Le parc de véhicules P4 de l’armée de Terre fond à vue d’oeil

Patrouille SRR du 27°BCA / CEA 3°REI au Centre Spatial Guyannais.

L’an passé, une polémique éclata lorsque l’armée de Terre confirma sa décision d’acquérir un millier de véhicules 4×4 Ford Ranger. Ce choix, selon ses détracteurs, allait porter atteinte aux intérêts industriels français étant donné qu’il fut fait aux dépens du Berlingo de Citroën (fabriqué en Espagne) et du Dacia Duster (groupe Renault).

Plus tard, en octobre, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian allait même jusqu’à déclarer que le choix du Ford Ranger lui restait « en travers de la gorge ». Et d’ajouter : « J’ai appris cette information dans le journal et j’ai fait en sorte que l’on revoie les procédures afin de ne plus connaître ce genre de mésaventure ».

Lors d’une audition devant les députés de la commission de la Défense, le général Charles Beaudouin, directeur de la section technique de l’armée de terre (STAT), est revenu sur cette polémique.

Initialement, il était prévu de remplacer l’ensemble des véhicules légers tactique tout-terrain (VLTT) Peugeot P4 par des véhicules légers tactiques polyvalents (VLTP) non protégés. Or, a expliqué le général Beaudouin, ce programme « a été reporté brutalement de 2014 à 2020 ».

Et cela, alors que les véhicules P4 ont été mis en service depuis plus de 35 ans et qu’ils ont donc « connu de multiples conducteurs, dont des appelés des années 1980-1990. » Aussi, les maintenir en état de rouler finit par coûter très cher…

« Le parc est en train de s’éffondrer progressivement : le nombre de véhicules disponibles est inférieur à 2.500 et il continue de baisser à un rythme de plusieurs centaines par an », a fait valoir le directeur de la STAT. D’où la décision d’acquérir des Ford Ranger car sinon les régiments n’auraient plus eu « les moyens de se déplacer, par exemple pour aller au champ de tir avec des cibles à l’arrière du P4 ».

Pour cette acquisition, l’état-major de l’armée de Terre (EMAT) s’est tourné vers l’Union des groupements d’achats publics (UGAP) et a donc choisi le Ford Ranger à l’instar, a souligné le général Beaudouin, de « la DGA, de mairies ou des pompiers. »

« C’était le seul moyen apte à répondre au besoin exprimé : un véhicule qui puisse emporter une tonne de charge utile, en comptant le poids des hommes – avec quatre gaillards de cent kilos équipés, il reste 600 kg », a expliqué le général Beaudouin, pour qui il est évident que le Dacia Duster « ne pouvait pas répondre à ce besoin » puisqu’il ne lui resterait qu’une capacité d’emport de 150 kg dans « un coffre tout petit ».

« Le seul véhicule possible était ce véhicule acheté au titre du marché interministériel, le Ford Ranger, au prix particulièrement compétitif de 26.000 euros pièce », a insisté le directeur de la STAT.

Quant à la polémique sur ce choix, le général Beaudoin a remis les choses au clair. « Il n’y a plus de fabricants de ce type de véhicule 4X4 en France. » Qui plus est, il a, a-t-il affirmé, « pressé RTD de présenter le Nissan Navara », un modèle équivalent au Ford Ranger. « Nissan, c’est Renault en quelque sorte, mais ils n’ont pas donné suite », a-t-il affirmé. Sauf que Renault Trucks Defense fait partie du groupe Volvo… (*)

Quoi qu’il en soit, l’achat de Ford Ranger étant une « rustine », le programme VLTT non protégé est urgent et il « convient de le lancer au plus vite », a prévenu le général Beaudouin. « Des premières livraisons sont nécessaires en 2018 », a-t-il dit.

« J’ai alerté les industriels français pour qu’ils présentent sans tarder des solutions. Cela étant, nous ne faisons que constater les choix de l’industrie automobile : nous n’avons pas de possibilité d’acheter des 4X4 non blindés à capacité d’emport importante de fabrication entièrement française », a conclu le directeur de la STAT sur ce sujet.

(*) Le général Beaudouin a dû faire référence à l’ALTV d’ACMAT, filiale de RTD. Ce véhicule a en effet été conçu sur la base du Nissan Navara.

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