M. Le Drian défend la coopération militaire de la France avec l’Égypte

Le 24 mars, l’ancien président égyptien, Hosni Moubarak, a quitté l’hôpital militaire du Caire, où il a passé l’essentiel de ses six années de détention, après avoir été lavé de toute accusation concernant la mort de manifestant en janvier 2011. Évidemment, l’arrivée au pouvoir, il y a trois ans, du maréchal Abdel Fattah al-Sissi, n’est pas étrangère à cet épilogue.

Et, six ans après le « printemps arabe », l’Égypte est revenue à son point de départ, après une parenthèse marquée par la présidence de Mohamed Morsi, un sympathisant des Frères musulmans qui a été renversé par un coup d’État militaire, appuyé par un vaste mouvement populaire protestataire, à peine plus d’un an après avoir été élu démocratiquement.

Aussi, quand, en 2015, la France vendit à l’Égypte 4 corvettes Gowind 2500, une frégate multimissions, 24 Rafale et les 2 Bâtiments de projection et de commandement (BPC) Mistral initialement destinés à la Russie, certaines voix ne manquèrent pas de critiquer ces contrats.

« La livraison d’armes de guerre à une dictature militaire dont les violations faites aux droits de l’Homme ou les tirs à balles réelles sur des manifestants sont actuellement légion » a dénoncée par Europe Ecologie Les Verts. L’ONG Amnesty International appela à suspendre tous les transferts d’armes » à l’Egypte en raison de la « répression, sans précédent depuis 30 ans » dans ce pays. Même chose pour Human Rights Watch, pour qui ces contrats d’armement paraissaient « hors de propos. »

Lors d’une audition à l’Assemblée nationale pour évoquer les opérations en cours, le 23 février dernier [le compte-rendu vient d’être rendu public, ndlr], le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a été interpellé par un député sur le fait qu’il avait refusé « la vente des [BPC] Mistral à Vladimir Poutine tout en passant contrat avec la dictature égyptienne et l’Arabie saoudite. »

« Je ne débattrai pas avec vous de la question de savoir si Mohamed Morsi était moins un dictateur que Abdel Fattah al-Sissi. Je pense que l’Égypte est un pays d’équilibre pour l’ensemble de la zone et que si elle est jamais en proie à des guerres civiles, c’est toute la zone qui sera affectée », a répondu M. Le Drian. « Il est essentiel que ce pays se stabilise – or ce processus de stabilisation est en cours », a-t-il continué, en faisant observer que « chaque fois que le président de la République ou moi-même rencontrons le président Sissi, nous lui faisons part de nos observations. »

Mais le ministre est allé encore plus loin : « Reste que la géopolitique ne se fonde pas uniquement sur le respect de certains critères à nos yeux essentiels et que nous nous attachons à essayer de faire respecter; il y a aussi d’autres considérations dont nous devons bien tenir compte. »

« Et pour revenir sur la vente des Mistral, a continué M. Le Drian, je ne suis pas certain que la Russie soit non plus un exemple dans ce domaine. Je reste tout à fait convaincu que la France a maintenant noué avec l’Égypte un vrai partenariat, susceptible d’y renforcer à terme la démocratie. » Et d’insister : « J’en suis intimement convaincu. »

L’Égypte est un des acteurs clés en Libye, où elle soutient cependant le maréchal Khalifa Haftar aux dépens du gouvernement d’unité nationale, reconnu par la communauté internationale. En outre le pays fait face à une menace jihadiste importante dans le Sinaï. Et, en cas de déstabilisation, le trafic maritime transitant par le canal de Suez – essentiel pour le commerce – risquerait d’être paralysé.

En outre, pendant que Le Caire signait des contrats avec l’industrie française de l’armement, l’administration Obama revenait sur sa décision de geler l’aide annuelle américaine aide de 1,5 milliard de dollars fournie à l’armée égyptienne. Et cela pour « répondre aux intérêts communs des deux pays dans une région instable. »

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