Le financement d’un second porte-avions ne coûterait que 0,02% du PIB par an

Disposer d’un porte-avions est essentiel pour une puissance qui prétend vouloir jouer les premiers rôles sur la scène internationale pour faire valoir ses intérêts. C’est d’ailleurs pour cette raison que la Chine et l’Inde entendent développer leur capacités aéronavales et que les États-Unis veulent préserver les leurs ou que le Royaume-Uni a l’intention de retrouver les siennes, avec la construction des HMS Queen Elizabeth et HMS Prince of Wales.

Un porte-avions, accompagné de son groupe aéronaval (frégates, sous-marins) pour le protéger, permet d’intervenir militairement quand il n’est pas possible de disposer de bases terrestres au plus prêt de la zone des opérations. En outre, c’est un outil stratégique et diplomatique de premier plan. Les marins disent même qu’un bâtiment comme le Charles-de-Gaulle représente « 42.000 tonnes de diplomatie ».

Aussi, à l’heure où, justement, le navire amiral de la Marine nationale est immobilisé pour 18 mois en raison d’un arrêt technique majeur à mi-vie, la question de lancer les études de son successeur, voire pour doter la France de deux porte-avions, est évoquée par la plupart des candidats à l’élection présidentielle.

Rare sont ceux qui se disent prêt à faire l’impasse sur cette capacité, hormis peut-être Jean-Luc Mélenchon, qui n’est pas très clair sur ce sujet. Si son programme estime que « l’opportunité de remplacer le le porte-avions Charles-de-Gaulle d’ici 2040 par deux bâtiments moins onéreux doit être discutée », son porte-parole pour les affaires de défense, Djordje Kuzmanovic, a précisé, lors d’une table ronde de l’ANAJ-IHEDN que la « question d’un deuxième porte-avions est un faux problème » étant donné qu’il « ne serait déployé qu’en Méditerranée où toutes les opérations envisagées sont possibles depuis la base de Solenzara. »

Quoi qu’il en soit, dans une note publiée par l’Institut Thomas More, Jean-Sylvestre Mongrenier, docteur en géopolitique de l’Institut Français de Géopolitique (Paris-VIII), fait valoir que « si le prochain chef de l’État ne prenait pas la décision de construire un second porte-avions et de prévoir le successeur du Charles-de-Gaulle, la France serait déclassée sur les plans diplomatique et militaire et sa voix ne porterait plus. » Et d’insister : « L’ambition du grand large que signifierait le retour de la permanence à la mer d’un groupe aéronaval français est aussi une ambition de civilisation : la liberté et la prospérité des sociétés occidentales reposent sur la maîtrise de l’élément marin. »

Par ailleurs, souligne le chercheur, « l’absence de permanence d’un groupe aéronaval national à la mer constitue un paradoxe au regard de ce que représente la France, en tant que puissance maritime ». En effet, le domaine maritime français est le second au niveau mondial, avec plus 10 millions de kilomètres-carrés.

D’où son plaidoyer pour le lancement, dès 2017, des études de conception d’un second porte-avions afin de garantir à la France une capacité aéronavale permanente, à l’heure où les tensions géopolitiques se font de plus en plus vives. La construction de ce navire pourrait ainsi commencer dès 2022, pour une mise en service en 2030.

Qui plus est, la construction d’un second porte-avions est essentielle pour maintenir des capacités et des compétences industrielles clés, en particulier celle de la filière nucléaire. L’enjeu est d’autant plus fondamental que l’avenir de la Force océanique stratégique (FOST) en dépend.

Comme l’avait souligné Laurent Collet-Billon, le délégué général pour l’armement (DGA), ce futur porte-avions sera plus imposant que le Charles-de-Gaulle et ses 42.000 tonnes, en raison de l’évolution des normes de sûreté et de l’amélioration de la proctection.

Cela étant, Jean-Sylvestre Mongrenier de construire un porte-avions qui viendrait en complément du Charles-de-Gaulle, dont le retrait en service serait effectif, au plus tard, en 2041. Dans ce cas, la Marine nationale disposerait d’une permanence aéronavale pendant une petite dizaine d’années, ce qui laisserait le temps d’envisager la construction d’un « sister-ship » susceptible d’être opérationnel d’ici 2040.

Quant à l’investissement nécessaire, le chercheur estimé qu’il est largement à la portée du budget de la Défense. Le coût d’un deuxième porte-avions (en complément du Charles-de-Gaulle) serait, avance-t-il, de 4,5 milliards d’euros (c’est une fourchette haute, la DGA ayant avancé 4 milliard). Soit 450 millions d’euros par an sur une décennie. Et cela représenterait 1,5% du budget de la Défense et seulement 0,2% du PIB (ou 0,02% du PIB par an sur 10 ans). Et cela, en sachant que les dépenses publiques de la France s’élèvent plus à 57% du PIB…

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