Le budget du ministère des Armées menacé de perdre 2,66 milliards d’euros?

Ce n’est qu’après les élections législatives que la Cour des comptes remettra au gouvernement un audit sur les finances publiques. Cependant, sans attendre ce rapport, Bercy estime que la trajectoire du déficit public tend actuellement vers les 3,2% du PIB, loin de l’objectif des fameux 3% fixé par les instances de l’Union européenne (UE). En clair, a souligné le quotidien Les Échos (édition du 6 juin), l’exécutif doit trouver entre 4 et 5 milliards d’euros pour équilibrer les comptes.

L’an passé, la baisse des taux d’intérêt avait permis de trouver 3 milliards d’euros d’économies sur la charge de la dette. Sauf que, ces mêmes taux étant attendus en hausse, il sera compliqué au gouvernement d’Édouard Philippe de jouer sur ce paramètre. Reste donc le classique recours aux gels de crédits… Et à la non moins classique ponction du budget alloué au ministère des Armées.

Et, à en croire La Tribune, les efforts susceptibles d’être demandés aux militaires sont énormes : 2,66 milliards d’euros. Rien que ça. Pour rappel, le budget du ministère des Armées voté pour 2017 s’élève à 32,4 milliards d’euros. Si cette piste se confirme, alors son montant serait inférieur à 30 milliards et retrouverait le niveau qui était le sien en 2007 (en euros courants).

Comment, dans ses conditions, financer la hausse des effectifs de la Force opérationnelle terrestre (FOT), accélérer certains programmes clés (Scorpion pour les blindés, avions ravitailleurs, patrouilleurs hauturiers, etc…) et atteindre l’objectif d’un budget équivalent à 2% du PIB, conformément aux engagement pris auprès de l’Otan en 2014 ainsi que par le candidat Macron [2% du PIB hors pensions et hors surcoût des opérations extérieures, ndlr]?

Le tout en ayant à l’esprit que la trajectoire financière définie par la Loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019 actualisée prévoit une hausse du budget des armées de 700 millions en 2017, de 990 millions en 2018 et de 1,51 milliards en 2019.

Selon La Tribune, ces 2,66 milliards correspondraient à 1,6 milliard de réserve de précaution, 675 millions de report de crédits du programme 146 (« Équipement des forces »), de 350 millions de surgel de crédits de gestion et 40 millions de gel de crédits du programme 178 (« Préparation des forces »). Un pays qui réduirait son effort militaire alors qu’il se dit en guerre est quand même saugrenu…

Le cabinet de la ministre des Armées, Sylvie Goulard, a confirmé les chiffres avancés par La Tribune mais a précisé qu’ils provenaient de mesures adoptées par le précédent gouvernement.

« Aucune décision concernant les crédits de la Défense pour l’année 2017 n’a été prise depuis l’arrivée du nouveau gouvernement », a en effet assuré le cabinet de la ministre. En outre, a-t-il fait valoir, les mesures évoquées participent « d’une régulation des crédits de la Défense, comme c’est le cas au demeurant pour les autres ministères chaque année », dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017 adopté par le Parlement en décembre dernier. « Le montant de ces mesures de régulation est du même ordre de grandeur, à la même date, que celui qui a été appliqué en 2016 (2,7 milliards d’euros) », a-t-il relevé.

« Les chiffres qui ‘sortent’ ne sont pas des chiffres qui résultent d’une prise de position du ministre. Aucune décision nouvelle n’a été prise sur le budget de la Défense depuis la nomination du gouvernement », a également précisé Bercy. Mais « on commence à discuter », a ajoute-t-on au ministère de l’Economie. « On a des objectifs globaux, avec le sérieux budgétaire d’un côté, de l’autre des priorités et un programme présidentiel. Tous les ministres sont solidaires, (…) donc il n’y aura pas de logiques de l’un contre l’autre », a-t-on expliqué.

Quoi qu’il en soit, Mme Goulard « défendra le budget du ministère, au Parlement et dans les arbitrages interministériels, dans le souci de doter les armées des moyens de remplir leurs missions », a affirmé son cabinet, évoquant une réunion qui doit avoir lieu le 8 juin avec Gérald Darmanin, le ministre des Comptes publics. « La gravité des menaces terroristes, tout comme le nombre important d’opérations extérieures, invite la nation à assumer un effort particulier à l’égard de ses armées », a-t-il encore plaidé. « Nous savons que le contexte budgétaire général est très contraint, il y a un équilibre à trouver et des arbitrages à opérer, qui le seront par le président. Nous porterons une Loi de programmation militaire ambitieuse. Mais c’est une priorité qui doit être menée à bien avec le Parlement », avait déclaré la ministre, le 29 mai dernier, lors d’une conférence de presse.

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