Pour le chef du Pentagone, il ne fait aucun doute que la Syrie a conservé des armes chimiques

En septembre 2013, et à l’issue d’un accord conclu entre les diplomates russes et américains après l’attaque au gaz sarin commise quelques jours plus tôt à La Ghouta, un faubourg de Damas, la Syrie avait accepté de se débarrasser de son arsenal chimique et de le faire détruire sous le contrôle de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).

Donc, théoriquement, l’armée gouvernement syrienne n’est plus en mesure d’utiliser à nouveau du gaz sarin ou autres agents toxiques. Aussi, l’attaque de Khan Cheikhoun, où un produit neuro-toxique a été répandu, pose problème.

Depuis le début du conflit syrien, le recours aux armes chimiques ont été signalées. Quelques mois avant celle de la Ghouta, une enquête avait été lancée au sujet d’une attaque au gaz sarin à Khan Al-Assal, près d’Alep. Déjà, le régime de Bachar el-Assad en avait fait porter la responsabilité aux rebelles syriens.

Et les investigations menées par les Nations unies ne permirent pas de conclure sur les responsabilités, les enquêteurs n’ayant pas été en mesure de travailler comme ils le souhaitaient. Toutefois, le rapport final avait indiqué que « les agents chimiques utilisés dans cette attaque portaient les mêmes caractéristiques uniques que celles utilisées à La Ghouta. »

Par ailleurs, d’après une enquête menée par le magazine américain Foreign Policy, le Front al-Nosra (devenu Front Fatah al-Cham) aurait mis la main sur une partie de l’arsenal chimique syrien, après la prise, en 2012, de la base « Cheikh Souleimane », dans le nord du pays. Le problème est que cette affirmation ne repose sur un témoignage, celui d’un certain Abou Ahmad. Et, selon ce dernier, l’État islamique (EI ou Daesh) serait emparé d’une partie de ce « butin », fait de futs de chlore, de sarin et de gaz moutarde, après sa rupture avec al-Qaïda.

Cela étant, depuis l’affaire de La Ghouta et l’intervention de l’OIAC pour détruire l’arsenal chimique syrien, plus aucune attaque au sarin (il y en a eu d’autres mais pas avec un neurotoxique) n’avait été signalée en Syrie (*) jusqu’à l’attaque, le 4 avril dernier, de Khan Cheikhoun. Selon Damas, le bombardement d’un entrepôt expliquerait la diffusion de l’agent toxique ayant tué entre 86 et 100 personnes, principalement des femmes et des enfants. Seulement, pour plusieurs experts des armes chimiques, cette version de résiste pas à l’examen des faits.

« Si un tel stock existait, il serait très improbable qu’il soit sous le contrôle des groupes rebelles. Il s’agit indubitablement d’une attaque perpétrée à l’aide d’une arme chimique et non d’une fuite qui aurait été occasionnée par des dégâts collatéraux. Pour disposer d’une arme chimique, il faut non seulement posséder un agent toxique, mais il faut aussi que ce dernier soit couplé à un dispositif de dissémination spécifique (bombes, roquettes, aérosols) », a en effet expliqué Olivier Lepick, spécialiste des armes nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC) à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).

Dans le Mystère de la chambre jaune, le reporter Joseph Rouletabille trace « un cercle dans lequel j’ai enfermé le problème » avec le « bon bout de sa raison » pour trouver la clé de l’énigme. Et c’est le genre de méthode utilisée par le général James Mattis, le chef du Pentagone. Si la dispersion d’agents neuro-toxiques par le bombardement d’un entrepôts où ils auraient été stockés est hautement improbable, alors c’est qu’il « ne peut y avoir aucun doute pour la communauté internationale que la Syrie a conservé des armes chimiques, en violation à son accord et à ses affirmations sur leur destruction », a en effet déclaré le responsable américain, ce 21 avril, lors d’un déplacement en Israël.

« C’est une violation des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, et elle devra être traitée au niveau diplomatique », a continué le chef du Pentagone.

Deux jours plus tôt, le renseignement militaire israélien a estimé, selon l’Associated Press, que le régime syrien disposerait encore de 1 à 3 tonnes d’agents toxiques, sur les 1.290 tonnes qu’il avait dit posséder en 2013.

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