M. Le Drian évoque un risque d’éparpillement des jihadistes libyens

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Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a été l’un des premiers à avertir de la présence de jihadistes en Libye, en particulier dans le sud du pays, qu’il avait qualifié de « hub terroriste » en 2014. Depuis, l’État islamique (EI) s’est implanté dans ce pays, où il compte, selon les estimations, entre 4.000 et 6.000 combattants.

Actuellement, la branche libyenne de l’EI est en passe d’être chassée de la ville de Syrte, qui était devenue son fief en 2015, par les forces loyales au gouvernement d’union nationale (GNA), appuyées par des frappes aériennes américaines effectuées depuis le navire d’assaut amphibie USS Wasp.

Que se passera-t-il une fois que les jihadistes seront chassés de Syrte? « Il nous faut commencer à appréhender sérieusement la question de l’éparpillement des terroristes », a fait valoir M. Le Drian, lors de l’Université d’été de la Défense, organisée cette année à l’École polytechnique. « Ils ne disparaissent pas et donc il y a là un nouveau risque qui apparaît », a-t-il estimé.

« Indirectement, cela va présenter de nouveaux risques et pour la Tunisie et pour l’Égypte », a continué M. Le Drian, pour qui il est « dommage » que l’ensemble des Etats voisins de la Libye, dont la France, « ne se soient pas réunis (…) pour réfléchir à la question de l’éparpillement des terroristes une fois leurs places fortes prises » à cause probalement de « raisons politiques qui l’empêchent ».

Le ministre tunisien de la Défense, Farhat Horchani, est allé dans le sens de son homologue français. « Nous avons un nombre important de combattants étrangers qui reviennent soit de Syrte, soit de Libye », a-t-il dit, avant de déplorer l’absense de « stratégie et de coopération entre les États ». Et d’ajouter : « Il est urgent de se réunir, de coopérer, de voir comment on peut traiter ces forces au niveau sécuritaire, militaire ou autre » car « on ne pas se contenter de réunions semestrielles, ou annuelles. » Or, pour lui, la « tâche est immense et la longue » car « le terrorisme ne sera pas vaincu de sitôt. »

Cela étant, l’EI a probablement anticipé l’opération des forces du GNA à Syrte. En août, le Wall Street Journal, citant des sources occidentales, avait ainsi affirmé que des centaines de jihadistes évitèrent d’être pris au piège dans leur bastion en se regroupant ailleurs (avec le soutien de tribus, en particulier celle des Warfalla) ou bien en tentant de se replier vers des pays voisins. Et le quotidien de citer le Niger et le Tchad.

Quoi qu’il en soit, le combat contre les groupes jihadistes en Libye (l’EI n’est pas le seul, il faut aussi compter ceux liés à al-Qaïda) est miné par les dissensions politiques, le GNA n’étant toujours pas reconnu par le Parlement qui, issu des élections de 2014, a trouvé refuge à Tobrouk après avoir été chassé de Tripoli par les milices de Misrata.

Ce dernier soutient un autre gouvernement, qui, reconnu autrefois par la communauté internationale, dispose de ses propres forces armées, commandées par le général Khalifa Haftar, lequel à l’oreille de l’Égypte et des Émirats arabes unis… mais aussi, apparemment, celle de la France, comme l’a tragiquement montré la mort de trois militaires du service action de la DGSE dans la chute d’un hélicoptère, en juillet.

« On ne pourra sortir de l’imbroglio libyen que si les Libyens eux-mêmes assurent leur propre cohérence politique et leur propre cohérence militaire pour éviter que des milices qui agissent ensemble à un moment donné n’agissent les unes contre les autres à un autre moment », a donc expliqué M. Le Drian.

« La France plaide pour que le gouvernement d’union nationale qui est en œuvre puisse se solidifier et être l’élément de l’organisation inclusive militaire sur ce territoire », a poursuivi le ministre français. Car « sinon, ça ne marchera pas », a-t-il conclu.

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