Général Lanata : « L’armée de l’Air fait face à des fragilités qui affectent l’ensemble de son système de combat »

L’armée de l’Air est à l’os. Tel est le message qu’a fait passer son chef d’état-major, le général André Lanata (CEMAA), aux députés de la commission de la Défense, en leur rappelant que leur rôle « dépasse celui de la reconnaissance » puisqu’il leur « appartient aussi de décider du maintien à niveau des capacités […] en donnant notamment aux aviateurs les moyens indispensables à la réussite des missions qui leur sont confiées. »

Et il a été beaucoup question des moyens lors de l’audition du CEMAA par les députés. Ainsi, contrainte budgétaire oblige, au cours des 10 dernières années, l’armée de l’Air a perdu 18.400 postes, fermé 17 bases aériennes, dont celle, emblématique, de Dijon, et divisé par deux le nombre de ses commandements ainsi que le format de l’aviation de chasse.

Pour maintenir ses capacités, l’armée de l’Air a dû se transformer radicalement tout en continuant à honorer des engagements sans cesse plus importants. Ce qui fait que son contrat opérationnel, tel qu’il avait été défini par les Livres blancs sur la Défense de 2008 et de 2013, est aujourd’hui largement dépassé alors que, rappelons-le, ses moyens ont été drastiquement réduits et que les opérations tendent à se « durcir ».

Pour « faire face » (*), l’armée de l’Air ne cesse donc de se réorganiser et de se transformer, en adaptant sons système de commandement et de contrôle, en revoyant la formation de ses équipages [programme FOMEDEC pour « formation modernisée et d’entraînement différencié des équipages de chasse », ndlr], en optimisant sa logistique, en favorisant l’innovation [avec l’Air Warfare Center de Mont-de-Marsan, ndlr], en lançant le projet de Smart Base, en développant ses partenariats internationaux, scientifiques et industriels ou encore en cherchant à adapter en permanence le maintien en condition opérationnelle (MCO) de ses aéronefs afin pallier aux conséquences du rythme opérationnel intense auquel ils sont soumis.

Seulement, et ce n’est propre à l’armée de l’Air (l’armée de Terre et la Marine nationale connaissent une situation identique), il arrive un moment où il devient très compliqué d’aller plus loin, surtout quand une Loi de programmation militaire est taillée « au plus juste ».

« Aujourd’hui, ces efforts ne suffisent plus – je vous le dis car j’en ai fait le constat », a lancé le général Lanata à l’adresse des députés. « En dépit de considérables efforts d’adaptation, l’armée de l’air fait face à des fragilités qui affectent l’ensemble de son système de combat : déficit en personnels, lacunes capacitaires, vieillissement des parcs d’aéronefs, faiblesse des stocks de rechanges ou de munitions, équipements de mission en nombre insuffisant », a-t-il expliqué.

D’autant plus qu’il faut « durer ». « La situation actuelle est claire : nous sommes engagés sur trois théâtres d’opérations extérieures alors que les contrats opérationnels n’en prévoient qu’un, engagés à partir de 3 bases aériennes projetées au lieu d’une, avec 20 avions de combat au lieu de 12 », a rappelé le général Lanata. Et le tout avec une « intensité d’engagement trois à quatre fois supérieure à la norme d’activité annuelle pour les avions de chasse. »

Et cela n’est pas sans conséquences sur équipements, bien sûr, mais aussi et surtout sur « la condition des personnels et le moral. » Et le général Lanata de résumer : « En un mot, nous grignotons progressivement nos capacités opérationnelles, et le dispositif s’use. Cela ne se voit pas immédiatement, mais je n’ai aucun doute sur les conséquences à court terme du phénomène que je vous décris. »

« Voilà pourquoi la charge opérationnelle actuelle nécessite d’augmenter les moyens », a continué le CEMAA. D’abord pour « réduire les lacunes capacitaires, qui freinent nos opérations, et redonner […] une ‘épaisseur’ suffisante à notre dispositif pour être capables de durer ». Ensuite, pour « ajuster nos formats à la réalité des engagements constatés ou décidés », en fonction des choix qui seront faits.

(*) Devise du capitaine Georges Guynemer

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