Pour l’Otan, le cyberespace sera bientôt un théâtre d’opérations comme un autre

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En 2011, et selon de nouvelles règles d’engagement de leurs forces armées, les États-Unis évoquèrent une possible riposte militaire en cas d’attaque informatique contre leurs infrastructures critiques.

Les Etats-Unis « répondront aux actes hostiles dans le cyberespace de la même manière qu’à toute autre menace pour le pays » et « nous nous réservons le droit d’utiliser tous les moyens nécessaires (diplomatiques, relatifs à l’information, militaires et économique) en fonction des besoins et dans le respect du droit international, pour défendre notre pays, nos alliés, nos partenaires et nos intérêts », affirmait un texte publié à l’époque par la Maison Blanche.

Et ces règles d’engagement ont inspiré l’Otan. Ainsi, la déclaration finale publiée à l’issue de son dernier sommet, organisé à Newport, en septembre 2014, a souligné que les « cyberattaques peuvent atteindre un seuil susceptible de menacer la prospérité, la sécurité et la stabilité des États et de la zone euro-atlantique » et que « leur impact sur les sociétés modernes pourrait être tout aussi néfaste que celui d’une attaque conventionnelle. »

Et d’affirmer que, dès lors, « la cyberdéfense relève de la tâche fondamentale de l’Otan » et qu’il reviendrait au Conseil de l’Atlantique Nord de décider, au cas par cas, des circonstances d’une invocation de l’article 5 à la suite d’une cyberattaque. »

En clair, une cyberattaque contre l’un des alliés serait donc susceptible de motiver un recours à la clause de défense collective, qui est le fondement de l’Alliance.

Seulement, cela pose quelques questions, relevées à l’époque par le colonel Oliver Kempf, spécialiste à la fois de l’Otan et de la cyberdéfense : quel seuil doit atteindre une attaque informatique pour invoquer l’article 5? Quelle serait la justification légale en cas de riposte? Et justement, cette riposte, quelle forme prendrait-elle? S’agirait-il de lancer aussi des cyberoffensives contre l’assaillant sachant que ce type de capacité n’est pas partagé entre Alliés?

Dans un entretien accordé au quotidien allemand Bild, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a livré quelques précisions. Ainsi, selon le compte rendu qu’en a fait Reuters, ce dernier a affirmé que l’organisation atlantique « pourra réagir à des attaques dans le cyberespace en déployant des armes conventionnelles. »

« Une cyberattaque peut être considérée comme un cas pour l’Alliance. L’Otan, alors, peut alors et doit réagir. Comment? Cela dépendra de la sévérité de l’attaque », a déclaré M. Stoltenberg. Et cela confirme le recours à l’article 5 dans ce genre de situation, tel qu’il a été évoqué dans la déclaration finale du sommet de Newport.

« L’Alliance atlantique doit s’adapter aux menaces de plus en plus complexes auxquelles elle est confrontée. C’est la raison pour laquelle les membres de l’Otan ont décidé de se défendre contre des attaques dans le cyberespace, tout comme ils le font contre les attaques lancées contre des cibles sur terre, en mer ou dans les airs », a encore fait valoir l’ancien Premier ministre norvégien.

Car, en effet, le prochain somment de l’Alliance, qui se tiendra à Varsovie les 8 et 9 juillet prochains, va désigner le cyberespace comme un théâtre d’opérations, au même titre que la terre, la mer, et les airs ou la terre. « La plupart des crises (sécuritaires) ont aujourd’hui une dimension relevant du cyberespace », a souligné M. Stoltenberg, lors d’une réunion des ministres de la Défense de l’Otan à Bruxelles. « Traiter le cyber comme un domaine opérationnel nous permettra de mieux protéger nos missions et nos opérations », a-t-il aussi déclaré.

Reste que, pour le moment, les États membres « sont et restent responsables de la sécurité de leurs réseaux de communication, qui doivent être compatibles avec ceux de l’Otan et entre eux. » Et l’organisation atlantique n’a pas de doctrine offensive pour le cyberespace, pas plus qu’elle n’a de capacités « cyber offensives ».

Aussi quelles conséquences aura cette décision? « À partir du moment où l’Otan reconnaît l’espace numérique comme un domaine opérationnel à part entière, cela va déclencher toute une succession de travaux entre militaires pour arriver à définir des processus communs. L’Otan devrait tenir, dans ce cadre-là, son rôle de magnifique machine d’interopérabilité en définissant les procédures permettant d’intégrer le combat numérique aux autres formes de combat », expliquait, rapporte BFM, le vice-amiral Arnaud Coustillière, en charge de la cyberdéfense à l’état-major des armées, lors de la conférence Cyberdef-Cybersec 2016.

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