Malgré les écueils, l’US Navy poursuit la mise au point d’un canon électromagnétique

Depuis 2005, l’Office of Naval Research (ONR) de la marine américaine développe un arme qui pourrait révolutionner l’artillerie navale : le canon électromagnétique (ou Railgun).

Il s’agit, avec un projectile d’une dizaine de kg, de faire circuler un courant électrique très intense ainsi qu’un champ magnétique entre deux rails parallèles conducteurs d’électricité. Grâce à la force de Laplace, résultante de celle de Lorenz, la munition subit alors une
accélération assez forte pour l’éjecter du canon à une vitesse d’au moins 5 fois la vitesse du son (Mach 5).

Un canon électromagnétique présente trois avantages. Le premier est il ne sera plus utile de stocker, à bord d’un navire, des explosifs. Ensuite, sa portée étant estimée à 200 nautiques, il sera donc possible de frapper vite et à une distance de sécurité, ce qui éviter le risque d’une éventuelle riposte. Enfin, son coût d’utilisation devrait être abordable dans la mesure où un tir de railgun coûtera au maximum 50.000 dollars (il faut compter entre 0,5 et 1,5 millions dollars pour un tir de missile).

L’ONR a déjà mené plusieurs essais à terre de cette arme. L’un d’eux, réalisé en décembre 2010, a permis d’envoyer un projectile à 200 km de distance, avec une vitesse de Mach 5. La puissance de ce tir avait été mesurée à 33 mégajoules.

Et cela suppose, et c’est un premier écueil, de disposer d’énormément d’énergie électrique. Il faut en effet fournir environ 25 MW pour expédier un obus sur une cible. Le seul navire de l’US Navy en mesure de produire assez d’électricité pour alimenter le railgun est le nouveau destroyer USS Zumwalt, commandé à seulement trois exemplaires.

Un autre problème de cette arme est que, à cause des contraintes physiques, souffre d’usure prématurée. Les travaux actuellement menés par l’ONR visent donc à améliorer significativement la résistance de ses composants, l’objectif étant d’arriver à tirer des milliers de projectiles.

« Nous allons y arriver. Nous progressons et nous le prouverons par les faits », a assuré, à l’AFP, Tom Boucher, le responsable de ce projet à l’ONR.

Faute de quoi, ce projet de canon électromagnétique pourrait tomber à l’eau… Car il a été établi que les obus développés pour le railgun peuvent tout aussi bien être tiré à très grande vitesse par les canons traditionnels.

« Il se trouve que des canons à poudre tirant le même projectile à haute vélocité permettent d’offrir presque autant que le canon électrique, et qu’en plus on peut y arriver beaucoup plus rapidement », a en effet expliqué Bob Work, le secrétaire adjoint américain à la Défense.

Pour autant, Tom Boucher estime que ce canon électromagnétique sera opérationnel et déployé d’ici 10 ans. Une solution à court terme serait de concevoir un railgun moins gourmand en énergie afin de pouvoir l’installer sur des navires actuellement en service… Mais cela réduirait ses performances (portée réduite de 100 à 50 nautiques avec une vitesse deux fois moins importante).

Tout dépendra de l’évolution des technologies en matière de condensateurs, de matériaux et de production d’électricité. D’après Popular Mechanics, Raytheon Integrated Defense System mène des recherches dans ce sens en collaboration avec l’ONR.

L’enjeu est que ce canon électromagnétique puisse être utilisé ailleurs qu’à bord d’un navire. L’US Army suivrait en effet de près les travaux en cours, avec l’idée de pouvoir, un jour, en doter son artillerie (voire ses chars)

« Nous étudions toutes ces technologies (…) Et mon opinion de professionnel est que nous sommes à la veille d’un changement fondamental dans la guerre terrestre », a ainsi affirmé le général Mark Milley, son chef d’état-major, lors d’une intervention devant le Center for Strategic & International Studies (CSIC), en citant la robotique, l’intelligence artificielle, les lasers et le railgun.

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