérieur de la fédération croato-bosniaque.

Le Haut Représentant international en Bosnie-Herzégovine, Valentin Inzko, qui doit rendre compte de la sitation au Conseil de sécurité des Nations unies tous les semestres, s’est ému de cette livraison de fusils, prévue en mars. « Je voudrais que le pays ait le moins d’armes possible. Si un camp obtient ce type d’armes, alors l’autre camp le voudra aussi », a-t-il dit.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]