Les activités de Boeing dans la défense sont en difficulté

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L’attribution à Northrop Grumman d’un important contrant visant à développer le futur bombardier stratégique de l’US Air Force est un coup dur pour Boeing, qui avait soumis une offre en partenariat avec Lockheed-Martin.

Il s’agit en outre du second marché structurant pour l’aviation militaire américaine que Boeing Defense and Space vient de perdre, après celui du Joint Strike Fighter (JSF), confié à Lockheed-Martin à l’aube des années 2000.

À cela, il faut ajouter quelques déconvenues à l’exportation. Le F-15 SE, donné pourtant gagnant en Corée du Sud, a été écarté au dernier moment au profit du F-35 tandis qu’au Brésil, le F/A-18 Super Hornet a perdu face au JAS-39 Gripen E/F suédois.

Sans quelques commandes de EA-18G Growler (dérivé du F-18) votées par le Congrès pour les besoins de l’US Navy, l’activité de Boeing dans les avions de combat aurait la tête sous l’eau. Du coup, la production de F/A-18 est assurée jusqu’en 2017 et le plan de charge pour le F-15 tiendra jusqu’en 2020, grâce en particulier à un contrat notifié par l’Arabie Saoudite. Mais l’usine de St Louis (Missouri) peut s’attendre à des suppressions d’emplois si les choses en restent là.

« Faute de commandes suffisantes pour son chasseur F/A-18 Super Hornet, l’industriel risque de ne plus jouer les premiers rôles dans le segment des avions de combat », a commenté, auprès de l’AFP, Loren Thompson du Lexington Institute. Aussi, il faut s’attendre à une posture agressive de Boeing pour les prochains appels d’offres portant sur le renouvellement de flottes d’avions de combat, comme en Finlande ou bien encore au Canada.

Au cours de ces 4 dernières années, le nombre de salariés Boeing Defense & Space, a chuté de 75.000 à 50.000 tandis que, en raison des coupes budgétaires, le montant de ses contrats auprès du Pentagone est tombé à 18,2 milliards de dollars, contre 21,5 milliards de dollars auparavant..

Pour le moment, seule la production d’hélicoptères AH-64 Apache et CH-47 Chinook se porte relativement bien. Certes, l’on pourrait penser que tout n’est pas si sombre dans la mesure où Boeing a quand même remporté un contrat majeur, ces dernières années, avec son avion ravitailleur K-46 Pegasus, aux dépens de l’A-330 MRTT d’Airbus. Seulement, là aussi, les difficultés s’enchaînent…

Ainsi, en juillet dernier, Boeing a annoncé qu’il allait passer une deuxième charge de 536 millions sur ses comptes du deuxième trimestre afin de remédier à des problèmes constatés lors des tests du circuit de carburant de son KC-46. Au total, le surcoût pour ce programme est de 1,3 milliard de dollars. D’où l’avis d’observateurs avisés que le constructeur a volontairement minoré ses coûts de développement pour remporter le marché face à Airbus.

Dans le secteur des drones, là encore, Boeing a raté une marche. Rien n’est irrémédiable mais ses concurrents, comme Northrop Grumman, qui développe le RQ-4 Global Hawk, le RQ-180 et surtout le X-47, un démonstrateur de combat capable d’opérer depuis un porte-avions, ont eu les faveurs du Pentagone et pris de l’avance.

S’agissant des activités liées à l’espace militaire, Boeing a encore de la marge, notamment dans le domaine des satellites. C’est lui qui, en outre, est « leader » dans le programme de navette automatique X-37B, laquelle bat des records de durée de vol en orbite. Mais il lui faudra compter avec l’arrivée de SpaceX sur le marché des lanceurs, sur lequel il est présent via ULA, une co-entreprise créée avec Lockheed-Martin.

Aussi, les prochaines années vont être déterminantes pour Boeing Defense & Space, avec des rendez-vous majeurs qu’il ne faudra pas manquer. Ce sera ainsi le cas pour le programme Joint Multi-Role-Technology Demonstrator, qui prévoit le remplacement des hélicoptères UH-60 Black Hawk, ou encore du marché T-X, qui vise à trouver un successeur au T-38 Talon, l’avion d’entrainement de l’aviation américaine et pour lequel l’avionneur s’est allié avec le suédois Saab.

Cela étant, deux hypothèses sont avancées pour les prochains mois : soit Boeing fait le dos rond et réduit la voilure en attendant une orientation vers la hausse des dépenses militaires américaines, soit il se lance dans une politique d’acquisition.

Dans le second cas, Northrop Grumman serait la proie idéale, puisque cela lui permettrait de mettre la main sur le contrat du prochain bombardier stratégique ainsi que sur les activités liées aux drones. Seulement, il n’est pas certain qu’une telle opération soit approuvée par l’administration Obama. En septembre, le secrétaire à la Défense, Ashton Carter, avait exprimé son opposition à une nouvelle consolidation des acteurs de l’industrie américaine de l’armement, au nom de la concurrence.

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