Secret défense : Le député Pierre Lellouche a déposé une résolution pour destituer François Hollande
Lors d’un débat portant sur les opérations extérieures, organisé le 19 octobre dernier au Parlement, le député (LR) Pierre Lellouche s’était livré à un réquisitoire sans concession contre le président Hollande, coupable à ses yeux d’avoir manqué à sa fonction en confiant des documents « confidentiels » à des journalistes, en l’occurrence Gérard Davet et Fabrice Lhomme (Le Monde), lesquels ont récemment publié le livre intitulé « Un président ne devrait pas dire ça… ». Et pour le parlement, la question d’une destitution du chef de l’État était alors « posée ».
Mais M. Lellouche a franchi un pas supplémentaire en ouvrant « à la signature de l’ensemble de ses collègues de l’Assemblée nationale, une proposition de résolution visant à la destitution du président de la République, M. François Hollande, aux termes de l’article 68 de la Constitution. » Et de préciser, dans un communiqué, que « dès lors que la résolution sera signée par 58 députés, celle-ci sera transmise au Bureau de l’Assemblée nationale avant de poursuivre son examen en Commission des lois puis en séance publique. »
Le député reproche notamment au président Hollande d’avoir fait « fuiter » un document confidentiel défense qui précisait, en août 2013, la « timeline » du raid aérien envisagé contre le régime de Bachar el-Assad, après l’attaque chimique contre le quartier de la Goutha, dans la banlieue de Damas.
En lui-même, ce document ne donne pas beaucoup d’informations : par exemple, les cibles que les Rafale devaient frapper n’y figurent pas. Seulement, un tel papier, même s’il a perdu de son importance, n’a pas vocation à se retrouver dans les pages d’un journal tant qu’il n’a pas officiellement été déclassifié. D’où la procédure lancée par M. Lellouche et l’initiative de son collègue Éric Ciotti (LR).
Ce dernier a en effet saisi le procureur de la République pour « violation du secret défense » après la publication, le 24 août dernier, du document en cause dans le quotidien Le Monde.
« Il m’apparaît que la divulgation volontaire de documents et d’informations classées ‘confidentiel défense’ sont, dans les circonstances de l’espèce, de nature à constituer » le délit de violation du secret défense, a écrit M. Ciotti. Et d’ajouter, en fondant sa démarche sur l’article 40 du code de procédure pénale : « Les divulgations en cause m’apparaissent d’une gravité extrême puisqu’elles concernent les intérêts supérieurs de la nation et mettent en péril la politique de défense et de sécurité de la France. » Ce qui, pour ce concerne le document en question, est quand même exagéré… Aussi, c’est davantage le principe de divulguer de tels papiers qui est en cause.
Par ailleurs, il est également reproché au président Hollande ses confidences au sujet des quatre opérations clandestines « homo » qu’il a ordonnée entre le début de son mandat et le 9 octobre 2015, alors, qu’en la matière, le silence est d’or… même si l’on peut se douter que les morts d’individus comme le mollah Hazrat, le responsable de l’embuscade d’Uzbeen (tué en septembre 2012), ne sont pas le fait du hasard. « Je suis sûr qu’un jour ou l’autre François Hollande aura à rendre compte de cette violation manifeste du secret défense », a ainsi commenté son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, qui aspire à devenir son successeur…
« Il n’y a pas de violation du secret défense (…) Ce qu’a dit le président de la République, c’est qu’il a pris des décisions contre ceux qui étaient des terroristes qui agissaient contre la France. Point. Les choses sont claires », a répondu, le 2 novembre, Stéphane Le Foll, le porte-parole du gouvernement. Et cela, alors que le Premier ministre, Manuel Valls, venaient d’émettre de fortes critiques à l’endroit du chef de l’État pour ses confidences aux journalistes du quotidien du soir.
Quoi qu’il en soit, cette affaire provoque un certain malaise. Interrogé sur les confidences présidentielles au sujet des opérations « Homos » lors de l’émission « Le Grand rendez-vous », le 6 novembre, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian n’a pas donné les réponses attendues par les éditorialistes.
« Il n’y a pas de mystère. À partir du moment où vous avez des terroristes qui nous combattent, qui mettent en cause la sécurité des Français, nous les combattons jusqu’à leur éradication. Qu’ils soient chefs ou pas chefs. (…) Et s’il y a des chefs, tant mieux! », a déclaré M. Le Drian. « Quand on réussit à éliminer des chefs terroristes, je m’en réjouis », a-t-il insisté.
Et d’ajouter : « ça fait maintenant plus de quatre ans et demi que je suis ministre de la Défense. Je ne me suis jamais répandu sur les opérations secrètes, dans aucune circonstance. Je ne vais pas commencer maintenant. »
Cependant, l’ancien coordonnateur national du renseignement, Didier Le Bret, a été plus clair. « Tout le monde sait » qu’il y a des assassinats ciblés, a-t-il affirmé sur TV5 Monde. Pour le lui, le président Hollande « a le mérite de le dire, tout le monde le sait, voilà, pas de quartier pour des gens qui mènent la guerre contre nous. »