Le directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique insiste sur le risque d’attentat nucléaire

nuke-20140510Le rapport relatif à l’emploi des forces armées sur le territoire national, qui a fait l’objet d’un débat au Parlement la semaine passée, a évoqué, au chapitre des menaces terroristes, la capacité de Daesh (État islamique ou EI) de produire des agents toxiques chimiques, avant d’estimer « peu probable à ce stade » l’utilisation de tels produits pour une attaque en France.

Si ce document évoque une possible menace chimique, il ne dit en revanche pas grand chose sur le risque nucléaire, alors que ce dernier fait l’objet de sommets internationaux organisés tous les deux ans (le prochain devrait se tenir à Washington le 1er avril) afin de sécuriser les matériaux radioactifs et de renforcer la coopération en matière de sécurité dans ce domaine.

Cela étant, le directeur de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), Yukiya Amano, a insisté sur le risque de terrorisme nucléaire dans un entretien accordé à l’AFP, le 24 mars.

« Le terrorisme se répand et la possibilité que des matériaux nucléaires soient employés ne peut pas être exclu », a en effet affirmé M. Amano. « Les Etats membres doivent avoir un intérêt soutenu à renforcer la sécurité nucléaire », a-t-il insisté.

« En une vingtaine d’années, l’AIEA a recensé près de 2.800 cas de trafic, de détention illicite ou de perte de telles substances, dont un incident en Irak l’an passé. Et il est très possible que ce ne soit que la partie émergée de l’iceberg », a relevé M. Amato, pour qui « l’équivalent d’un pamplemousse de plutonium » suffirait à un groupe terroriste pour fabriquer une « une bombe atomique rudimentaire ». Et d’insister : ce « scénario n’est aujourd’hui pas impossible. »

Sur ce point, on peut être sceptique. Concevoir une bombe A, même rudimentaire, suppose de maîtriser des compétences rares (détonique, pour amorcer la réaction en chaîne, miniaturisation, etc….) ainsi que des moyens importants. Si c’était si simple, des États disposeraient déjà de telles armes.

Par ailleurs, il est toujours possible qu’un groupe terroriste mette la main sur une arme nucléaire, soit en l’achetant, soit en la volant. Si ce scénario a été développé dans certains romans d’espionnage (Tom Clancy, Stephen Coonts), sa mise en oeuvre paraît trop compliquée. Déjà, il faudrait pouvoir arriver à la transporter en toute discrétion vers le pays visé, ce qui n’est pas une mince affaire.

Aussi, la menace la plus probable est celui d’une « bombe sale » (ou radiologique), d’autant plus qu’une tentative d’attentat par ce moyen a déjà été déjouée en 2002, aux États-Unis, après l’arrestation de José Padilla.

« Plus simplement, une organisation comme le groupe Etat islamique pourrait aisément confectionner une bombe sale, qui répandrait des substances radioactives au moyen d’un explosif classique », a avancé le directeur de l’AIEA.

Des bombes radiologiques, a-t-il continué, « serait suffisantes pour (semer) la panique dans n’importe quelle grande ville dans le monde » et elles n’exigent pas « d’uranium enrichi ou de plutonium » mais des matériaux radioactifs utilisés à des fins médicales ou d’études dans les centres de recherche. Et là, quelques grammes, par exemple, de césium 137 peuvent suffire.

« Mais ce type de menace reste trop souvent sous-estimé par les Etats. Le plus gros problème provient des pays qui ne reconnaissent pas le danger que représente le terrorisme nucléaire », a déploré M. Amano.

Le fait est : un amendement à la Convention sur la protection physique des matières et des installations nucléaires n’est toujours pas entré en vigueur, 11 ans après sa signature. Ce qui constitue le « maillon le plus faible » en matière de sécurité nucléaire, a expliqué le directeur de l’AIEA.

D’autant plus qu’un autre risque ne peut pas être ignoré : celui d’une attaque contre une centrale nucléaire. Le survol, par des mini-drones non-identifiés, d’infrastructures françaises a soulevé cette question pendant un temps (le sujet a depuis été « évacué » par les médias). De même que des vidéos sur les mouvements d’un responsable de l’industrie nucléaire belge par des jihadistes de l’État islamique, découverte lors de perquisitions menées à la suite des attentats de Paris.

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