Pour le président Macron, le déploiement de la Force conjointe du G5 Sahel ne va pas assez vite

Fin octobre, la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S) a mené sa première opération, appelée Haw Bi, dans la région dite des « Trois frontières », c’est à dire aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso.

Si des lacunes ont ainsi été révélées, notamment au niveau des transmissions, l’État-major des armées (EMA) s’était félicité de ce premier engagement, qui mobilisa 750 soldats maliens, nigériens et burkinabè, appuyés par la force française Barkhane.

« Le premier objectif a été atteint avec la capacité à monter une opération coordonnée multinationale en peu de temps » et « il constitue un succès en soi dans la mesure où il y a quatre mois, au moment du sommet de Bamako […], les postes de
commandement de Niamey et de Sévaré n’existaient pas et la Force Conjointe ne disposait d’aucune unité », avait ainsi expliqué l’EMA, dans son point de situation des opérations du 9 novembre.

Seulement, pour le président Macron, qui se trouve actuellement à Ouagadougou [Burkina Faso], le déploiement de cette force du G5 Sahel ne va pas assez vite.

« Il faut qu’on puisse passer au-delà des premières opérations (…) à un déploiement plein et entier particulièrement sur le fuseau médian », a affirmé le président Macron, ce 28 novembre, lors d’une conférence commune avec Roch Marc Christian, son homologue burkinabé.

« Je considère que ça n’avance pas assez vite. […] Il faut déployer beaucoup plus vite cette force du G5 Sahel » et « il est indispensable que nous arrivions à gagner cette guerre le plus vite possible », a poursuivi le président Macron, qui se pose en « maître des horloges ».

Sauf que, pour aller vite, encore faut-il en avoir les moyens. Or, le budget de fonctionnement de la FC-G5S n’est pas encore bouclé. Sans le sera-t-il, après une conférence des donateurs qui se tenir en décembre prochain, à Bruxelles. En outre, la France n’a commencé à livrer des équipements militaires aux armées concernées qu’en octobre… Pour rappel, cette force doit compter, à terme, 5.000 soldats, fournis par le Mali, le Niger, la Mauritanie, le Burkina Faso et le Tchad. Il est prévu qu’elle soit pleinement opérationnelle d’ici le printemps prochain.

Au-delà de ces aspects financiers, la FC-G5S aura des lacunes capacitaires importantes, que soit en matière de logistique, d’appui aérien ou encore de renseignement. Un soutien de Barkhane lui sera ainsi nécessaire.

Aussi, comme le souligne, dans son livre « Servir », le général Pierre de Villiers, l’ancien chef d’état-major des armées (CEMA), « il est impossible aujourd’hui de prévoir la fin de l’opération Barkhane et le désengagement de nos troupes dans la bande sahélo-saharienne. »

Et l’ex-CEMA d’ajouter : « La concomitance de ces déploiements qui s’installent dans la durée engendre, d’ores et déjà, un phénomène d’usure des ressources humaines et matérielles. Cette durée s’accomode mal du rétrécissement du temps […] souvent sous la pression médiatique. Le temps politique exige des résultats immédiats, quand la dissipation de la haine dans les populations nécessite que le temps fasse son oeuvre. »

Et tant que les groupes jihadistes, qui jouent au chat et à la souris dans une région s’étendant sur 4.000 km sur une profondeur de 1.000 km, disposeront de zones de repli, comme en Libye, alors il est illusion de « gagner cette guerre le plus rapidement possible » sans perdre la paix.

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