Le livre du général Soubelet fait un tabac

Alors directeur des opérations et de l’emploi de la Gendarmerie nationale, le général Bertrand Soubelet fit parler de lui en décembre 2013 en déplorant une politique pénale qui « permet » aux « auteurs d’atteintes aux biens » de « continuer à exercer leurs activités ». Et d’insister : « Les gendarmes sont inquiets car on prend plus soin des auteurs (d’actes délictueux) que des victimes ».

Qu’un général de la Gendarmerie nationale critique la politique pénale du gouvernemenent ne pouvait que faire « tousser » en haut lieu. Et devait arriver ce qui arriva : le général Soubelet changea de fonctions : de numéro trois de la gendarmerie, il fut nommé commandant de la Gendarmerie d’outre-mer (CGOM). Et cela fut même présenté comme une promotion en raison du « prestige » de ce poste.

D’où le livre écrit par le général Soubelet, publié aux éditions Plon. Son titre, « Tout ce qu’il ne faut dire », en donne le ton. « Des pressions ont été exercées sur moi pour me faire quitter la gendarmerie qui a été ma vie pendant 35 ans. Désormais personne ne peut m’opposer un pseudo devoir de réserve », se justifie-t-il.

Et visiblement, le livre du général Soubelet est vite devenu un phénomène de librairie, en se classant second des meilleures ventes à la FNAC (et 4e chez Amazon). Selon Edistat, « Tout ce qu’il ne faut dire » est arrivé au 9e rang des ventes lors de la semaine du 21 au 27 mars. Et selon Plon, déjà 18.000 exemplaires ont été vendus, 20.000 autres sont en cours d’impression.

Il est rare de voir un ouvrage écrit par un militaire atteindre de tels niveaux. D’où la question : les gendarmes l’achètent-ils en masse? Son succès dépasse les rangs de la gendarmerie? Les deux?

En tout cas, le général Denis Favier, le directeur de la Gendarmerie nationale (DGGN) a une partie de la réponse. On sait qu’il n’avait que très peu apprécié l’initiative de son subordonné avec la publication de ce livre. « Vendre une polémique, instrumentaliser la gendarmerie et ceux qui la servent, c’est tout ce qu’il ne faut pas faire », avait-il écrit sur son blog.

Lors d’une audition à l’Assemblée nationale, dont le sujet était « le rôle de la gendarmerie nationale en matière de lutte contre le terrorisme et de sécurité du territoire national, le général Favier a été interrogé au sujet du général Soubelet par quelques députés.

« Pour ma part, je n’ai pas le temps d’écrire grand-chose d’autre que des notes opérationnelles… Je suis donc surpris qu’un général ‘quatre étoiles’ ait le temps d’écrire des livres », a commencé par répondre le général Favier.

« Le problème n’est pas la liberté d’expression c’est le devoir de réserve, qui s’impose particulièrement à un général de corps d’armée dans un contexte où le pays est en crise et où toutes les énergies doivent être orientées vers la gestion de cette crise », a poursuivi le DGGN.

Enfin, le général Favier a admis que les interventions du général Soubelet sont aujourd’hui « pondérées, mesurées » et qu’elles « ne comprennent pas d’attaque contre la politique du gouvernement actuel ou des gouvernements précédents ». Pour lui, il « s’agit de points de vue très généraux sur des sujets variés (…) qui n’apportent d’ailleurs rien de nouveau au débat public mais qui risquent en effet d’être instrumentalisés. » Et de conclure : « La parution de cet ouvrage ne suscite pas d’émotion particulière à l’intérieur de la gendarmerie. »

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