Syrie : L’État islamique dit avoir capturé deux soldats russes à Deir ez-Zor

Faut-il toujours prendre les revendications de l’État islamique (EI ou Daesh) pour argent comptant? Si, jusqu’à la mort de Wa’il Adil Hasan Salman al-Fayad, le « ministre de l’information » de l’organisation jihadiste, les communiqués relayés par Amaq, son agence de propagande, étaient fiables, ce n’est plus tout à fait le cas actuellement.

Ainsi, en juin dernier, l’EI avait revendiqué une attaque commise contre un casino à Manille en diffusant deux communiqués, dont l’un était censé révéler le nom de guerre de l’asaillant. Sauf que, selon la police philippine, ce dernier n’était nullement un « soldat du califat » mais un joueur invétéré lourdement endetté.

Ce qui rappelle, d’ailleurs, le cas de Stephen Paddock, l’auteur de la fusillade du 2 octobre, à Las Vegas (59 tués), le 2 octobre. D’après les enquêteurs, rien ne relie ce retraité aux revenus très confortables à l’EI, qui a pourtant revendiqué cette attaque en affirmant que le tireur s’était converti à l’islam sous le nom d' »Abu Abd Abdulbar al-Ameriki. » Les investigations en cours diront ce qu’il en est vraiment.

En France, l’attaque qui a coûté la vie à deux jeunes femmes à Marseille a rapidement été revendiquée par l’EI. Si le communiqué d’Amaq a été accueilli avec prudence, l’enquête en cours a permis d’établir que l’assassin, Ahmed Hanachi (29 ans), avait consulté de la propagande jihadiste (notammant des chants religieux, les « nasheed ») via son téléphone portable et effectué récemment plusieurs déplacements en Europe.

Aussi, à la lumière de ces éléments, que penser des dernières affirmations d’Amaq, selon lesquelles deux soldats russes auraient été capturés par l’EI dans les environs de la ville de Deir ez-Zor? Cette fois, l’agence de propagande n’a pas diffusé un texte mais une vidéo de 42 secondes, datée du 3 octobre. Les images montrent deux hommes vêtus d’une tunique grise. L’un a un oeil tuméfié et l’autre, crâne rasé et portant la barbe, semble sorti d’un roman de Nicolas Gogol.

Dans la vidéo, seul l’homme barbu s’est exprimé, en russe, pour donner sa date de naissance et le nom de son village. « J’ai été fait prisonnier lors d’une contre-offensive de l’État islamique », a-t-il dit. L’EI a également donné les mêmes renseignements concernant son second prisonnier. Pourquoi ce dernier n’a-t-il pas pu parler comme a pu le faire son compagnon d’infortune?

La contre-offensive évoquée dans la vidéo pourrait être celle tentée le 30 septembre par les jihadistes, sur l’axe reliant Palmyre à Deir ez-Zor, au niveau de la localité d’Ash Sholah.

Quoi qu’il en soit, le ministère russe de la Défense a démenti que des soldats russes aient été capturés, rapporte l’agence de presse Interfax. Ce qui ne serait pas faux si ces deux prisonniers ne sont pas des militaires engagés (il peuvent être les salariés d’une société militaire privée, par exemple).

Ce qui semble être effectivement le cas. D’après la presse russe, l’un des prisonniers serait Roman Zabolotniy (à gauche sur la photo), un volontaire décrit comme étant un « humanitaire », déjà vu dans le Donbass [sud-est de l’Ukraine], et en ex-Yougoslavie. Il appartiendrait à l’Organisation paramilitaire des cosaques russes. Le second serait Grigory Turcanu (ou Tsourkanou), est un ancien des troupes aéroportés, membre de l’association d’anciens combattants « Fraternité des combats« , qui mène des actions humanitaires en Syrie. Il aurait déjà fait plusieurs séjours en Syrie (dont au moins un en février 2015) au titre d’employé de la société militaire privée « Wagner ».

Quoi qu’il en soit, après la diffusion de ces détails au sujet des deux captifs, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré que Moscou continuera « à vérifier les informations relatives à la captivité présumée de citoyens russes. »

MàJ : Précisions sur le passé des deux ressortissants russes.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]