La Russie n’aurait pas eu accès à la technologie la plus sensible des BPC

Alors que le Parlement vient d’approuver, après un vote du Sénat, l’accord portant sur l’annulation de la livraison des deux Bâtiments de projection et de commandement (BPC) de type Mistral à la Russie, des questions se posent sur les éventuels transferts de technologie dont aurait bénéficié la partie à l’occasion de ce contrat signé en 2011 pour 1,2 milliards d’euros.

En clair, est-ce que les ingénieurs russes ont eu accès à des technologies sensibles qui leur permettraient de développer par eux-mêmes des navires de ce type? Et donc des concurrents directs aux BPC?

L’un des principaux éléments d’un BPC est son Système d’Exploitation Navale des Informations Tactiques (SENIT), qui fonctionnant avec un radar de veille tridimensionnelle MRR, centralise toutes les données collectées par différents senseurs afin de les présenter de manière synthétique et de faciliter ainsi les prises de décision.

Bien évidemment, un tel système devait être livré avec chacun des deux BPC destinés à la marine russe. Restait donc à savoir si cette dernière avait pu avoir accès à cette technologie. D’après Nicolas Gaspard, un responsable du constructeur naval DCNS, ce ne serait pas le cas.

Interrogé à ce sujet lors d’une audition organisée le 15 septembre par la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale, M. Gaspard a rappelé que le transfert de technologie portait « d’une part, sur la plateforme propulsée, c’est-à-dire le navire et sa construction, et, d’autre part, sur le système de combat ».

« Sur la plateforme propulsée, le contrat prévoyait la réalisation des deux parties arrière par une entreprise russe, OSK, à Saint-Pétersbourg. Cette construction a eu lieu et, par conséquent, le transfert de technologie nécessaire pour qu’OSK puisse livrer ces parties a été réalisé. Au moment de la résiliation, il a été convenu avec la partie russe qu’ils détruiraient les documents et, surtout, qu’ils s’engageaient à respecter nos droits de propriété intellectuelle », a expliqué ce responsable.

« Le savoir-faire portait d’ailleurs essentiellement sur des problèmes d’ordonnancement de chantier et d’organisation des tâches dans une construction de nature essentiellement mécano-électrique. Autrement dit, rien qui mette en péril notre savoir-faire technologique », a ensuite ajouté M. Gaspard. Et la partie russe peut avoir gardé les documents qu’elle devait détruire… Dans le fond, cela ne prête pas à conséquence, d’autant plus que l’accord trouvé en août avec Moscou interdit toute reproduction d’éléments de la coque propulsée.

S’agissant du système de combat des BPC, il n’y aurait pas, non plus, d’inquiétude particulière à avoir. « La décision du gouvernement [ndlr, de ne pas livrer les navires] au moment où nous allions communiquer un certain nombre de documents, en particulier concernant les codes sources. Nous nous sommes bien sûr abstenus de les envoyer », a raconté M. Gaspard. « Le hasard du calendrier a fait qu’il n’y a quasiment pas eu de livraison sur cette partie. Seules ont eu lieu quelques visites d’experts russes chez des industriels français, dont DCNS », a-t-il ajouté.

Cela étant, et alors que la décision de « surseoir jusqu’à nouvel ordre » à la livraison des deux BPC à la Russie venait d’être annoncée par le président Hollande, en novembre 2014, un vol avait été commis à bord d’un des navires… Deux disques durs, une carte-mère, une carte graphique et un logiciel de gestion de communications entre serveurs mis au point par Thales avait alors été subtilisés. Depuis, rien n’a filtré sur cette affaire.

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