La Russie dément toute responsabilité dans le bombardement d’hôpitaux en Syrie

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Le 15 février, près de 50 personnes, dont des enfants, ont été tuées à Alep et Idlib (nord de la Syrie) par des bombardements ayant visé « au moins » cinq établissement médicaux et deux écoles. Pour le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, il s’agit de « violations flagrantes du droit internatonal ».

Le fait est. Pour le coup, le caractère systématique de ces frappes exclut tout « dommage collatéral ». D’ailleurs, l’attaque de l’hôpital géré par Médecins sans Frontières (MSF) à Maarat al-Noomane, le démontre.

Dans son communiqué, l’ONG parle de « deux séries » de bombardements menés à « quelques minutes d’intervalle » avec des roquettes contre cet établissement dont le service de consultations externes accueillait, chaque mois, environ 1.500 patients et qui assurait 140 opérations de chirurgie orthopédique dans ses blocs opératoires.

Pour les puissances occidentales, la responsabilité du régime syrien et de ses alliés (dont la Russie, dont l’aviation mène des opérations aériennes dans la région depuis le 30 septembre dernier) dans ces attaques ne fait pas de doute.

Le nouveau ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a ainsi parlé de « crimes de guerre » tandis que Washington a dénoncé la « brutalité » du régime de Bachar el-Assad et mis « en doute la volonté et/ou la capacité de la Russie à aider à l’arrêter. »

À Moscou, l’on a réfuté toute responsabilité dans ces dernières frappes ayant touché des hôpitaux et des écoles. « Nous rejetons formellement de telles déclarations que nous n’acceptons pas », a affirmé Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin. « Les gens qui font de telles déclarations sont chaque fois incapables de les prouver »,  a-t-il ajouté, en suggérant une implication… américaine.

Pour M. Peskov, il faut en effet « remonter à la source originale et pour nous dans ce cas, la source première d’informations sont les représentants officiels syriens », lesquels « ont fait un certain nombre de déclarations aujourd’hui sur ce sujet, où ils ont réitéré leurs positions sur qui pourrait être derrière ces bombardements ».

Or, Riad Haddad, l’ambassadeur syrien à Moscou a accusé l’aviation américaine d’avoir « détruit » l’hôpital de MSF dans la région d’Idleb tout en affirmant que les « renseignements recueillis » exonéraient les bombardiers russes. Et d’avancer que les accusations de Washington sont « une manifestation de la guerre de l’information qui a commencé dès les premiers jours du conflit en Syrie. » Mais, au passage, qui a alors bombardé les autres établissements?

En matière de guerre de l’information, le ministère russe de la Défense a cherché à faire porter le chapeau à des avions d’attaque A-10 Thunderbolt II américains pour des frappes contre un autre hôpital, à Alep, le 10 février dernier. Problème : ce jour-là, aucun de ces appareils n’a décollé de leur base d’Incirlik, en Turquie, pour des missions dans cette région…

Cela étant, les équipages américains, comme ceux de la coalition anti-Daesh en général, suivent des règles d’engagement très strict pour éviter tout dommage collatéral. Cela n’empêche toutefois pas les erreurs mais chaque incident fait l’objet d’une enquête, pouvant déboucher sur des sanctions en cas de manquement.

« Chaque fois que nous obtenons une information sur un possible incident ayant entraîné des victimes civiles, nous vérifions toujours la crédibilité de l’information », avait récemment expliqué le colonel Steve Warren, un porte-parole de la coalition anti-Daesh.  « Si l’information s’avère crédible, nous conduisons une enquête et nous publions ses résultats », avait-il ajouté. Comme cela a été le cas avec des frappes américaines contre un hôpital de MSF à Kunduz (Afghanistan), l’automne dernier [cela dit, l’ONG n’a pas été satisfaite de la procédure…, ndlr]

Quoi qu’il en soit, une chose est certaine : les hôpitaux sont particulièrement touchés par les combats en Syrie. Entre mars 2011 et novembre 2015, au moins 329 attaques contre des établissements médicaux et leurs personnels (en particulier à Alep) ont été constatées par l’ONG Physicians for Human Rights, qui accuse le régime syrien de les viser délibérément (90% des cas).

Quelques jours après la publication de ce rapport [.pdf], un hôpital soutenu par MSF à Homs a été détruit par un « bombardement à double impact« , c’est-à-dire « un bombardement qui vient toucher les personnes venues sauver les victimes d’une première attaque ou bien un bombardement qui touche un hôpital où sont acheminées les victimes d’une première attaque », avait expliqué, à l’époque, Brice de la Vingne, le chef des opérations de MSF. « Cette tactique à double impact montre un niveau de destruction calculé que l’on peut à peine imaginer », avait-il dénoncé.

Cette attaque avait été commise avec des barils d’explosifs, lancés depuis un hélicoptère. Il s’agit d’un mode opératoire devenu classique au sein des forces syriennes…

Au cours des six première semaines de 2016, pas moins de 17 établissements ont été bombardés, selon les chiffres donnés par le président de MSF France, Mego Terzian, au quotidien Le Monde, dont 5 gérés par l’ONG qu’il dirige.

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