Centrafrique : Des combats entre groupes armés ont fait une vingtaine de tués près d’une mine d’uranium

Les autorités centrafricaines et la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation de la Centrafrique (MINUSCA) auraient réussi à convaincre au moins 14 groupes armés actifs dans le pays de prendre part à des discussions portant sur le processus DDR (désarmement, démobilisation, réinsertion). Pour cela, elles ont pu compter sur deux médiations, chacune conduite par la communauté catholique Sant’Egidio et l’Union africaine (UA).

Seulement, participer à des discussions ne veut pas dire renoncer à faire parler la poudre. Car, sur le terrain, deux groupes armés, issus de l’ex-coalition de la Séléka, qui avait pris le pouvoir à Bangui en mars 2013 avant d’en être écartée à la faveur de l’opération française Sangaris, continuent de s’affronter dans la région de Bambari (centre du pays).

Ces combats, qui opposent l’UPC (Unité du peuple centrafricain) d’Ali Daras au Front Populaire pour la Renaissance de Centrafrique (FPRC) du chef de guerre Noureddine Adam, ont pour enjeu le contrôle de la ville de Bambari. Et la MINUSMA tente de s’interposer, quitte à mener des interventions musclées.

Évidemment, les civils sont les premières victimes de cette rivalité entre l’UPC et le FPRC. Depuis le 21 mars, au moins 50 d’entre eux ont été tués lors de l’attaque de trois localités situées dans la région de Bambari, à savoir Agoudou Manga, Yasseneme et Ngouyanza.

« Ils ont assiégé ces villages tirant sans distinction sur les habitants », a témoigné, auprès de l’AFP, un habitant habitant de Yasseneme, réfugié à Bambari. « Ces attaques ont été lancées par des éléments de l’UPC qui continuent des représailles contre les autochtones », a-t-il accusé.

Ce que le groupe d’Ali Darass a catégoriquement nié. « L’UPC n’est pas impliquée dans ces attaques qui sont plutôt des actes commis par le FPRC. L’UPC a cependant fait échec à une progression (du FPRC) qui visait ses positions », a assuré une source proche de la direction de ce mouvement.

En outre, les violences ne se limitent pas seulement à la région de Bambari : des combats entre groupes armés ont eu lieu, ces derniers jours, dans la région de Bakouma, qui, située plus à l’est, abrite une mine d’uranium, rachetée par Areva à la société canadienne UraMin en 2007. Le site n’est plus exploité depuis 2012.

« Des heurts ont éclaté en début de semaine dans des villages situés aux abords de la ville de Bakouma, avant de gagner le centre même de Bakouma. Ces heurts ont déjà fait au moins une vingtaine de morts, pour la plupart des civils pris dans le champs de l’action ou atteints par des balles perdues », a expliqué une source militaire sollicitée par l’AFP.

« Il s’agit d’un bilan qui est provisoire et susceptible de s’alourdir, en raison des combats qui sont assez violents et qui se poursuivaient par endroits », a ajouté cette source, qui estime la « situation très préoccupante » étant donné que Bakouma est une zone « très sensible ». Qui plus est, la MINUSCA est absente de ce secteur. Et la patrouille qu’elle a envoyée sur place a été bloquée par « la destruction volontaire d’un pont », d’après les explications données par Vladimir Monteiro, son porte-parole.

L’identité des groupes qui s’affrontent n’a pas été précisée. Il est question d’ex-Séléka et de milices anti-Balaka, formées en 2013 en réponse aux exactions commises contre les chrétiens par les ex-rebelles. Cependant, le Journal de Bangui a expliqué que les habitants de Bakouma craignaient l’arrivée « de plus en plus massive des éléments […] proches de l’UPC, suite au combat qui les opposait avec le FPRC. »

Ces combats entre factions de l’ex-Séléka peuvent avoir plusieurs motifs, allant de la rivalité éthnique aux racket au contrôle de ressources économiques et minières du pays. Et il n’est pas exclu qu’il y ait des influences étrangères. Ainsi, deux entreprises ayant obtenu des permis de recherche d’hydrocarbures dans le nord-est de la Centrafrique et appartenant au groupe Poly Technologies, un géant de l’équipement militaire et civil contrôlé par l’État chinois, ont repris leurs activités sous la protection du FPRC.

Quoi qu’il en soit, ces groupes armés imposent leur loi sur une grande partie du pays. Ils « règnent en maître sur plus de 60% du territoire, bénéficiant d’une totale impunité. Ils se substituent à l’appareil judiciaire et terrifient la population et sont souvent accusés de se livrer à des abus sur des personnes soupçonnées de sorcellerie », a récemment avancé Marie-Thérèse Keita-Bocoum, experte indépendante des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Centrafrique.

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