M. Valls évoque une possible intervention militaire française en Libye


Manuel Valls : "Combattre Daech demain sans… par franceinter

Le 16 décembre prochain, si rien ne change d’ici là, les deux Parlements rivaux libyens signeront un accord parrainé par les Nations unies afin de former un gouvernement d’union nationale. Cela serait ainsi une première étape vers un front commun contre le groupe État islamique (EI ou Daesh) qui, au cours de ces derniers mois, a profité du chaos ambiant pour accroître son influence et surtout des gains territoriaux en Libye.

À l’heure actuelle, Daesh contrôle la ville de Syrte ainsi qu’au moins 200 km du littoral libyen. Selon la stratégie qu’il a appliquée en Irak et en Syrie, l’EI cherche dans le même temps à mettre la main sur les installations pétrolières. Déjà, il a conquis le champ pétrolier d’al-Mabrouk.

En outre, pour asseoir son influence, et comme l’a fait al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) dans la bande sahélo-saharienne, l’EI tente de nouer des alliances avec les tribus locales, dont certaines ne sont pas insensibles à son discours. C’est le cas à Benghazi, Syrte et Derna mais aussi dans le sud, où ses émissaires auraient établi des contacts avec les tribus Toubou et Touareg.

Pour compléter ce tableau, et c’est sans doute l’une des conséquences de l’intensification des frappes en Syrie et en Irak, il a été constaté un afflux de combattants de l’EI en Libye. Ces derniers sont, pour l’essentiel, originaires du Maghreb.

Si rien n’est fait, alors l’EI serait en mesure de se servir du territoire libyen pour déstabiliser les pays frontaliers (Niger, Tchad, Égypte, Tunisie et Algérie) et de faire la jonction avec le groupe nigérian Boko Haram, qui lui a fait allégeance. Et le Mali pourrait fort bien se trouver dans sa ligne de mire, bien que d’autres groupes (AQMI, Ansar Dine et ses satellites) y soient déjà présents.

Alors qu’il était l’invité de la matinale de France Inter, ce 11 décembre, pour évoquer le second tour des élections régionales, le Premier ministre, Manuel Valls, n’a pas écarté l’hypothèse d’une nouvelle intervention militaire en Libye.

« Nous sommes en guerre, nous avons un ennemi, Daesh, que nous devons combattre et écraser, en Syrie, en Irak et demain sans doute en Libye », a ainsi lâché le chef du gouvernement. « Parce que nous avons des centaines, des milliers de jeunes qui ont succombé dans cette radicalisation », a-t-il ajouté, avant de rappeler que la « menace » terroriste reste « toujours présente ».

C’est la première fois que M. Valls, au détour d’un entretien, évoque une possible intervention militaire en Libye. Il y a quelques jours, il avait affirmé que la situation libyenne était « incontestablement le grand dossier des mois qui viennent ».

Pour rappel, des appareils du porte-avions Charles de Gaulle ont mené des missions de renseignement dans l’est de la Libye lorsque le groupe aéronaval s’était déployé en Méditerranée orientale. La situation est aussi observée de près par les forces américaines. Ces dernières ont d’ailleurs effectué deux raids aériens en Libye, l’un ayant ciblé Mokhtar Belmokhtar, le chef d’al-Mourabitoune, désormais rallié à AQMI, l’autre ayant très probablement éliminé Abou Nabil, le plus haut responsable de la branche libyenne de l’EI.

Cela étant, un rapport récemment adopté par la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale a émis de grandes réserves au sujet d’une nouvelle intervention militaire en Libye, au motif qu’elle n’aurait pas le feu vert du Conseil de sécurité des Nations unies (forte chance d’un veto russe ou chinois) et qu’elle exigerait l’envoi de troupes au sol. Sans oublier la réaction des pays voisins, comme l’Algérie et la Tunisie, qui craindraient des représailles sur leur territoire.

« Il faut mesurer les conséquences d’une intervention aujourd’hui sur la situation intérieure : le pays est en situation de conflit, une intervention armée pourrait avoir pour conséquence de polariser un peu plus le jeu politique, de ruiner le fruit des efforts de l’ONU, d’être accusés de prendre partie en faveur d’un camp ou de l’autre », peut-on lire dans ce rapport.

Toutefois, le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, partisan d’une intervention militaire, a estimé, le 8 décembre, que « ne pas faire face à la situation en Libye conduirait à de nouveaux dangers dans la région ».

Soulignant les efforts de son gouvernement pour contrôler la frontière terrestre avec la Libye, le président al-Sissi a affirmé que son pays « a besoin du soutien de l’Europe et d’autres pays intéressés par la stabilité de la région car une « mobilisation internationale est nécessaire pour stopper le trafic d’armes et sécuriser les frontières terrestres et maritimes » libyennes.

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