Le président de la commission européenne opposé à une hausse des budgets militaires des pays membres

La semaine passée, à Bruxelles, lors d’une réunion avec ses homologues des pays membres de l’Otan le secrétaire américain à la Défense, James Mattis, a réaffirmé que l’Alliance resterait un « socle fondamental » pour les États-Unis, à la condition, toutefois, qu’il y ait un meilleur partage du « fardeau ».

« L’Amérique va assumer ses responsabilités, mais si vos nations ne veulent pas voir l’Amérique modérer son engagement envers cette Alliance, chacune de vos capitales doit montrer son soutien à notre défense commune », a en effet déclaré le général Mattis. Ces prédécesseurs avaient dit à peu près la même chose…

Lors du sommet de l’Otan de Newport (Pays-de-Galle), en septembre 2014, les Alliés avaient pris l’engagement de porter, d’ici 10 ans, le niveau de leurs dépenses militaires à 2% de leur PIB. Or, à ce jour, seulement 3 ou 5 (cela dépend selon les méthodes de calculs) respectent cette exigence.

Le 20 février, lors de sa première visite au siège de l’Otan, à Bruxelles, le vice-président américain, Mike Pence, n’a pas dit autre chose que James Mattis. « La défense de l’Europe requiert un engagement de l’Europe tout autant que de notre part », a-t-il affirmé, avant de souligner que certains Alliés n’avaient pas encore fixé une « trajectoire claire et crédible » pour atteindre cet objectif des 2% du PIB. Or, a-t-il continué, « le président des Etats-Unis et le peuple américain souhaitent que nos alliés respectent leur parole et fassent davantage pour notre défense commune. » Et M. Trump « s’attend à des progrès réels d’ici la fin de 2017 », a-t-il ajouté.

Visiblement, cette injonction n’est pas du goût de Jean-Claude Juncker, le président de la commission européenne. Héraut d’une improbable armée commune aux membres de l’UE, il a estimé que les Européens ne devaient pas se plier à la demande américaine de revoir à la hausse leurs dépenses militaires.

S’exprimant en marge de la conférence de Munich sur la sécurité, le 16 février, et notant que cela fait maintenant plusieurs années que Washington demande à ses Alliées européens d’accentuer leur effort en matière de défense, M. Juncker s’est dit « tout à fait contre » l’idée d’aller dans cette voie.

Pour le chef de l’exécutif européen, l’idée américaine sur la sécurité serait « trop étroite » et il faudrait aussi « compter les dépenses des pays de l’UE en matière de développement et d’aide humanitaire comme une contribution à la stabilité. »

« Si vous regardez ce que fait l’Europe en matière de défense, ainsi que pour l’aide au développement et l’aide humanitaire, la comparaison avec les États-Unis semble plutôt différente. La politique moderne ne peut pas être juste une question d’augmentation des dépenses de défense », a fait valoir M. Juncker. Ce dernier a aussi avancé que si l’Allemagne consacrait 2% de son PIB à ses armées, elle ne serait plus en situation d’excédent budgétaire.

« Les Européens douvent mieux regrouper leur dépenses de défense pour dépenser plus efficacement », a encore ajouté le président de la commission de Bruxelles.

Seulement, les propos de M. Juncker risquent fort d’être mal reçus dans les pays qui s’estiment menacés par la Russie, comme la Pologne et les pays baltes… En outre, face à des adversaires résolus comme peuvent l’être les jihadistes, l’aide au développement ne suffit pas pour empêcher leur expansion. De récents exemples sont là pour le démontrer. « La diplomatie sans les armes, c’est la musique sans les instruments », disait Bismarck…

Cela étant, le porte-parole de la commission européenne, Margaritis Schinas, a relativisé les déclarations de M. Juncker. « La commission a présenté un ensemble de mesures ambitieuses visant à accroître les dépenses de défense, à approfondir la coopération militaire afin de répondre plus rapidement aux crises et à renforcer notre relation avec l’Otan et nos partenaires internationaux », a-t-il dit. En outre, a-t-il ajouté, le « Conseil européen de décembre 2016 a pour la première fois approuvé l’objectif de l’Otan en matière de dépenses militaires pour les membres de l’UE qui en font partie, soit la cible des 2% du PIB ».

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