Comment les légionnaires ont mené la vie dure aux orpailleurs clandestins en Guyane

harpie-20160119Cela fait des années que la Guyane est confrontée au phénomène de l’orpaillage illégal, dû à essentiellement à la présence de chercheurs d’or brésiliens (encore appelés Garimpeiros) qui n’ont pas la réputation d’être des tendres.

Cet orpaillage illégal ne va pas sans poser de graves problèmes : il est à l’origine d’un taux de criminalité élevé et il dégrade l’environnement, du mercure étant utilisé pour amalgamer l’or. Malgré le lancement de la mission Harpie, en février 2008, cette exploitation illégale des ressources aurifères guyanaises n’a jamais cessé.

Sans doute que la dernière opération menée par les Forces armées en Guyane (FAG), appelée Yawasisi, aura contribué à réduire durablement ce phénomène. En tout cas, elle illustre parfaitement la complémentarité entre les forces armées et l’ensemble des services de l’État (gendarmerie, police aux frontières, douanes, etc…).

Cette opération, menée entre octobre et décembre 2015, avait 3 objectifs : destruction des sites d’orpaillage illégaux, perturber et rompre les flux logistiques des garempeiros, dissuader ces derniers de rester sur zone.

Sur le plan militaire, l’opération Yawasisi a mobilisé 390 personnels des FAG et 65 gendarmes. Un compte-rendu vient d’être publié par le 3e Régiment Étranger d’Infanterie (REI), qui y a pris une part prépondérante, tout comme les sapeurs du 2e Régiment Étranger de Génie.

Tout a commencé à la fin du mois d’août, par des patrouilles effectuées par la 3e compagnie du 3e REI dans la région du barrage de Petit Saut à Saül. Pendant deux semaines, les légionnaires ont ainsi, en appui des gendarmes, effectué de nombreuses reconnaissances ainsi que des « actions de destruction ».

Le bilan est alors éloquent puisqu’il a été détruit ou saisi 500 kg de nourriture, 6 groupes électrogènes, 1.000 litres de carburant, 10 moteurs, 4 tables de levée, une pirogue et 3 quads. À cela, il faut bien évidemment ajouter les informations recueillies sur les chantiers majeurs d’orpaillage clandestin, lesquelles serviront à planifier l’opération Yawasisi.

La phase 1 de cette dernière a donc débuté au début du mois d’octobre, avec la 2e compagnie du 3e REI. Là, en 4 semaines, les 4 sections de légionnaires déployées sur des bases opérationnelles avancées (BOA) situées à Camopi et à Saint-Georges, n’ont pas chômé : sur la base des informations précédemment obtenues, 50 tonnes de matériels et de vivre ont en effet été saisie ou détruites par les gendarmes.

« La durée de cette première phase, couplée à son important bilan, aura eu un effet dévastateur sur le moral et la capacité de production des garimpeiros », note le compte-rendu du 3e REI.

D’autant plus que la phase 2 est lancée dans la foulée, avec cette fois la 3e compagnie du régiment. Sa mission est de faire du contrôle de zone dans des secteurs déjà fouillés afin d’empêcher les garimpeiros de se réinstaller et de reprendre leurs activités. Ces derniers, éprouvant déjà des difficultés à se ravitailler, ont le moral en berne. Et il le sera davantage quand ils réaliseront que les légionnaires vont s’éterniser dans la région où ils exploitaient l’or illégalement.

« Les écoutes menées sur leurs communications confirment leur abattement lorsqu’ils réalisent que les légionnaires sont déterminés à rester », peut-on en effet lire dans le compte-rendu du 3e REI.

Dans le même temps, la section d’aide à l’engagement débarqué (SAED) du régiment multiplie les opérations « coup de poing » ans les endroits les plus inaccessibles grâce aux hélicoptères de l’’escadron de transport 68 « Antilles Guyane » de l’armée de l’Air. « Le potentiel aéronautique étant compté, la priorité fut ainsi donnée à l’effet de surprise qu’apportent les mises en place par voie aérienne », explique le 3e REI.

La reprise de l’orpaillage illégal ayant été ainsi empêchée, la phase 3, qui a pris fin le 8 décembre, a consisté à maintenir une présence régulière sur les sites d’exploitation pour s’assurer du départ effectif des garimpeiros.

Au total, l’opération Yawasisi a permis de contrôler 250 chantiers d’orpaillage sur les 400 répertoriés par les FAG et l’Office national des forêts. Neuf puis d’extraction primaire, une vingtaine de concasseurs et une centaine de motopompes et de tables de levées ont été détruits tandis que les gendarmes ont saisi 32 pirogues, 15 tonnes de nourritures, 43 quads et 28.000 litres de carburant. En outre, 159 étrangers ont été contrôlés en situation illégale et 87 d’entre eux ont été reconduits à la frontière.

« Je pense que l’on a fait mal. Au moment où l’on s’attaque aux flux logistiques, fatalement cela a un impact sur le moral des hommes qui travaillent sur les sites. On se rend compte que la taille des sites a fortement diminués (…) on était sur des sites de 2000 hommes il y encore 4 ans. Aujourd’hui, on est sur des sites de moins de 50 hommes (…) on se retrouve avec un coup de l’extraction de l’or qui n’est plus rentable », a commenté le général Pierre-Jean Dupond, le commandant des FAG.

Cela étant, si elle méné la vie dure aux garimpeiros, cette opération a aussi été difficile pour les légionnaires, qui ont dû « durer » dans un environnement qui n’a rien à voir avec la forêt de Rambouillet. En effet, les conditions de vie et d’hygiène ont été éprouvantes, au point que plusieurs cas de paludisme ont été déplorés. Et c’est sans compter sur les difficultés du terrain, très accidenté, ce qui obligé les militaires du 3e REI a parcourir près de 2.000 mètres de dénivelé positif en une seule journée.

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