Coupes budgétaires : Le président de la commission de la Défense critique la méthode de Bercy

Le président de la commission « Défense », à l’Assemblée nationale, Jean-Jacques Bridey, se trouve dans une position délicate. Soutien du président Macron, qu’il a conseillé sur les questions militaires durant la campagne électorale, il sait très bien les conséquences qu’aura l’effort de 850 millions d’euros demandé aux Armées au titre de la maîtrise du déficit public. Et pour cause : il a été le rapporteur pour avis du programme 146 « Équipements des forces ».

D’ailleurs, les propos « fleuris » tenus devant les députés de la commission qu’il préside par le général Pierre de Villiers, désormais ancien chef d’état-major des armées (CEMA), au sujet de ces coupes budgétaires n’étaient « pas loin » de résumer sa pensée. C’est en effet ce qu’il a dit sur les ondes de France Inter, ce 20 juillet.

Mais M. Bridey a surtout concentré ses critiques sur la méthode du ministère de l’Action et des Comptes publics pour annoncer l’effort budgétaire demandé aux armées.

« Au-delà de cette annonce de coupe budgétaire de 850 millions, il y avait surtout la méthode. On l’a appris en lisant le Parisien, par une déclaration du ministre des Comptes publics [Gérald Darmanin, ndlr], sans aucune autre information alors même que le conseil de défense restreint […] se réunissait » le lendemain, a-t-il déploré.

« Donc, ce sont, par rapport aux méthodes employées par le ministère des Comptes publics […] qu’il y a eu cette réaction du général de Villiers. En aucun cas ce n’était une remise en cause de l’autorité, ni des choix du président de la République, comme j’ai pu le dire directement à Emmanuel Macron », a expliqué M. Bridey.

Pourtant, dans le communiqué annonçant sa démission, le général de Villiers a précisé que, « dans les circonstances actuelles », il considérait « ne plus être en mesure d’assurer la pérennité du modèle d’armée » nécessaire « pour garantir la protection de la France et des Français, aujourd’hui et demain, et soutenir les ambitions de notre pays. »

Par ailleurs, M. Bridey a tenté d’expliquer que les propos tenus parle président Macron lors de la traditionnelle réception donnée à l’Hôtel de Brienne avant le défilé du 14-Juillet ne visaient pas le général de Villiers en particulier.

Le président « n’a pas sermonné le général de Villiers. Il a rappelé qu’il était le chef des Armées » [mais avait-il besoin de rappeler cette évidence?, ndlr], que « ses engagements seraient tenus » et qu’il « n’avait besoin ni de conseils, ni de pressions des uns ou des autres », a estimé le député. « Quand le chef de l’État a rappelé sa décision d’augmenter les crédits alloués à nos armées à partir de 2018 jusqu’en 2025 pour atteindre les 2% [du PIB], il s’adressait aussi bien aux armées qu’à Bercy », a-t-il ajouté. Seulement, on n’a pas eu l’impression que les propos présidentiels aient suscité quelques vagues du côté de la direction du Budget…

Cela étant, s’il ne remet donc pas fondamentalement en cause les coupes budgétaires qu’il est prévu d’appliquer aux armées (il faut respecter les engagements européens, a-t-il estimé), M. Bridey a dit partager « partiellement » le point de vue du général de Villiers sur les moyens nécessaires aux militaires pour assurer leurs missions. « Aujourd’hui, nous avons un budget qui est ‘ric-rac’ pour employer une formule usuelle », a-t-il admis. « 2017 va ête très dure. Mais je rappellerai que si nos matériels sont usés, si nos avions ont 50 ans, nos véhicules blindés ont 40 ans, c’est parce que les décisions n’ont pas été prises il y a 10 ou 15 ans et que le budget de l’armée a toujours été une variable d’ajustement du budget de la Nation », a-t-il observé.

En attendant, ces coupes dans le budget des armées font douter les députés du groupe des « constructifs » LR/UDI/Indépendants. « La décision du gouvernement de couper 850 millions d’euros dans le budget de la défense nationale vient d’entraîner la démission du chef d’état-major des armées. Le gouvernement doit revenir sur cette décision budgétaire », ont estimé les coprésidents du groupe Stéphane Demilly et Franck Riester, le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde et Olivier Becht, membre de la commission de la Défense.

Et d’ajouter : « Certes la France doit réduire son déficit, mais la France est aussi un pays en guerre contre le terrorisme islamiste », avec « tous les jours des femmes et des hommes qui risquent leur vie pour nous protéger sur le territoire national (opération Sentinelle) et pour combattre les jihadistes et Daesh en Irak, en Syrie et en Afrique (opération Barkhane) ». Aussi, « réduire les budgets, c’est rapidement se retrouver avec des matériels anciens et dépassés, et, à moyen terme, mettre en péril la sécurité de notre pays », ont-ils fait valoir.

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