Le mouvement taleb craint l’émergence de l’État islamique en Afghanistan

Que le groupe État islamique (EI) chercher à s’implanter en Afghanistan et au Pakistan n’est pas un mystère. Le chef de cette organisation, Abu Bakr al-Baghdadi a ainsi reçu, au début de cette année, le ralliement de plusieurs commandants taliban locaux.

En outre, certains chefs jihadistes ont dits soutenir l’EI, sans toutefois aller jusqu’à lui prêter allégeance. C’est notamment le cas du Mouvement islamique d’Ouzbékistan (MIO), présent en Afghanistan. « Au nom de tous les membres de notre mouvement et en accord avec nos devoirs sacrés, je déclare que nous sommes dans les mêmes rangs que le (groupe) État islamique dans cette guerre entre l’Islam et les kafir [ndrl, mécréants] », a ainsi affirmé, en octobre 2014, Ousma Gazi, l’un de ses dirigeants.

Pour autant, en janvier, la DIA (Defense Intelligence Agency, l’agence de renseignement du Pentagone) estimait que la greffe ne prendrait pas en raison de la force des liens tribaux et d’une divergence profonde sur les objectifs poursuivis par l’EI et le mouvement taleb. Ce dernier, même allié d’al-Qaïda, limite ses opérations en Afghanistan et n’a pas de visée expansionniste. Et de considérer que les ralliements de chefs taliban à al-Baghdadi étaient « marginaux ».

Toujours est-il que, récemment, des combats entre les deux factions ont été rapportés dans la province afghane de Nangarhar. Et, il y a quelques jours, le gouverneur taleb « fantôme » de cette région, Mir Ahmed Gul, a été éliminé par des combattants supposés appartenir à l’EI.

D’où, d’ailleurs, la réaction d’Akhtar Mohammed Mansour, le numéro deux du mouvement taleb afghan. Dans une lettre adressée à el-Baghdadi, il a tenu à faire une mise au point. « Le jihad contre les Américains et leurs alliés doit être mené sous une bannière et une direction uniques », a-t-il écrit.

« Que Dieu nous en préserve, si vous veniez à prendre des décisions à distance, vous perdriez le soutien des érudits, des moudjahidines et de sympathisants », a encore avert le mollah Mansour, avant de prévenr que le mouvement taleb sera « forcé de réagir afin de défendre ses acquis » si jamais l’EI venait à marcher sur ses plates-bandes.

Cela étant, dans un rapport sur la situation en Afghanistan qu’il vient de remettre au Congrès, le Pentagone se veut désormais prudent. Ainsi, les forces américaines ont décelé « quelques signes d’efforts de recrutement limité » de l’EI et « quelques individus, autrefois affiliés à d’autres organisations, disent maintenant appartenir à la « Province du Khorasan » de l’État islamique, est-il écrit dans le document.

Mais ce « changement de marque » est « probablement une tentative pour attirer l’attention des médias, obtenir davantage de ressources financières et augmenter le recrutement », estime le rapport, pour qui l’EI est actuellement dans « une phase initiale d’exploration » en Afghanistan.

Même si le Pentagone considère que la plus grande menace, en Afghanistan, reste encore le réseau Haqqani, il n’en reste pas moins qu’il commence à s’inquiéter de l’émergence de l’EI dans le pays, qui, selon lui, « continuera probablement d’essayer d’augmenter sa présence (…) pendant l’année à venir, et cherchera à rivaliser » avec les taliban et les autres groupes terroristes actifs en Afghanistan.

Pour l’ancien ministre afghan de l’Intérieur, Jalal Ahmad Jalali, qui s’est exprimé lors d’un colloque de l’United States Institute of Peace (USIP), le 16 juin, l’EI pourrait jour sur les rivalités tribales pour accroître son influence.

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