L’Union européenne compte s’appuyer sur les tribus libyennes pour réduire les flux migratoires

migrants-20160518

Lancée en juin 2015 pour enrayer les flux migratoires entre l’Europe et la Libye en cherchant à casser le modèle économique des passeurs, l’opération navale européenne Sophia est loin d’avoir atteint ses objectifs. L’an passé, 180.000 migrants partis du littoral libyen sont arrivés sur le Vieux Continent et même si 32.000 ont pu être sauvés, le nombre de disparitions et de décès en mer augmente chaque année.

Cette inefficacité s’explique en très grande partie par le fait que les navires de l’opération Sophia ne sont pas autorisés à intervenir dans les eaux territoriales libyennes. Et, au regard de la situation politique en Libye, où au moins deux gouvernements rivaux se disputent le pouvoir, ce n’est pas prêt de changer.

Dans ces conditions, comment enrayer les flux migratoires? Comme il n’est pas possible d’intervenir directement dans les eaux territoriales de la Libye, l’opération Sophia a été chargée d’une nouvelle mission, à savoir former les gardes-côtes libyens.

Lors du Conseil européen qui s’est tenu à La Valette (Malte), le 3 février, et conformément à ce qu’avait préconisé, la semaine passée, Federica Mogherini, la Haute Représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, il a donc été décidé de donner la priorité à la formation, à l’équipement et au soutien des gardes-côtes libyens ainsi qu’à « d’autres agences concernées ».

« Il convient de développer sans tarder les programmes complémentaires de formation de l’UE, aussi bien en termes d’intensité que d’effectifs, à commencer par ceux qui ont déjà été lancés dans le cadre de l’opération Sophia, et en tirant parti de l’expérience ainsi acquise. Il faut veiller à ce que le financement et la
planification de ces activités soient durables et prévisibles, notamment au travers du réseau méditerranéen Seahorse », peut-on lire dans la « déclaration de Malte ».

Un autre décision vise à réduire les flux migratoires en Libye, en s’attaquant au modèle économique des passeurs. La déclaration de Malte précise ainsi qu’il faut « soutenir, dans la mesure du possible, le développement des communautés locales (…), en particulier dans les zones côtières et aux frontières terrestres libyennes situées sur les routes migratoires, afin d’améliorer leur situation socio-économique
et de renforcer leur résilience en tant que communautés d’accueil. »

libye-20170224Le Premier ministre maltais, Joseph Muscat, a fait une explication de texte. « Il y a aussi maintenant un engagement direct avec les tribus dans le sud de la Libye qui ont jusqu’à présent collaboré avec les trafiquants et gagné entre cinq et six millions d’euros par semaine grâce à cela », a-t-il dit. « Tout cela constitue un signal extrêmement positif. Est-ce que cela suffira, le temps le dira », a-t-il ajouté.

En clair, il s’agirait de compenser ce que gagnent les tribus libyennes en laissant entrer les migrants en Libye via les voies d’accès qu’elles contrôlent. Reste à voir comment tout cela va se mettre en place, d’autant plus que certaines tribus ont établi des liens avec des groupes jihadistes.

« Daesh cherche d’abord à s’associer à des groupes influents (la Libye compte 140 tribus, dont 26 capables de jouer un rôle important dans l’équilibre des alliances) par le biais, par exemple, d’alliances fondées sur des mariages, des accords de protection mutuelle ou des accords de partage sur la manne des flux de migrants », soulignait ainsi la lettre TTU, en décembre 2015.

Cela étant trois grandes groupes se partagent le Sud-Libyen : les Toubous (près du Soudan), les Touareg (sud-ouest) et différentes tribus arabes, comme les Zuwayya. En outre, certaines (dites  » saadiennes ») sont proches du maréchal Khalifa Haftar, qui conteste l’autorité du gouvernement libyen d’union nationale (GNA) que soutient l’Union européenne.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]