La corruption fragilise l’armée nationale afghane

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L’inspecteur général du service américain chargé de surveiller les efforts pour la reconstruction de l’Afghanistan (SIGAR), John Sopko, n’est pas du genre à manier la langue de bois et à prendre ses désirs pour des réalités. En clair, il ne cherche pas à plaire et dit les choses telles qu’elles sont. Et ses dernières déclarations au sujet de la situation afghane le montrent à nouveau. Cela étant, ses conclusions rejoignent en partie celles du général John Nicholson, le chef de la mission Resolute Support.

« Même avec beaucoup de bonne volonté, je ne peux pas dire que les choses se sont beaucoup améliorées en Afghanistan ces dernières années », a ainsi lancé M. Sopko, à l’occasion d’une conférence du cercle de réflexion américain CSIS. Et cela, malgré les 1.000 milliards de dollars (dont 115 milliards pour la seule reconstruction du pays) qu’a coûté l’intervention militaire aux contribuables américains.

Ces derniers mois, le général Nicholson s’inquiétait de l’importance des pertes subies par les forces de sécurité afghanes face aux insurgés, principalement taliban, et soulignait le recul du gouvernement afghan, ce dernier ne contrôlant plus que 63,4% du territoire (contre 70,5% au début de l’année 2016).

« La police et l’armée afghane ont perdu des milliers d’hommes dans les combats contre les talibans depuis que l’Otan a mis fin à sa mission de combat, fin 2014 », a ainsi souligné M. Sopko. En outre, a-t-il continué, « le nombre de groupes armés s’opposant au gouvernement de Kaboul augmente, et l’emprise géographique de celui-ci diminue. » Et d’ajouter : « Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’armée afghane ne fait que jouer en défense et ne va pas s’en prendre aux talibans. »

Outre l’importance de la production d’opium, qui est repartie de plus belle, le directeur du SIGAR a pointé la corruption endémique qui mine le pays, et plus particulièrement l’armée afghane. Ainsi, selon lui, on ne connaît pas précisément le volume de ses effectifs, les chefs militaires afghans ayant pris l’habitude d’empocher les soldes de « dizaine de milliers de soldats fantômes qui n’existent que sur le papier. » Une telle situation a déjà été observée en Irak. Avec les conséquences que l’on sait…

Pire même : d’après M. Sopko, la « corruption est si répandue dans les forces afghanes que les chefs talibans recommandent à leurs troupes d’acheter directement auprès de soldats afghans les armes, carburants et munitions dont ils ont besoin. Et pour les insurgés, c’est le plus facile et le moins cher » pour s’apprivisionner, a-t-il dénoncé.

Cela étant, les autorités afghanes ont conscience des problèmes que pose cette corruption quasi-institutionnalisée. « Tant le président Ashraf Ghani que son vice-président Abdullah Abdullah ont collaboré avec les efforts américains pour réduire la fraude et les gaspillages », a observé John Sopko. Un « pôle judiciaire anti-corruption » a ainsi été mis en place et il a déjà commencé à lancer des poursuites pour des affaires de pots-de-vin », a-t-il ajouté.

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