M. Le Drian met un bémol à une possible intervention militaire en Libye

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Lors d’un entretien accordé à RTL, au lendemain de sa victoire aux élections régionales en Bretagne, Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, a confirmé la progression de l’État islamique (EI ou Daesh) en Libye.

« Ils sont à Syrte, ils étendent leur territoire sur 250 kilomètres linéaires de côte, mais ils commencent à pénétrer vers l’intérieur et à avoir (une) tentation d’accès à des puits de pétrole et des réserves de pétrole », a en effet affirmé M. Le Drian au sujet de la branche libyenne de Daesh.

Depuis quelques temps, l’organisation jihadiste tente de s’enraciner en Libye, en cherchant à nouer des alliances avec des tribus locales, dont certaines peuvent être perméables à son discours.

En outre, son objectif affiché est de faire main basse sur le croissant pétrolier libyen. Actuellement, et à cette fin, ses combattants, qui comptent dans leurs rangs de plus en plus de « vétérans » de Syrie et d’Irak, progressent en direction d’Ajdabiya, localités située à 350 km de Syrte et à 200 km au sud de Benghazi.

Qui plus est, le 11 décembre, l’EI a fait une démonstration de force avec une trentaine de véhicules armés de mitrailleurses lourdes dans la cité antique de Sabratha, à seulement 70 km de Tripoli.

Cette progression de l’EI est facilitée par les luttes internes libyennes, c’est à dire entre le gouvernement installé à Tripoli et celui, reconnu par la communauté internationale, replié à Tobrouk. Et tout l’enjeu des discussions menées en ce moment sous l’égide des Nations unies est d’arriver à la formation d’un gouvernement d’union nationale.

Cela étant, les choses semblent aller dans le bon sens. À l’issue d’une conférence sur la Libye organisée à Rome, le 13 décembre, la communauté internationale a apporté son soutien « unanime » à un accord politique d’union nationale, qui doit être signé dans les prochains jours à Skhirat au Maroc, par les deux Parlements libyens, à savoir le Congrés national de Tripoli (ndlr, majoritairement islamiste) et la Chambre des représentants de Tobrouk (élue en juin 2014).

« Il faut absolument que cessent les conflits intralibyens sinon le vainqueur militaire ce sera Daesh », a ainsi estimé M. Le Drian, sur les ondes de RTL.

« Heureusement, cette prise de conscience commence à se faire à la fois du côté de Tripoli et du côté de Tobrouk et on peut penser que les discussions qui sont en cours à la fois sous l’autorité de Martin Kobler, l’envoyé spécial des Nations unies, et dans les réunions de Rome, y compris ce week-end, vont aboutir à une solution politique », a-t-il ajouté.

Alors que, le 11 décembre, le Premier ministre, Manuel Valls, a succintement évoqué une possible intervention en Libye pour « écraser » Daesh, M. Le Drian a écarté cette option, estimant qu' »il n’y a pas de solution » autre qu’une « solution politique (…) entre les différents clans, les différentes factions qui aujourd’hui s’opposent en Libye ».  Et d’ajouter que les Libyens ont « eux-mêmes les moyens militaires entre eux pour enrayer la progression de Daesh donc il faut qu’ils s’unissent politiquement. »

Cela fait maintenant des mois que M. Le Drian a alerté sur les conséquences que pouvaient avoir la situation libyenne sur la menace terroriste. Outre l’EI, d’autres organisations jihadistes ont installé des camps d’entraînement dans le sud du pays, qu’il a avait qualifié de « nid de vipères ».

Quant à savoir si les Libyens ont les moyens militaires de s’opposer à Daesh, rien n’est moins sûr. En effet, depuis mai 2014, le général Khalifa Haftar, soutien des autorités de Tobrouk, a lancé l’opération Dignité, afin de chasser les jihadistes de la région de Benghazi… Or, les résultats se font toujours attendre.

Un autre problème pour les forces libyennes est l’embargo sur les armes qui frappe leur pays. Le gouvernement de Tobrouk en a demandé la levée à plusieurs reprises… Sans succès pour le moment.

Et les moyens aériens sont très limités, dans la mesure où les appareils hérités de la période Kadhafi n’ont pas pu être entretenus. Ainsi, dans un récent rapport parlementaire, il est précisé que les forces placées sous l’autorité du gouvernement de Tobrouk disposent de deux appareils en état de vol…. « L’armée ne peut pas combattre le terrorisme sans des ressources suffisantes et des sources légales d’armes et de munitions », a encore plaidé, il y a quelques jours, Ibrahim Dabbashi, l’ambassadeur libyen auprès des Nations unies.

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