En 18 mois, jusqu’à 31.000 combattants étrangers ont été recrutés par des groupes jihadistes en Syrie

Il est toujours très compliqué d’avoir une idée exacte des effectifs de Daesh (État islamique ou EI), les estimation allant du simple au double, voire même au triple. Entre les pertes que l’organisation jihadiste subit, son recrutement dans les territoires qu’elle contrôle et l’apport des combattants venus de l’étranger, il n’est en effet pas simple de s’y retrouver.

Toutefois, certains s’y emploient, comme le Soufan Group, un institut américain spécialisé dans le domaine du renseignement, qui a compilé des données fournies par les gouvernements, les organisations internationales et les centres de recherche.

Ainsi, selon un rapport qu’il vient de rendre public, il estime qu’entre 27.000 et 31.000 jihadistes originaires de 86 pays ont rejoint la Syrie et l’Irak en un an et demi.

Et cela, souligne le Soufan Group, « malgré les efforts internationaux pour contenir le groupe Etat islamique (EI) et réduire le flot de militants voyageant vers la Syrie. »

Le principal bénéficiaire de cet afflux de jihadistes étrangers est l’État islamique. Son « succès dépasse les rêves des autres groupes terroristes, qui apparaissent maintenant désuets, comme al-Qaïda. Il a encouragé des dizaines de milliers de jihadistes à rejoindre ses rangs et inspiré d’autres à devenir sympathisants », a commenté Richard Barrett, ancien directeur de la lutte contre le terrorisme au MI6 [Renseignement extérieur du Royaum-Uni] et désormais vice-président du Soufan Group.

L’EI recrute principalement dans les pays du Moyen-Orient et du Maghreb, avec respectivement 8.240 et 8.000 combattants. Le royaume saoudien (2.500 jihadistes) et la Tunisie (6.000) sont les plus concernées. Le nombre d’Européens enrôlés par Daesh serait de l’ordre de 5.000, dont 3.700 venus de 4 pays (France, Grande-Bretagne, Belgique et Allemagne).

Mais le Soufan Group observe une forte augmentation (+300%) des recrues originaires de Russie (en particulier du Caucase) et d’Asie centrale. Enfin, il y aurait aussi 2.100 ressortissants turcs dans les rangs de Daesh.

Le retour de ces jihadistes dans leur pays d’origine sera le défi qu’il faudra relever à l’avenir. « Même si l’Etat islamique est une entreprise en difficulté et en déclin constant, elle sera en mesure d’influencer les actes de ses membres, et pourrait devenir plus dangereuse à mesure qu’elle s’éteindra », estime Richard Barrett. Le fait est. Au moins trois terroristes impliqués dans les attentats de Paris et de Saint-Denis, le 13 novembre, avaient voyagé en Syrie.

« Si la perception d’une population est un abandon de territoire par le groupe, alors il existe le risque que ce groupe devienne plus cruel » en retour, explique Matthew Henman, du centre de réflexion londonien IHS Jane’s, interrogé par l’AFP. « Et il y a aussi la possibilité d’un effort accru pour renvoyer des combattants étrangers dans leur pays d’origine pour des opérations de représailles », a-t-il ajouté.

« Rien qu’avec les flux actuels, les quelque 250 qui sont rentrés, c’est compliqué », a avancé un responsable français de l’antiterrorisme. « La quasi-totalité est immédiatement auditionnée » et traduite en justice, a-t-il continué. « Mais, au moins pour ceux dont la justice ne pourra pas prouver qu’ils ont du sang sur les mains, les peines de prison seront de l’ordre de sept à dix ans », a-t-il poursuivi. Ce qui veut dire que « dans quatre/cinq ans, les premiers sont dehors ».

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