Des patrouilles chinoises en Afghanistan?

Alliée du Pakistan, la Chine entretient de bonnes relations avec l’Afghanistan, au point que certains se demandaient, en janvier 2015, si Pékin n’allait pas profiter du désengagement partiel de l’Otan et des États-Unis du pays pour y jouer un rôle plus important.

Pour le président afghan, Ashraf Ghani, une bonne entente avec la Chine se justifierait par les moyens de pression de cette dernière sur le Pakistan, où a trouvé refuge le mouvement taleb. Par ailleurs, pour Pékin, la stabilité de l’Afghanistan est capitale pour éviter les infiltrations jihadistes dans sa province occidentale du Xinjiang, en proie aux revendications séparatistes des Ouïgours musulmans. C’est d’ailleurs pour cette raison que les autorités chinoises ont soutenu l’intervention américaine lancée en octobre 2001.

Qui plus est, la Chine garde un oeil intéressé sur les ressources du pays. Déjà, en 2007, la compagnie d’État China Metallurgical Group Corporation avait ainsi décroché un contrat d’exploitation de la mine de cuivre de Mes-Aynak dans la province du Logar.

Cela étant, la situation en Afghanistan est délicate. L’an passé, les forces gouvernementales afghanes ont de nouveau reculé face aux taliban, au point que, d’après l’Inspection générale pour la reconstruction de l’Afghanistan [SIGAR, une agence américaine, ndlr], elles ne contrôlent plus qu’environ 57% des 407 disctricts contre 72% un an plus tôt.

Aussi, c’est ce qui pourrait expliquer la présence de troupes chinoises dans l’extrême-nord de l’Afghanistan, qui partage avec la Chine une frontière de 76 km, située au bout du corridor du Wakhan. En effet, des photographies de véhicules militaires chinois, prises dans la région de Pamir Khord [ou Petit Pamir], ont été diffusées par le site WION en novembre 2016.

Sur ces clichés, on peut y voir l’équivalent chinois du Humwee américain, le Dongfeng EQ 2020 (ou Mengshi) ainsi qu’un blindé de type MRAP (Mine Resistant Ambush Protected) Norinco VP11. Cela étant, il n’est pas impossible que ces véhicules aient été livrés aux forces afghanes dans le cadre d’une aide militaire.

Mais, en février dernier, l’Institut américain Asie centrale-Caucase, de l’Université Johns-Hopkins, a confirmé cette présence militaire chinoise dans cette région, en se basant sur des déclarations de diplomates et des témoignages. Et de rappeler que, en août 2016, la Chine, l’Afghanistan, le Tadjikistan et le Pakistan s’étaient mis d’accord sur un renforcement du contrôle des frontières, dans le cadre d’un mécanisme dédié [le Quadrilateral Cooperation and Coordination Mechanism – QCCM].

Plus tard, interrogé sur ce point, le colonel Ren Guoqiang, un porte-parole de l’Armée populaire de libération (APL), a nié catégoriquement toute présence militaire chinoise en territoire afghan. « Le rapport affirmant que l’armée chinoise a patrouillé en Afghanistan est faux », a-t-il dit. En revanche, il a évoqué des opérations de « contre-terrorisme » conjointes le long de la frontière, sur « la base d’accords bilatéraux » passés entre les deux pays. Et, à Kaboul, on ne dit pas autre chose.

Reste que, d’après Military.com, le Pentagone assure être au courant de cette présence militaire chinoise en Afghanistan. « Nous savons qu’ils sont là, qu’ils sont présents », a lâché un porte-parole, sans plus de commentaires.

« Compte tenu de tous les éléments de preuve, il n’y a pratiquement pas de doute que des patrouilles frontalières, avec une participation chinoise, ont été menées sur le sol afghan dans le Petit Pamir. Elles ont depuis été très probablement suspendue [depuis la sortie des photographies des véhicules chinois, ndlr]. Néanmoins, le gouvernement afghan nie fermement que ces patrouilles ont eu lieu. […] Cependant, cela implique sur le gouvernement afghan ne sait pas ce qui se passe dans le Petit Pamis et/ou que la procédure pour établir de telles patrouilles conjointes est profondément viciée. Les deux options soulèvent des questions préoccupante au sujet des capacités du gouvernement afghan », a conclu l’analyste de l’Institut Asie centrale-Caucase.

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