Un sénateur visé par des sanctions russes nommé à la tête du renseignement américain

RetouchedLe moins que l’on puisse dire est que Donald Trump, le prochain président des États-Unis, s’est montré sceptique face à l’ingérence présumée de la Russie dans l’élection présidentielle américaine, via le piratage informatique des serveurs du Parti démocrate et la diffusion de courriels susceptibles de déstabiliser la campagne d’Hillary Clinton.

Le 4 janvier, via Twitter, et alors que, en 2011, il avait demandé la peine de mort contre lui pour avoir rendu public les câbles diplomatiques américains, M. Trump est allé même jusqu’à donner du crédit à Julian Assange, le fondateur du site WikiLeaks, qui a diffusé les courriels de Mme Clinton, en reprenant à son compte ses affirmations selon lesquelles « un ado de 14 ans pouvait avoir piraté Podesta [le directeur de l’équipe de campagne de Mme Clinton, ndlr] » et que les « Russes ne lui avaient pas donné les informations » du Parti démocrate.

En clair, le président élu a simplement désavoué les services de renseignement de son pays, son équipe allant même jusqu’à rappeler l’affaire des « armes de destruction massive » en Irak, oubliant, au passage, les interférences politiques à l’époque…

Puis, toujours via Twitter, le lendemain, M. Trump a corrigé le tir en affirmant être un « grand fan du renseignement », en accusant les médias de « mentir » pour « faire croire » qu’il était « contre le renseignement ».

Enfin, le 6 janvier, M. Trump a rencontré les responsables du renseignement américain, à savoir James Comey (FBI), John Brennan (CIA), l’amiral Michael Rogers (NSA) et James Clapper, le directeur du renseignement.

Dans le même temps, un rapport expurgé de ses données sensibles a été rendu public [.pdf]. Et, sur la base d’informations recueillies par le FBI, la CIA et la NSA, le document en question conclut que le « président russe Vladimir Poutine a ordonné une campagne d’influence » pour favoriser l’élection du candidat républicain en discréditant la campagne de Mme Clinton, via des intrusions dans les serveurs du Parti démocrate ainsi que par une campagne de propagande sur les réseaux sociaux menée par des « trolls russes ».

À l’issue de cette réunion, qu’il a qualifiée de constructive (« J’ai beaucoup de respect pour le travail des hommes et des femmes » du renseignement », a-t-il affirmé), M. Trump a reconnu que les États-Unis sont la cible continue de tentatives d’attaques et d’intrusions informatiques. Pour autant, celles ayant visé le Parti démocrate « n’ont eu absolument aucun impact sur le résultat de l’élection », a-t-il estimé. Et de citer, parmi les « malfaiteurs » possibles, la Russie, la Chine, d’autres pays, des groupes et individus extérieurs. » Politiquement, il ne pouvait pas dire autre chose…

En outre, M. Trump a expliqué que les « méthodes, outils et tactiques que nous utilisons pour protéger l’Amérique ne doivent pas être exposées publiquement, ce qui aiderait ceux qui cherchent à nous faire du mal », avant de promettre un plan anti-piratage dans les 90 jours suivants la date de son investiture (le 20 janvier).

Quoi qu’il en soit, et sans doute pour donner des gages aux élus républicains du Congrès préoccupés par une éventuelle indulgence à l’égard de la Russie, M. Trump a confirmé, le 7 janvier, son intention de nommer l’ancien sénateur de l’Indiana, Dan Coats, 73 ans, au poste du directeur national du renseignement (DNI) à la place de James Clapper, qui occupe cette fonction depuis 2010.

Ancien ambassadeur en Allemagne et membre de la commission du Renseignement lors de son dernier mandat, Dan Coats est l’un des 6 sénateurs américains visés par des sanctions russes prises en 2014, en réponse à celles décidées par Washington après l’annexion de la Crimée. Á l’époque, il s’était dit « honoré » d’avoir été « visé » par le Kremlin. Un autre prétendant au poste de DNI était Chris Christie, le gouverneur du New Jersey, partisan d’une ligne dure à l’égard de Moscou.

« Je suis certain que le sénateur Dan Coats est le bon choix », a fait valoir M. Trump, via un communiqué. Il « guidera la vigilance permanente de mon administration envers ceux qui cherchent à nous nuire », a-t-il ajouté.

Pour rappel, le directeur national du renseignement, posté créé au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, coordonne l’activité des 16 agences de renseignement américaines. Son service est chargé de rédigé le briefing de sécurité quotidien destiné à la Maison Blanche (briefing que le président élu n’a pas l’intention de lire tous les jours…).

Cela étant, nommer une personnalité engagée à ce poste est-elle une bonne idée? Étant donné l’hostilité affichée de M. Coats à l’égard du Kremlin, la moindre de ses affirmations sur les activités russes risque d’être critiquée et remise en cause. À commencer, peut-être, par celui qui l’aura nommé…

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]