Le successeur de Louvois replacera « l’homme au coeur du système »

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Le Logiciel unique à vocation interarmées de la solde (Louvois) n’a cessé d’être la source d’innombrables dysfonctionnements dans le paiement des soldes dues aux militaires de l’armée de Terre, de la Marine nationale et du Service de Santé des armées depuis son entrée en service, en 2011. Et, la dissolution, dans le même temps, des  Centres territoriaux d’administration et de comptabilité (CTAC) n’a évidemment pas arrangé la situation.

En septembre 2012, le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a pris plusieurs mesures quand il s’est rendu compte de l’ampleur du désastre, avec la mise en place d’un dispositif d’avances pour payer les militaires qui ne l’avaient pas été correctement, la création d’une cellule d’assistance pour apporter des réponses aux problèmes financiers causés par les erreurs de Louvois, le déploiement de spécialistes dans les bases de défense pour accélérer la correction des dysfonctionnements, le renforcement des effectifs du Centre expert ressources humaines – soldes (CRH-S) de Nancy, l’appel à des réservistes fiscalistes et, enfin, l’installation d’une « groupe utilisateurs soldes ».

Depuis l’entrée en vigueur de ces mesures, la cellule d’asssistance a reçu 154.506 appels et 38.500 courriels, ce qui a donné lieu à l’ouverture de 30.000 dossiers (600 restent encore à instruire à ce jour). En outre, 27.500 avances de soldes, à hauteur de 53,5 millions d’euros ont été versées et, en novembre 2015, le montant des trop-versés régularisés (ou en passe de l’être) s’élevait à 363,2 millions d’euros.

Selon le ministère de la Défense, ces efforts ont permis une « amélioration significative de la qualité des soldes ». Ainsi, en novembre 2015, précise-t-il, 91% des militaires ont été « soldés » par Louvois sans anomalie, 8% l’ont été après une régularisation avant le versement de leur salaire et « seuls 1% ont été payés partiellement ou totalement hors Louvois ».

Pour autant, comme l’a souligné M. Le Drian lors d’une conférence de presse donnée le 15 janvier, « la situation n’est pas encore totalement résolue ». En effet, a-t-il continué, « ma rencontre tout à l’heure avec le groupe utilisateurs, si elle a confirmé la nette amélioration de la situation, a illustré également la grande fragilité du système. »

Et d’expliquer : « Si nous pensons en avoir désormais maitrisé les causes, et les effets, la vigilance doit rester de mise. De même, chaque calcul rétroactif génère des désordres considérables dans le système. Enfin, les évolutions apportées à Louvois risquent à tout moment d’entrainer de nouveaux dysfonctionnements, du fait de son instabilité. »

Pourtant, il faudra continuer à faire avec, le temps d’attendre la mise en service du logiciel Source Solde, qui succédera à Louvois, dont l’abandon a été annoncé par le ministre en décembre 2013.

Afin d’éviter un nouveau « désastre », il a été décidé de conduire le développement de ce nouveau logiciel comme un programme d’armement, étant donné que la Direction générale de l’armement (DGA) a les compétences et le savoir-faire nécessaire en matière de systèmes complexes et de gestion des risques.

Et  c’est ainsi que ce projet a été confié à Mme l’ingénieur général de l’armement (IGA) Caroline Gervais, qui dirige une équipe réunissant de nombreux experts (industriels, ingénieurs systèmes, juristes, spécialistes de la paie) ainsi que des utilisateurs, lesquels sont « associés à toutes les phases, de la conception à la qualification ».

Au total, 200 ateliers ont été mis en place afin de préparer la phase de codage du logiciel, laquelle a été confiée, à l’issue d’un « dialogue compétitif », en avril 2015, à Sopra-Steria pour 128 millions d’euros. Ce prestataire a proposé un système basé sur une solution éprouvée, à savoir HR Access.

L’un des axes de ce travail préparatoire, essentiel quand l’on connaît l’extraordinaire complexité du système de solde, a été de replacer « l’homme au coeur du système ». « Les outils mis à disposition par le programme Source Solde doivent être compréhensibles et utilisables facilement, aussi bien par les gestionnaires de la paie que par les militaires payés », explique-t-on au ministère de la Défense.

Pour les militaires, cela passera passera par un bulletin de solde plus lisible, afin de leur permettre de mieux comprendre la composition de leur rémunération, ainsi que par un accès à leur dossier, via un portail disponible via intradef . Il leur sera possible, en cas de souci, de dialoguer directement avec les gestionnaires.

Quant à ces derniers, ils devraient disposer d’une outil à la fois plus simple et plus complet qui leur permettra d’effectuer des contrôles avant le calcul des soldes. « C’est une amélioration fondamentale par rapport à la situation actuelle, où les contrôles sont réalisés en fin de calcul de solde », souligne le ministère de la Défense.

Qui plus est, le nouveau logiciel proposera un « tableau de bord » qui permettra de repérer plus rapidement les anomalies et donc d’effectuer les corrections nécessaires avant le paiement des soldes.

« Le nouveau logiciel ne peut pas s’accommoder du moindre flou ; tout doit donc être explicité dans les moindres détails », a fait valoir M. Le Drian. « Je suis particulièrement impressionné par ce qui nous a été présenté. La solde semble devenir particulièrement lisible; les usagers peuvent avoir accès très rapidement à l’ensemble de leurs données personnelles; le dialogue administré/gestionnaire semble d’une efficacité redoutable, le système paraît nettement plus robuste », a-t-il ajouté.

« L’enjeu, c’est aussi de retrouver ce lien humain, qui s’était perdu dans le précédent système, et que nous retrouvons ici avec ce contact entre le soldat et le soldier », a encore estimé le ministre.

Selon le calendrier établi, la période de qualification de Source Solde commencera à la fin du premier trimestre 2016. Elle sera suivie, dès l’été, par une phase dite de « solde à blanc » qui durera 7 mois. Puis, si tout se passe bien, la Marine nationale commencera à l’utiliser (les soldes seront alors éditées en double). Suivront ensuite l’armée de Terre (en 2018), l’armée de l’Air et le Service de Santé des Armées (en 2019).

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