Débat sur le rythme du retrait d’Afghanistan des troupes américaines

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Le président américain, Barack Obama, a justifié, le 23 mai, la frappe ayant tué le mollah Mansour, alors chef du mouvement taleb afghan en expliquant que ce dernier était un obstacle à la tenue de pourparlers de paix avec Kaboul et donc à la fin des violences.

« Les taliban devraient se saisir de cette occasion pour s’engager sur la seule voie véritable de nature à en finir avec ce long conflit: rejoindre le gouvernement afghan dans un processus de réconciliation qui mène à une paix et à une stabilité durables », a fait valoir M. Obama.

Pour ce dernier, ces négociations entre le gouvernement afghan et les taliban permettraient d’obtenir la fin des combats, ce qui l’autoriserait à retirer les troupes américaines d’Afghanistan, conformément à la promesse qu’il avait faite en 2008.

L’élimination du mollah Mansour, dans une région, le Balouchistan, jusque-là épargnée par les frappes des drones américains, est avant tout un message adressé aux taliban afghans afin de les inciter s’asseoir à la table des négociations. Va-t-il être reçu? Rien n’est moins sûr. D’ailleurs, quelques heures après l’annonce du nom de son nouveau chef, le mollah Akhundzada, la capitale afghane a été endeuillée, ce 25 mai, par une énième attaque suicide.

Aussi, à Washington, certains se disent dubitatifs sur les effets attendus de la mort du mollah Mansour, qui, pourtant, fut un temps favorable à des discussions avec le gouvernement afghan, avant de se raviser, sans doute, sous la pression de sa base. Qui plus est, les taliban ont gagné du terrain en Afghanistan (et continuent à en gagner), notamment dans le sud du pays.

Face à eux, les forces de sécurité afghanes sont à la peine et subissent de lourdes pertes. En outre, elles souffrent de déficits capacitaires, notamment dans le domaine de la logistique, du soutien sanitaire ou encore de l’appui aérien (les quelques Super A-29 Tucano qui leur ont été livrés sont encore insuffisants).

En février, le général John Nicholson, entendu par le Congrès alors qu’il venait d’être désigné pour commander les forces américaines et celles de l’Otan en Afghanistan [mission Resolute Support, dont la mission est de former et de soutenir l’armée afghane, ndlr], avait estimé qu’il fallait encore « des années » pour mettre les forces afghanes à niveau.

Actuellement, les effectifs militaires américains s’élèvent à 9.800 soldats alors qu’ils auraient dû être réduits à 5.600 cette année si le président Obama n’avait déjà pas décidé, en octobre 2015, de ralentir leur retrait en raison de la situation, marquée notamment, à l’époque, par la brève occupation de la ville de Kunduz (nord) par les insurgés.

Mais la question va à nouveau se poser en 2017. Le général Nicholson doit rendre une évaluation de la situation en juin prochain. Et, au Pentagone, on souhaiterait le statu-quo, c’est dire maintenir les effectifs à leur niveau actuel. Du moins, c’est ce qu’ont affirmé, à l’AFP, Anthony Cordesman du Center for Strategic and International Studies (CSIS) et Michael O’Hanlon, expert militaire à la Brookings Institution.

D’autant plus que, la réalité finissant toujours par s’imposer face aux déclarations toujours très optimistes, l’Otan a décidé, le 20 mai, de prolonger d’un an l’opération Resolute Support, alors qu’il était question de la transformer en mission civile si « la situation le permettait ». Et Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Alliance, d’expliquer : « Les forces afghanes font preuve d’un vrai courage et elles bénéficient de nos entraînements, conseils et assistance, mais l’Afghanistan continue d’affronter de graves défis sécuritaires. »

Par ailleurs, une autre question devra être tranchée rapidement : celle des règles d’engagement des forces américaines. La semaine passée, le général David Petraeus, ex-commandant de la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF), avait plaidé pour leur assouplissement, dans une tribune publiée par le Wall Street Journal.

Or, par exemple, l’aviation américaine n’est pour l’instant pas autorisée à fournir un appui aérien aux forces afghanes au contact avec les taliban sauf si ses propres troupes (ou celles de l’Otan au sens large) sont menacées…

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