L’infiltration de jihadistes parmi les migrants est une « préoccupation croissante » pour Interpol et Europol

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Il y a seulement encore quelques mois, l’hypothèse que des jihadistes puissent se mêler aux migrants pour venir en Europe semblait, aux yeux de certains observateurs, peu probable. Pourquoi, en effet, prendraient-ils le risque d’emprunter une route dangereuse pour arriver sur le Vieux Continent pour y commettre des attentats?

L’ex-juge antiterroriste Marc Trévidic (mais il n’était pas le seul) avait ainsi expliqué qu’une organisation comme l’État islamique (EI ou Daesh) n’avait pas « besoin techniquement » d’envoyer des « combattants » mélangés avec les migrants étant donné qu’elles disposaient d’éléments recruter en Europe. Seulement, les attentats de Paris et de Saint-Denis, commis le 13 novembre 2015, ont infirmé ce raisonnement de la plus tragique des manières…

D’ailleurs, il n’y avait pas de consensus sur cette question. En juillet 2015, Michele Coninsx, responsable de l’agence européenne de coopération judiciaire Eurojust, avait indiqué disposer d’informations sur des cas de jihadistes s’étant fait passer pour des réfugiés. « C’est une situation alarmante parce que nous voyons bien évidemment que des passeurs financent parfois le terrorisme et qu’il arrive qu’ils soient utilisés pour assurer des exfiltrations et des infiltrations de membres de l’État islamique « , avait-elle affirmé.

Et, depuis le 13 novembre dernier, ce qui n’était qu’une hypothèse, voire une crainte, est devenue une réalité d’autant plus préoccupante que l’EI, via sa branche libyenne, contrôle 400 km de littoral à deux pas de l’Europe. Et, pour Jean-Yves le Drian, le ministre français de la Défense, comme d’ailleurs pour les responsables de l’Otan, le risque de voir des jihadistes se mélanger aux migrants est maintenant un « risque majeur ».

Et cela est confirmé, s’il en était besoin, par un rapport [.pdf] publié conjointement le 17 mai par les deux organisations de coopération policière que sont Interpol et Europol.

Ainsi, selon le document, l’enventualité que des groupes terroristes puissent utiliser les filières d’immigration clandestine pour entrer en Europe et/ou financer leurs activités est une « préoccupation croissante ».

« Bien qu’un lien systématique entre le trafic de migrants et le terrorisme ne soit pas prouvé, il y a un risque accru de voir les combattants terroristes étrangers utiliser les flux migratoires pour entrer (ou revenir) dans l’Union européenne », souligne le rapport.

Pour le moment, selon les deux organisations policières, les relations entre les groupes terroristes et les réseaux de passeurs sont « opportunistes ».

« Les liens identifiés par Europol entre terrorisme et filières d’immigration clandestine consistent principalement dans l’utilisation opportuniste des réseaux et de la logistique des filières pour soutenir des activités liées au terrorisme », est-il en effet expliqué dans le rapport.

« Bien qu’Europol n’ait pas reçu de données concrètes suggérant que des groupes terroristes dépendent systématiquement ou coopèrent avec des groupes criminels pour leurs activités illicites, on ne peut pas négliger le fait que des terroristes puissent utiliser les ressources des passeurs pour atteindre leur but », ajoute le document.

Selon les chiffres avancés par le rapport, l’arrivée de 90% des migrants vers l’Union européenne a été facilitée, en 2015, par des groupes criminels, qui ont trouvé ainsi un moyen de diversifier leurs revenus. Au total, il est estimé que ces filières clandestines d’immigration leur ont rapporté, l’an passé, 5,3 milliards d’euros. Et cela, sachant qu’une personne voulant se rendre en Europe doit débourser entre 3.200 et 6.500 dollars.

 

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