Les membres de l’UE ont approuvé la demande d’aide militaire de la France… Et après?

Quand le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a fait valoir, le 17 novembre, l’article 42-7 du Traité de l’Union européenne pour obtenir une aide militaire de la part des pays membres, ces derniers, au vu du contexte, ne pouvaient pas se dérober. C’est ainsi qu’ils ont, à l’unanimité, approuvé la requête française.

L’article en question ne souffre pas la moindre ambiguité : « Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l’article 51 de la charte des Nations unies », dit-il.

Le ministre français n’est pas allé aussi loin que ce que lui permettait ce texte. « La France souhaite demander à ses partenaires européens leur appui – à titre bilatéral – dans la mesure de leurs moyens, dans la lutte contre Daesh (État islamique ou EI) en Irak et en Syrie, et une participation militaire accrue de la part des Etats membres dans les théâtres d’opérations où la France est déployée », a-t-il dit.

Il ne s’agit donc pas d’une aide « par tous les moyens en leur pouvoir » mais d’un appui « dans la mesure de leurs moyens », ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

Cela étant, cet article 42-7 n’est pas contraignant pour 5 pays membres (Irlande, Suède, Finlande, Autriche et Malte) en raison de leur « politique de sécurité et de défense spécifique », c’est à dire de leur neutralité. Déjà, Helsinki a fait savoir que ses forces armées ne pouvaient être engagées sur un théâtre d’opérations extérieur.

Quant aux autres États membres de l’UE, la nature de l’aide qu’ils apporteront reste à préciser. Pour le moment, le Royaume-Uni et la Begique ont répondu présents, avec l’envoi – prévu – de frégates pour accompagner le porte-avions Charles de Gaulle dans le cadre de la mission Arromanches II.

La Pologne, par la voix de son nouveau ministre de la Défense, Antoni Macierewicz, a dit « respecter pleinement et approuver la position de la France et espérer que les autres pays membres « réagissent de la même manière en prenant en compte les dangers qui planent sur les pays d’Europe centrale et orientale ».

La République tchèque a également proposé à Paris une collaboration en matière de renseignement et une participation accrue aux opérations au Mali. Et cela, malgré ses moyens militaires limités.

Mais la grande inconnue concerne les intentions d’autres pays importants de l’UE. À commencer par l’Allemagne. Et là, ce n’est pas gagné.

Ainsi, si la chancelière allemande, Angela Merkel, a affirmé que son pays allait « faire pour mener ensemble la lutte contre les terroristes », elle a également ajouté que, en tant que « citoyens », nous avons une « réponse claire » : « Nous vivons de la compassion, de l’amour du prochain, de la joie de faire partie d’une communauté. »

Son ministre de l’Économie, Sigmar Gabriel (SPD), est quasiment sur la même ligne. « Nous voyons que l’État islamique mène une guerre contre le monde libre, mais, malgré tout, si nous commençons à parler de guerre, c’est un premier succès pour l’EI, parce que plus notre société a peur, y compris de la guerre, plus le terrorisme a de succès à faire valoir », a-t-il déclaré, le 17 novembre. En clair, il faudrait « tendre l’autre joue »…

En Espagne, le Premier ministre, Mariano Rajoy, a joué sur les mots. Il ne s’agit pas « d’une guerre de religion mais d’une lutte entre civilisation et barbarie », a-t-il dit. Et, à quelques semaines d’élections législatives, le chef du gouvernement espagnol se veut prudent.

À Rome, Matteo Renzi, le président du Conseil italien, refusant « toute réaction émotionnelle », ne semble pas non plus très disposé à en faire davantage au niveau militaire.

Et si M. Renzi a fait part de sa compassion et de sa solidarité à l’égard de la France pour l’attaque « militaire » du 13 novembre, il a cependant affirmé que l’Italie n’était « pas en guerre », comme si cela allait dissuader toute attaque contre son pays, alors que la branche libyenne de l’EI a affirmé vouloir « conquérir Rome ».

Mais la demande de Paris ne porte pas uniquement sur la lutte contre Daesh mais aussi sur les autres théâtres où ses forces armées sont engagées, comme au Liban, en Centrafrique, au Sahel ou encore en Méditerranée, dans le cadre de l’opération Sophia. Un assistance pourrait ainsi être fournie au niveau logistique (transport aérien par exemple). Mais pour les moments, les intentions des uns et des autres restent à être connues.

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