Syrie : La coalition anti-EI a visé un haut responsable de l’ex-Front al-Nosra

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Le dossier syrien, et en particulier la situation à Alep, où le plus grand hôpital a été récemment détruit par des raids aériens, est une autre pomme de discorde entre les États-Unis et la Russie, au point que Washington a décidé de suspendre ses pourparlers avec Moscou sur un cessez-le-feu en Syrie.

La Russie n’a « pas réussi à respecter ses propres engagements », notamment humanitaires, et a été « incapable de s’assurer » que le régime syrien cesse ses bombardements comme le prévoyait l’accord du 9 septembre, a fait valoir John Kirby, le porte-parole du département d’Etat. « À l’inverse, la Russie et le régime syrien ont choisi de poursuivre une voie militaire », a-t-il continué. Et la décision de suspendre le dialogue « n’a pas été prise à la légère », a-t-il ajouté.

À Moscou, où l’on s’est félicité de la « grande efficacité » des raids aériens russes à Alep (« Nous avons pratiquement empêché les terroristes de hisser leur drapeau noir au-dessus de Damas », a assuré Guennadi Gatilov, un vice-ministre des Affaires étrangères), on fait valoir que les États-Unis n’ont pas réussi à faire pression sur les rebelles modérés pour qu’ils s’écartent du groupe jihadiste Front Fatah al-Cham (ex-Front al-Nosra).

Et, dans un entretien accordé à la BBC, le 30 septembre, Sergueï Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères, n’a pas fait dans la demi-mesure. « Nous croyons qu’ils épargnent délibérément Al-Nosra. Ils n’ont jamais frappé Al-Nosra nulle part en Syrie », a-t-il dit.

Ce qui est factuellement faux étant donné que, par exemple, en avril, dans la province syrienne d’Idleb, un raid de la coalition formée pour combattre l’État islamique (EI ou Daesh), fut fatal à Abou Firas al-Souri (alias Radwane Nammous), un vétéran du jihad et porte-parole de l’ex-Front al-Nosra, ainsi qu’à une vingtaine de jihadistes.

Quoi qu’il en soit, après cette « sortie » du ministre russe, le Pentagone a indiqué, le 4 octobre, avoir visé Abu-al-Faraj al-Masri (alias Ahmed Salama Mabrouk), un membre de premier plan du conseil de la choura du Front Fateh al-Cham. Le raid aérien de la coalition dirigée par les États-Unis a été effectué près de la ville de Djisr al Choughour, dans l’ouest de la province d’Idleb.

Pour le moment, les résultats de cette frappe sont encore en train d’être évalués. « Sa mort, si elle est confirmée, va perturber et dégrader la coordination entre les figures majeures d’Al-Qaïda et les extrémistes », a fait valoir le capitaine de vaisseau Jeff Davis, un porte-parole du Pentagone.

Cela étant, le Front Fateh al-Cham a annoncé la mort d’Ahmed Salama Mabrouk (à gauche sur la photo ci-dessus) via son compte Telegram.

Né en 1956 et diplômé de l’Université du Caire, Ahmed Salama Mabrouk fut condamné à 7 ans de prison après l’assassinat, en 1981, du président égyptien Anouar el-Sadate. À peine libéré, ce membre du Jihad islamique partit en Afghanistan, puis au Yémen et on retrouva sa trace au Soudan, dans les années 1990. Proche d’Ayman al-Zawahiri (futur successeur de Ben Laden à la tête de d’al-Qaïda), il fut une nouvelle fois arrêté en compagnie de ce dernier, en 1996, au moment de franchir la frontière russe pour se rendre en Tchétchénie. Pour une raison obscure, les deux hommes furent finalement relâchés par les autorités russes.

Puis, un temps brouillé avec Zawahiri, Ahmed Salama Mabrouk fut interpellé dans un hôtel de Bakou (Azerbaïdjan), où il devait rencontrer, a-t-il été rapporté, un certain Ihab Saqr ainsi qu’un agent des services de renseignement iraniens. Les circonstances de cette arrestation restent encore à éclaircir, une autre version affirmant que le jihadiste aurait été kidnappé par la CIA, laquelle l’aurait ensuite remis aux autorités azeris après avoir copié le contenu de son ordinateur portable.

Bref, toujours est-il que Mabrouk fut ensuite extradé vers l’Égypte pour y être jugé et condamné. Seulement, à la faveur du printemps arabe, en 2011, il fut remis en liberté. Et c’est ainsi qu’on le retrouvera plus tard en Syrie, parmi les principaux dirigeants du Front al-Nosra, la branche syrienne d’al-Qaïda.

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